(Québec) Le CPE de la rue Viger Ouest, où des enfants sont escortés par la police lors des promenades, pourrait être relocalisé. À la Maison Benoît-Labre, la cohabitation entre l’itinérance et les enfants « aurait dû être mieux préparée » par Montréal, déplore Lionel Carmant.

« Ça ne fait pas de sens ! Qui peut penser au Québec que ça fait du sens que les enfants soient obligés quand ils vont dehors d’être accompagnés par la police », a déploré mercredi la ministre de la Famille, Suzanne Roy. Elle a affirmé que son ministère « accompagne » le CPE Le Petit Palais, situé sur la rue Viger Ouest, qui envisage de se relocaliser.

« On regarde les différentes possibilités, ils analysent même la possibilité de se relocaliser. On les accompagne dans leur décision. Ce qu’on souhaite c’est que nos enfants soient en sécurité et qu’ils n’aient pas besoin de la police pour l’être », a ajouté Mme Roy.

La Presse a révélé mercredi que la cohabitation entre enfance et itinérance se complique ces jours-ci dans les quartiers centraux de Montréal, au moment où la crise sociale s’étale au grand jour.

Le reportage fait état de tout-petits qui sont escortés par la police pour sortir du CPE. « On vit avec beaucoup de gens qui sont intoxiqués, qui sont agressifs », a relaté la directrice générale Sylvie Chabot, qui a aussi rapporté un épisode de masturbation devant des bambins. L’établissement est situé à cet endroit depuis 2018, après un important dégât d’eau dans ses locaux d’origine au palais de justice de Montréal.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, LA PRESSE

Le CPE Le Petit Palais, situé sur le rue Viger Ouest, à Montréal.

« On veut un environnement sécuritaire. Qu’on soit à Montréal, à Québec ou à Gatineau, c’est ce qu’on souhaite pour nos enfants. Dans ces conditions, la police, en termes de prévention, en termes de répression a un travail à faire, on les supporte là-dedans », a brièvement indiqué le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel.

La situation n’est pas simple ailleurs. « Mon gars a peur ! », a pour sa part confié Jessica Normandeau, qui attendait lors du passage de La Presse son fils de 5 ans devant l’école Victor-Rousselot, dans le Sud-Ouest. Cette école est située à proximité de la Maison Benoît-Labre, qui a ouvert le mois dernier un site de consommation supervisée et un centre de jour.

Manque de préparation

Le ministre Lionel Carmant a confirmé mercredi l’ajout d’un intervenant psychosocial qui assurera une surveillance à l’extérieur de l’organisme, à partir de la semaine prochaine. Dans ce cas-ci, le ministre responsable des Services sociaux déplore un manque de préparation de la Ville de Montréal.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant

Il y avait un besoin, je pense que ça aurait dû être mieux préparé, mieux travaillé. Je l’ai dit plusieurs fois, la cohabitation, ça se travaille en amont.

Lionel Carmant, ministre responsable des Services sociaux

Or, pas question de déplacer le site, selon le ministre. « On a 36 personnes qu’on vient de sortir de la rue et pour qui on a du logement », a plaidé le ministre. L’organisme offre du logement aux étages.

Lionel Carmant avait d’ailleurs livré un plaidoyer contre le « pas dans ma cour » l’automne dernier, lorsque les députées libérales, Marwah Rizqy et Élisabeth Prass, avaient relayé en Chambre les préoccupations des parents qui demandaient l’annulation de l’ouverture du site de consommation supervisée.

« On parle d’endroits où on va aider les gens à se sortir de la rue. À se sortir de la rue. Sérieux, je n’en reviens pas », avait répété le ministre, émotif, rappelant qu’il fallait « aider ces gens-là ».

Les libéraux demandaient à Québec « d’interdire l’implantation de tout site d’inhalation ou d’injection supervisée à moins de 250 m d’une école ou d’un centre de service de garde éducatif à l’enfance. »

Mercredi, M. Carmant a répété que ce sont les municipalités qui déterminent des emplacements tandis que Québec offre les services sociaux.

« C’est clair qu’il faut améliorer la cohabitation surtout pour nos enfants, et cela inclut le choix des sites que les municipalités offrent aux organismes communautaires. Nous, comme gouvernement, ce qu’on veut, c’est rehausser les services », a expliqué le ministre à son arrivée à la période des questions, à Québec.

Par ailleurs, le gouvernement pourrait décider de ne plus offrir de services dans les sites où les villes n’auront pas considéré la proximité avec les enfants, a fait valoir M. Carmant.

À Montréal, le responsable de l’urbanisme de l’administration avait confirmé en mai que la proximité avec les enfants n’était pas analysée lorsque la Ville doit approuver l’emplacement d’un refuge ou d’un autre service. « Il va falloir que ce soit pris en compte pour le prochain », a soutenu le ministre.

Avec Philippe Teisceira-Lessard