Le site d’enfouissement de déchets industriels dangereux de Stablex Canada à Blainville ne dépasse aucune norme environnementale, contrairement à ce qu'affirment des groupes citoyens, assure Québec, qui tente par ailleurs de trouver une voie de passage pour rendre acceptable l’agrandissement prévu des installations de cette entreprise jugée « nécessaire » par le ministre de l’Environnement.

CE QU’IL FAUT SAVOIR

  • Le site d’enfouissement de déchets industriels dangereux de Stablex Canada ne dépasse aucune norme environnementale, assure Québec.
  • Des groupes citoyens disaient en février avoir mesuré une « contamination importante » autour du site.
  • L’entreprise, unique au Québec, prépare l’agrandissement de ses installations d’enfouissement.

« Il n’y a aucun manquement à la réglementation environnementale ni aux autorisations ministérielles délivrées à l’entreprise pour encadrer ses opérations », a affirmé vendredi dans un communiqué le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).

Cette conclusion repose sur les résultats d’échantillonnage de 20 puits d’eaux de surface et d’eaux souterraines dans le sable, l’argile et le roc, ainsi que de prélèvements dans des fossés, effectués par le MELCCFP en avril.

Les mesures de contaminants sont jugées « non inquiétantes », à l’exception d’une seule, qui pourrait être liée à l’utilisation d’un abat-poussière au chlorure dans le passé.

Inquiétudes citoyennes

Des groupes citoyens s’alarmaient en février d’une « contamination importante dans les cours d’eau autour du site d’enfouissement [de] Stablex », à la suite d’échantillonnages qu’ils avaient effectués sur des terrains voisins de l’entreprise.

Divers contaminants, dont du cadmium, avaient été décelés à des taux supérieurs aux normes québécoises, affirmait le communiqué publié par une coalition d’organisations, dont Mères au front – Rivière-des-Mille-Îles, appuyées par la Société pour vaincre la pollution et Eau Secours.

« Sans dénigrer l’intention des citoyens, car je peux comprendre leur souhait d’en savoir plus, la méthodologie qui a été utilisée, malheureusement, était déficiente », a déclaré dans un entretien à La Presse le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette.

Pour rassurer la population, on a procédé à des analyses qui sont rigoureuses. Dans les faits, il n’y a pas d’inquiétude à avoir.

Benoit Charette

Il y a « évidemment des failles » dans la démarche des citoyens, reconnaît Daniel Green, de la Société pour vaincre la pollution, qui l’avait chapeautée.

« On parle d’échantillonnage fait par des citoyens, pas des techniciens du ministère de l’Environnement », dit-il, ajoutant avoir été limité par des contraintes budgétaires.

C’est pourquoi les citoyens ont transmis leurs résultats au Ministère et lui ont demandé de faire des vérifications aux mêmes points d’échantillonnage, à l’extérieur du site, et non sur le site, explique M. Green, réitérant avoir des raisons de croire que des contaminants « quittent le site de Stablex ».

Il demande au Ministère de faire preuve de « transparence » et de publier lui aussi ses résultats d’analyse et sa démarche.

« On veut s’assurer que le Ministère a échantillonné sans avertir la compagnie, dit-il. Un pollueur peut arrêter ses déversements. »

Entente imminente pour un agrandissement

Les inquiétudes à l’égard de Stablex surgissent alors que l’entreprise planifie l’agrandissement de ses installations d’élimination de déchets industriels dangereux.

En vertu d’une autorisation accordée en 1981, Stablex pourrait ouvrir une sixième cellule d’enfouissement sur son site, quand la cinquième, en cours d’utilisation, devra être fermée.

Mais l’urbanisation du secteur au cours des 40 dernières années a fait en sorte que cette cellule se retrouverait à 300 mètres de résidences, si bien que l’entreprise a demandé l’autorisation de l’implanter ailleurs, une option que le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a toutefois recommandé de rejeter, en septembre, invoquant notamment l’impact que le projet aurait sur les milieux naturels.

« On [étudie] une autre option qui permettrait de préserver les milieux humides d’intérêt et de nous éloigner des citoyens qui se montrent inquiets », a déclaré à La Presse le ministre Benoit Charette.

Cette option serait réalisée sur l’un ou l’autre des deux sites déjà étudiés, mais avec « des variantes » aux projets initiaux, indique le ministre, disant s’attendre à ce qu’une entente soit conclue entre Stablex, la Ville de Blainville et le ministère de l’Environnement dans les prochains jours ou les prochaines semaines.

« Il faut comprendre que Stablex est nécessaire au Québec ; c’est la seule entreprise qui s’est spécialisée dans la gestion des matières contaminées », souligne le ministre.

Si jamais Stablex fermait, ce sont des entreprises d’importance au Québec qui, du jour au lendemain, n’auraient pas d’autre [solution]. On aurait de très grands enjeux environnementaux.

Benoit Charette

Stablex satisfaite

Les échantillonnages effectués par le MELCCFP en avril s’ajoutent à ceux réalisés depuis le début de l’exploitation de l’usine, en 1983, et aux 65 « inspections terrain » réalisées par le Ministère entre 2015 et 2023, qui n’ont détecté aucune fuite ou source de contamination provenant du site d’enfouissement, indique son communiqué.

Stablex est en outre légalement tenue d’effectuer elle-même un suivi environnemental des eaux souterraines, des eaux de surface, des eaux rejetées dans le réseau d’égouts et des rejets atmosphériques potentiels liés à ses activités.

« Nous sommes heureux de constater que les résultats de l’analyse effectuée par le MELCCFP sont en concordance avec nos propres résultats », a déclaré à La Presse Maxime Couture, porte-parole de Stablex, estimant que « ces conclusions viennent confirmer notre engagement et nos pratiques rigoureuses en matière de conformité environnementale ».

En savoir plus
  • 9 000 000
    Quantité, en tonnes, de déchets dangereux que Stablex Canada a été autorisée à enfouir par le gouvernement québécois en 1981
    Source : Bureau d’audiences publiques sur l’environnement
    2 900 000
    Capacité d’enfouissement dont dispose encore Stablex Canada
    Source : Bureau d’audiences publiques sur l’environnement