(Atlanta) C’est l’histoire du réfugié libérien qui portera le brassard de capitaine du Canada devant la meilleure équipe au monde. Ce nouveau chapitre peu banal de l’inspirant récit d’Alphonso Davies sera écrit ce jeudi, à Atlanta, en lever de rideau de la Copa América.

L’annonce officielle du capitanat d’Alphonso Davies a été faite lundi par la fédération, en vue de l’affrontement contre l’Argentine au stade Mercedes-Benz. C’est d’ailleurs dans cette grandiose enceinte de 71 000 places – le match se jouera à guichets fermés – qu’a eu lieu la conférence de presse de veille de match, et c’est là que Davies a pu commenter la nouvelle.

« Comme vous le savez, je suis arrivé au Canada quand j’avais 5 ans, a-t-il dit devant les nombreux membres des médias internationaux rassemblés dans la salle de presse. Ils m’ont accueilli, ils m’ont fait l’un des leurs. J’aime ce pays. »

Davies est dans l’environnement de l’équipe séniore canadienne depuis 2017. Entre-temps, grâce à son transfert des Whitecaps de Vancouver vers le Bayern Munich en 2019, il s’est démarqué comme l’un des meilleurs latéraux gauches au monde. Avec tout ça, on oublie qu’il n’a que 23 ans, et qu’il est encore l’un des plus jeunes joueurs de cette équipe.

En revanche, son sélectionneur Jesse Marsch estime qu’il est « équipé de plusieurs des qualités qui en feront l’un des plus grands leaders, et certainement le joueur le plus important d’ici à [la Coupe du monde de] 2026 ».

« On ne s’attend pas à ce qu’il soit parfait dès maintenant. Les capitaines n’ont pas besoin d’être parfaits tout le temps non plus. »

Atiba Hutchinson en sait quelque chose. La légende du soccer canadien a porté le brassard pendant une bonne partie de la dernière décennie, au fil d’une carrière professionnelle de 20 ans.

Hutchinson est à Atlanta, affecté avec TSN, et on l’accroche dans la cafétéria de la tribune de presse après les allocutions de Marsch et de Davies.

« Plus le temps va passer, plus il va en apprendre sur le rôle de leader, indique Hutchinson, qui a joué avec Davies jusqu’à sa retraite, l’an dernier. Déjà, il est plus loquace que lorsqu’il est arrivé avec l’équipe. Il était plus jeune, et plus silencieux à l’époque. Il a acquis le respect des joueurs. Je pense que c’est bien pour lui. »

Il sera un bon leader pour le pays dans les années à venir.

Atiba Hutchinson

T’a-t-il demandé des conseils ?

« Non, pas encore ! C’est encore très nouveau. La porte est toujours ouverte s’il veut venir me voir. C’est un bon kid, je pourrai lui donner des indications s’il en a besoin. »

« Un grand niveau de respect » pour l’Argentine

« Bienvenue à la toute première conférence de presse de la Copa América 2024 », a lancé la relationniste de presse de la CONMEBOL, alors que Marsch et Davies venaient de s’asseoir à ses côtés.

Devant eux, des dizaines de journalistes, photographes et caméramans qui venaient de traverser le chemin de croix entre la tribune de presse, dans les hauteurs du stade des Falcons et d’Atlanta United, jusqu’à cette salle de conférence, dans ses entrailles.

La plupart des questions tournent autour de Lionel Messi, de la puissance qu’est l’Argentine.

PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, AGENCE FRANCE-PRESSE

L’entraîneur Jesse Marsch et le capitaine Alphonso Davies

« On a un grand niveau de respect pour cette équipe », assure Marsch, qui ramène la plupart du temps ses réponses à la « concentration » de ses joueurs sur leur propre formation, et sur la « préparation individuelle » de ceux-ci.

Notamment en ce qui a trait à la façon de contrer le meilleur joueur de l’histoire.

« Le défi, ce n’est pas juste sa qualité, mais ses mouvements dans le match, dit l’entraîneur. Il n’est pas toujours au même endroit, et il est très rusé pour déjouer la ligne de défense. […] Il y a des éléments à surveiller, mais la clé sera de toujours être conscient de sa position et de s’assurer qu’il n’a pas d’espace libre. »

« On ne s’attend à rien d’autre que du meilleur »

L’Argentine n’est pas classée première au monde par la FIFA pour rien : elle n’a perdu que deux matchs en cinq ans. Il y a eu la défaite contre l’Arabie saoudite à la Coupe du monde de 2022, puis celle contre l’Uruguay, en novembre dernier, en qualification pour le prochain Mondial.

« Je pense que l’Argentine aura appris de son erreur au Qatar contre l’Arabie saoudite, a estimé Marsch. On ne s’attend à rien d’autre que du meilleur de sa part. On serait fous de ne pas se préparer en conséquence. »

L’entraîneur voit en revanche quelques leçons à tirer de la victoire de l’Uruguay, sous les ordres de son homologue Marcelo Bielsa : ce dernier était son prédécesseur à Leeds, et propose un style de jeu duquel s’inspire Marsch.

