(Québec) Le ministre François Bonnardel a déposé jeudi le projet de loi « Maureen Breau » qui vient resserrer le suivi de personnes ayant déjà fait l’objet d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir leur procès. Les policiers auront aussi accès à des renseignements médicaux pour mieux préparer leur intervention.

Le ministre de la Sécurité publique a déposé jeudi le projet de loi 66, qui vise à renforcer le suivi des personnes faisant l’objet d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir leur procès. Ces individus font l’objet d’une décision de la Commission d’examen des troubles mentaux (CETM).

Or, il a été révélé lors de l’enquête publique du coroner sur la mort de Maureen Breau que des agents ignoraient que l’homme qui faisait l’objet d’une intervention, Isaac Brouillard Lessard, était suivi par le CETM. Des policiers ont aussi affirmé mal connaître cette commission.

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Maureen Breau

Le gouvernement Legault veut corriger ces lacunes avec son projet de loi.

« Pour moi et pour nous, il était important que les policiers en situation particulière soient capables d’aller chercher de l’information du côté des équipes médicales, du côté des équipes d’intervenants de la santé pour connaître le comportement […] d’une personne qu’on pourrait considérer dangereuse », a exprimé jeudi le ministre François Bonnardel lors d’une conférence de presse.

Le texte législatif prévoit qu’un organisme du secteur de la santé et des services sociaux, comme un hôpital, pourra désormais « communiquer à un corps de police un renseignement qui est nécessaire à ses interventions auprès de personnes faisant l’objet d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir leur procès ».

Québec crée aussi 20 postes d’agent de liaison qui auront le mandat de faire le lien entre les corps de police et les équipes médicales traitantes. Par exemple, un individu qui présente des signes de dangerosité sera identifié nécessitant un suivi avec un agent de liaison. Il y aura un suivi plus fréquent, des contacts seront effectués avec l’entourage de la personne également.

Cela permettra notamment d’éviter de perdre la trace d’une personne qui déménagerait et de suivre l’évolution de son comportement.

Lors d’une intervention policière, quand l’adresse de cette personne sera saisie par l’agent, il aura alors accès au dossier préparé par l’agent de liaison. On trouvera aussi un contact de l’équipe médicale traitante. Ce professionnel sera maintenant autorisé à transmettre l’information médicale pertinente à l’intervention.

Quelque 2000 personnes ont fait l’objet d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir leur procès, dont 1153 ont été libérés avec certaines conditions. Le ministère de la Sécurité publique estime qu’environ la moitié pourrait être assignée à un agent de liaison.

La CETM disposera d’ailleurs d’un outil standardisé pour évaluer la dangerosité d’un individu. Pour cela, Québec n’a pas besoin de légiférer. Il s’agit d’une mesure du projet de hiérarchisation de la psychiatrie légale, a précisé le ministre responsable des Services sociaux.

« On se donne [aujourd’hui] les moyens de mieux protéger les Québécoises et les Québécois tout en maintenant les principes d’inclusion sociale, qui nous sont chers », a souligné M. Carmant qui a confirmé l’ajout de 40 intervenants psychosociaux pour soutenir les équipes existantes de professionnels de la santé qui suivent les patients de la CETM.

Le gouvernement présente son texte législatif avant le dépôt du rapport de la coroner Géhane Kamel qui mène une enquête publique sur la mort de la policière en 2023. Les audiences ont pris fin le 21 mars. Son rapport est prévu pour l’automne. « On va s’ajuster », a promis le ministre M. Bonnardel.

De la formation sur la CETM sera aussi incluse dans le programme de l’École nationale de police du Québec.

François Legault avait annoncé à la mi-mai, lors de son passage à l’École nationale de police, l’intention de son gouvernement de légiférer pour éviter la répétition d’un drame comme le meurtre de la policière Maureen Breau. Lors d’une intervention en mars 2023, Isaac Brouillard Lessard a grièvement blessé un patrouilleur et poignardé mortellement la sergente Maureen Breau avant d’être tué par balle par la police dans son immeuble. L’homme de 35 ans avait de nombreux antécédents de voie de fait, un historique de trouble mental et sa famille avait lancé plusieurs appels à l’aide.

Avec Tommy Chouinard et Mayssa Ferah, La Presse