« La chaleur est insupportable ! », lance Bertrand Tchouateu. Employé de la Ville de Montréal, l’homme a passé la journée dehors, mardi, par des températures frôlant les 32 ℃ à installer une dizaine de brumisateurs près du Quartier des spectacles. Le but : permettre aux Montréalais de se rafraîchir un peu pendant la vague de chaleur qui ne laisse personne indifférent.

Mardi marquait ainsi la première journée de la vague de chaleur qui va s’abattre sur le Québec dans les prochains jours. Plusieurs villes au Québec ont franchi le cap des 30 ℃ avec un humidex pouvant dépasser la barre des 40.

Qu’à cela ne tienne, la chaleur, Bertrand Tchouateu connaît ça. « Quand c’est chaud comme ça, les gens ont besoin de se rafraîchir. C’est à cause de l’humidité. Là d’où je viens, il fait chaud, mais c’est sec. Ici, c’est vraiment humide », affirme l’homme originaire du Cameroun.

Simon Legault, météorologue pour Environnement Canada, confirme que le maximum le plus élevé de la vague de chaleur devrait avoir lieu mercredi pour la majorité des régions du Québec.

Mardi, le sommet s’est fait sentir dans l’ouest de la province, notamment à Gatineau, où le mercure a grimpé jusqu’à 33,4 ℃, soit la température la plus élevée enregistrée dans la province.

La métropole et Gatineau n’ont pas été les seules villes à être frappées par cette vague de chaleur. À Trois-Rivières, le mercure est monté jusqu’à 32 ℃ en journée, et la température ressentie a approché les 40 en milieu de soirée.

À Saguenay, la journée s’est terminée sous le tonnerre après avoir aussi atteint les 32℃ au cours de la journée.

En Abitibi-Témiscamingue, le thermomètre est resté haut même après le coucher de soleil, avec une température ressentie de 38 à Val-d’Or.

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Bertrand Tchouateu au travail

Bref, le Québec enregistre ces jours-ci des températures au-dessus des normales de saison. Mais on devra peut-être s’y faire : le phénomène pourrait devenir de plus en plus fréquent, prévient le météorologue Simon Legault. « Dans les prochaines décennies, on devrait s’attendre à des températures plus élevées, plus tôt en saison, et des périodes plus longues de chaleur. »

Le niveau d’humidité élevé contribue à empêcher le corps de se refroidir adéquatement, rappelle-t-il. « Quand c’est très humide à l’extérieur, la sueur s’évapore plus difficilement. Alors le système qui refroidit le corps humain n’est plus efficace. »

« On a connu en 2020 une vague de chaleur dans la même période de l’année, mais on n’a pas eu de grosse humidité ou d’humidex au-dessus de 40. Alors que là, on devrait atteindre du 44 ou 45 », ajoute le météorologue. « Avoir ça aussi tôt en saison, c’est quand même anormal. »

Se rafraîchir le plus possible

Mardi matin, au parc La Fontaine, dans Le Plateau-Mont-Royal, la chaleur était de plus en plus palpable. Salma Ghaoui, propriétaire d’une garderie familiale, a amené les neuf enfants de sa garderie aux jeux d’eau, une solution efficace pour rafraîchir ses enfants, bien qu’elle ne soit pas satisfaite par les installations actuelles du parc.

« Mes enfants l’année passée sont tombés pas mal et parfois, l’eau ne marche pas. C’est compliqué, les enfants avec la chaleur, ils sont fatigués, surtout à la fin de la journée. Le travail est plus dur », soutient la Montréalaise.

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Dans les jeux d’eau du parc La Fontaine

Mme Ghaoui n’est pas au bout de ses peines. « Si on dépasse les 35 degrés, ça serait le record pour n’importe quelle journée en juin depuis toujours », affirme Simon Legault. « Ça serait plus mercredi qu’on pourrait l’atteindre, ce n’est pas garanti, mais ça montre que c’est vraiment extrême, ce qu’on vit », explique le météorologue.

« Il faut vraiment prendre soin des personnes vulnérables comme les personnes âgées, les femmes enceintes, les enfants », ajoute-t-il en réitérant les bienfaits de s’hydrater et de profiter des points d’eau accessibles dans les parcs, notamment.

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Étang asséché du parc La Fontaine

Toujours au parc La Fontaine, Fanny Esteves et son chien étaient étendus sous un arbre pour éviter le soleil. Elle faisait face à l’étang du parc La Fontaine presque complètement vidé de son eau, lui donnant des allures de marécage asséché.

« Visuellement, c’est plus agréable d’avoir de l’eau et même je pense que ça ramènerait plus de fraîcheur. J’avoue que je supporte très mal la chaleur et mon chien a vraiment très chaud », a souligné la jeune femme.

Travailler sous le soleil

Mardi midi, près de 16 heures de travail dans la rue Saint-Urbain attendaient Samuel Gélinas, contremaître en échafaudage, en cette période de chaleur extrême. « C’est lourd, c’est pesant, on boit de l’eau », a affirmé le travailleur de la construction.

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Le contremaître en échafaudage Samuel Gélinas

Planches de bois sous le bras, il s’apprêtait à monter l’échafaud pour y rejoindre ses collègues qui se sont trouvé un coin d’ombre.

Il s’estime chanceux comparativement à certains de ses collègues en construction : « Ça arrive, des problèmes, des coups de chaleur, manque d’eau, manque de points d’ombre… Les couvreurs n’ont jamais d’ombre sur les toits. »

Il n’est pas le seul à se soucier de ses collègues qui affrontent la chaleur dans leurs milieux de travail. Gabriel Lalande, livreur à vélo pour une pharmacie dans Le Plateau-Mont-Royal, estime que ses « collègues en auto se plaignent de la chaleur. La circulation est très difficile sur le Plateau, dans plusieurs quartiers de Montréal. Même si tu as de l’air climatisé, c’est lourd ».

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Des couvreurs travaillaient mardi sur un toit d’Ottawa à plus de 33 ℃.

Gilles Dion, signaleur routier, souligne également les difficultés avec la chaleur étouffante. « Il y a des chantiers où il y a du bitume et de l’asphalte et ça, c’est chaud ! Leurs journées sont souvent écourtées à cause de la chaleur. Il y a des gens qui ne sont juste pas capables », a expliqué M. Dion.

Les cinq villes où il a fait le plus chaud au Québec le 18 juin 2024

  • Gatineau (33,4 ℃)
  • Sainte-Clotilde (33,2 ℃)
  • L’Assomption (33 ℃)
  • Maniwaki (32,9 ℃)
  • Saint-Anicet (32,9 ℃)

Source : sommaire des conditions météo d’Environnement Canada

Avec la collaboration de Quentin Dufranne, La Presse