« Bielsa joue un style très spécifique qui est différent du mien, affirme-t-il. Mais il y a cette compréhension de la combativité dans les duels, de ne pas reculer devant les joueurs de grande qualité. L’aspect physique est important pour nous. »

En ce sens, le sélectionneur s’était plaint des trois jours de congé offerts aux joueurs – avant qu’il arrive en poste – après le match contre la France, à Bordeaux : c’était pour lui trois jours de moins au cours desquels travailler sur la condition physique de ses hommes. Dans ce style de jeu à pression haute et soutenue, les Canadiens doivent être en jambes pendant 90 minutes. A-t-il eu le temps d’atteindre le niveau de conditionnement souhaité malgré tout ?

« On les a poussés vraiment fort », dit-il, portant son regard vers Davies, en souriant.

« Oui », confirme le capitaine, en pouffant de rire.

« Avec les conditions météo et les exigences physiques de ces rencontres, c’était vital que l’on soit au sommet de notre forme. On les a poussés, mais ils s’en sont remis, et on a aussi travaillé nos principes tactiques. On est prêts, et on est excités. »

Sans confirmer son onze titulaire, Jesse Marsch a mentionné que « s’il y a des changements » dans sa formation après le 0-0 contre la France, « ils ne seront pas nombreux ».

« Tout peut arriver, croit quant à lui Hutchinson. C’est un match de foot. Ils ont montré qu’ils peuvent rivaliser contre de très bonnes équipes. »

Le match Canada-Argentine à la Copa América sera diffusé à RDS2 et TSN1 ce jeudi à 20 h.

« On ne peut rien tenir pour acquis »

PHOTO JEAN-FRANÇOIS TÉOTONIO, LA PRESSE

Leandro Paredes

Si la salle était bien remplie pour le Canada, elle débordait pour l’Argentine. Le genre de conférence de presse où ton aire de travail se limite à tes deux genoux.

Et ce n’est même pas le capitaine Lionel Messi qui s’est présenté, mais plutôt le défenseur de la Roma, Leandro Paredes, avec ses yeux bleus perçants. Évidemment accompagné de l’entraîneur Lionel Scaloni, qui a mené les Argentins à des titres en Copa América (2021) et à la Coupe du monde (2022) depuis son arrivée, en 2018.

« Le Canada est une bonne équipe, a-t-il assuré, ses propos traduits de l’espagnol simultanément sur une application. Des joueurs incroyables, un nouvel entraîneur avec de belles idées, un nouveau plan de match. Ils ont bien fait à la Coupe du monde, mais ils ont manqué un peu de chance. C’est un adversaire coriace, et on ne peut rien tenir pour acquis. »

PHOTO JEAN-FRANÇOIS TÉOTONIO, LA PRESSE

Lionel Scaloni

Il a notamment été question de la « fierté » que ressentent les deux hommes quand ils représentent leur pays, chacun à leur façon. Ainsi que de l’état d’esprit du capitaine, un certain Lionel Messi, qui pourrait disputer, tout comme son compatriote Ángel Di Maria, un dernier tournoi international avec l’Argentine.

« Il va bien, dit Scaloni en rigolant. Il est heureux. Je veux vraiment qu’Ángel et lui s’amusent. Le monde du foot doit apprécier d’avoir ces joueurs. »

De petites cachettes

  • Le stade Mercedes-Benz d’Atlanta

    PHOTO JEAN-FRANÇOIS TÉOTONIO, LA PRESSE

    Le stade Mercedes-Benz d’Atlanta

  • L’intérieur du stade Mercedes-Benz d’Atlanta, avec du gazon naturel

    PHOTO JEAN-FRANÇOIS TÉOTONIO, LA PRESSE

    L’intérieur du stade Mercedes-Benz d’Atlanta, avec du gazon naturel

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Toute la journée, la CONMEBOL a refusé aux médias de même regarder le terrain du stade Mercedes-Benz. Pourquoi ? C’est qu’après le match d’Atlanta United en MLS sur son synthétique habituel, samedi dernier, on a remplacé la surface par du naturel, afin de se plier aux exigences de la FIFA. Mercredi, tout n’était pas encore au point. Nous étions censés avoir droit à une « familiarisation » du stade en matinée, mais elle a été annulée. Et les deux équipes n’ont pas pu tester la surface, une norme à la veille d’une rencontre, peu importe la compétition.

Entre les deux conférences de presse, nous avons passé la journée dans la cafétéria de la tribune de presse. Des gardiens de sécurité ont bloqué l’accès à la tribune donnant une vue sur la pelouse. En fin de journée, nous avons finalement pu y jeter un réel regard, avec un accès surprise sur les lignes de côté. Les lignes de démarcation de la tourbe sont encore très claires. Advienne que pourra.