(Québec) Dans la foulée de la contestation judiciaire de la loi 21 sur la laïcité de l’État, le procureur général du Québec, Simon Jolin-Barrette, demande à un juge de la Cour suprême, Mahmud Jamal, de se récuser, craignant qu’il n’ait « pas l’impartialité requise pour entendre la présente cause ».

L’information, d’abord rapportée par Le Devoir, a été confirmée par La Presse Canadienne.

Dans une lettre envoyée à la Cour suprême mercredi, le procureur général du Québec indique que le juge Mahmud Jamal était le président de l’Association canadienne des libertés civiles (ACLC) au moment où cette association a déposé un recours devant la Cour supérieure pour contester la Loi sur la laïcité de l’État en juin 2019.

« À titre de président de l’Association, le juge Jamal a nécessairement été impliqué d’une quelconque façon dans la préparation de cette procédure de 194 paragraphes, que ce soit dans sa rédaction, sa révision ou simplement pour en approuver le contenu », peut-on lire dans la missive dont La Presse Canadienne a obtenu copie.

Dans la lettre, on indique également que le « fait que le juge Jamal doive trancher des questions de droit constitutionnel soulevées par l’Association au moment où il la présidait fait en sorte qu’il serait aujourd’hui le juge dans une affaire où il était partie ».

La Presse Canadienne a également obtenu des lettres du Mouvement laïque québécois (MLQ) et du groupe Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec), qui demandent également le retrait du juge Mahmud Jamal pour des raisons similaires à celles de Québec.

Or, dans une missive datée du 25 juin, la Cour suprême a déjà indiqué que le juge Jamal n’avait pas l’intention de se retirer. « (Il) estime qu’il n’existe aucun conflit d’intérêts réel ou raisonnablement perceptible qui l’inciterait à se récuser », peut-on lire dans la lettre dont La Presse Canadienne a aussi obtenu copie.

Mahmud Jamal a été nommé juge à la Cour suprême du Canada le 1er juillet 2021. Il a auparavant été juge à la Cour d’appel de l’Ontario de 2019 à 2021, indique-t-on sur le site de la Cour suprême. Avant d’être nommé juge, M. Jamal a été avocat au sein du cabinet Osler, Hoskin & Harcourt.

Plusieurs groupes, dont l’Association canadienne des libertés civiles, ont demandé à la Cour suprême de réviser le jugement de la Cour d’appel du Québec concernant la loi 21. Le plus haut tribunal du pays n’a pas encore indiqué s’il allait ou non se saisir du dossier.

Le gouvernement fédéral a déjà indiqué qu’il participerait à une éventuelle contestation judiciaire de la loi 21 devant la Cour suprême, tandis qu’à Québec, on a toujours promis de défendre « jusqu’au bout » la laïcité de l’État.

La Cour d’appel a donné raison à Québec

En février dernier, la Cour d’appel a validé en quasi-totalité la loi 21, affirmant qu’elle ne viole pas les droits linguistiques des commissions scolaires anglophones.

La Cour d’appel avait également affirmé que Québec avait le droit d’utiliser la disposition de dérogation de manière préventive comme il l’a fait dans le cas de la loi 21.

Il s’agissait d’un revers important pour les opposants à cette législation.

La loi 21 interdit aux employés de l’État en position d’autorité –  y compris les enseignants – de porter des signes religieux comme le voile musulman, la kippa juive, le turban sikh et les croix chrétiennes.