Voitures de luxe. Sacs à main griffés. Vacances dans les îles.

Avec l’orgie de consommation ostentatoire qui déferle sur les médias sociaux, il est très facile de s’imaginer plus pauvre qu’on ne l’est, contraint de siroter une bière alors qu’on pourrait en fait commander du champagne une fois de temps en temps.

Cela porte un nom : « dysmorphie financière ».

Ce terme – qui n’est pas vraiment nouveau – fait le tour de l’internet ces jours-ci et décrit notre relation souvent tordue avec l’argent.

Il s’inspire du terme « dysmorphie corporelle », un trouble mental dont l’effet est d’obséder sur un trait physique perçu comme un défaut.

La dysmorphie financière (qui n’est pas un vrai diagnostic) désigne l’insécurité financière irrationnelle. Selon des planificateurs financiers, cet état d’esprit peut entraîner des erreurs financières comme trop dépenser ou faire des investissements risqués.

Syndrome du voisin gonflable

« C’est comme le syndrome du voisin gonflable », explique Courtney Alev, planificatrice chez Intuit Credit Karma, société-conseil en finances personnelles. Chez ceux qui ont le sentiment de ne pas être à la hauteur financièrement, il est tentant de « capituler et de claquer leur argent pour des plaisirs à court terme qui empêchent la constitution d’un patrimoine ».

Selon un sondage Qualtrics commandé par Intuit Credit Karma, 29 % des adultes américains disent éprouver de la dysmorphie financière. Les jeunes sont les plus touchés : chez les moins de 30 ans, c’est 43 % ; chez ceux qui sont dans la trentaine ou la jeune quarantaine, c’est 41 %. Mais au-delà de cet âge et jusqu’à la fin de la cinquantaine, la proportion des répondants disant éprouver de la dysmorphie financière tombe à 25 %, puis à seulement 14 % chez des personnes âgées de 59 ans et plus.

Le ralentissement du marché de l’emploi, les dettes d’études, la cherté des maisons et le coût élevé d’élever des enfants sont autant d’embûches qui rendent moins accessibles les objectifs financiers des générations précédentes. De plus, les modes de vie ostentatoires que les jeunes voient en ligne aggravent leur sentiment d’inadéquation, dit Mme Alev.

Encore les médias sociaux

L’an dernier, la société de planification financière Edelman Financial Engines a commandé un sondage sur les dépenses et les médias sociaux.

Un tiers des répondants ont dit avoir dépensé au-delà de leurs moyens pour des vacances, articles de luxe, etc., stimulés par ce qu’ils avaient vu en ligne. Ce chiffre dépasse la moitié pour les répondants disant passer plus de trois heures par jour sur les médias sociaux.

La récente prolifération de contenus financiers en ligne – certains très bons, d’autres moins – peut aussi rendre les gens moins sûrs de leurs décisions, note Kevin Mahoney, fondateur d’Illumint, société de planification financière s’adressant aux milléniaux.

Rien de plus facile aujourd’hui que de trouver des gens qui se vantent en ligne de « combien ils gagnent, ou qu’ils ont amassé x dollars en tant de jours, ou disent : “Voici ce que vous devriez avoir accompli à l’âge de 30 ans” », souligne M. Mahoney.

« Ça ne veut pas dire que ça s’applique le moindrement à votre vie. »

Cet article a été publié dans le New York Times.

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