(Très-Saint-Rédempteur) « Par la fenêtre, j’ai vu des bouts de mon patio en train de s’envoler. » : des citoyens témoignent des dégâts de la première tornade à avoir frappé le Québec cette année. Très localisée, elle n’a fait aucun blessé, mais a laissé des cicatrices bien visibles dans les champs non loin de Rigaud, en Montérégie.

André Carrière nourrissait ses vaches, lundi après-midi, lorsqu’il a senti la terre trembler.

Le temps de se jeter au sol, des vents violents ont pénétré dans son étable du chemin du Petit-Brûlé, à Rigaud. « Si j’avais des fils d’araignée au plafond, il n’en est pas resté un », raconte-t-il, assis sur son balcon, encore sous le choc.

« Les animaux se sont tous garrochés dans un tas. Après 30 secondes, je me suis dit : je vais aller voir. » À l’extérieur, la situation était cauchemardesque.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

André Carrière raconte le moment où il a aperçu le tourbillon qui a soulevé le poulailler de son voisin.

Non seulement un mur de son étable avait été arraché par les bourrasques, mais le haut de son silo à grain, fait de blocs de béton, avait aussi été arraché.

Puis, il a aperçu le tourbillon. « Dans les airs, il y avait un poulailler. Les poules volaient dans les airs comme des oiseaux. »

Par miracle, la tornade qui a touché terre dans le secteur de Rigaud, en Montérégie, n’a fait aucun blessé.

L’heure était au ramassage à la ferme Carra, mardi, au passage de La Presse.

De nombreux voisins, membres de la famille et amis étaient venus prêter main-forte pour ramasser les nombreux débris qui parsèment les champs tout autour. « Avec mon frère, on a ramassé deux trailers de laine isolante puis de planches », témoigne André Carrière, assis sur son balcon.

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Amis et voisins étaient venus prêter main-forte à la ferme Carra mardi pour nettoyer les dégâts laissés par la tornade, dont les restes d’un silo en béton qui s’est partiellement envolé.

Une telle tornade, « j’ai vu ça aux États-Unis, à la télévision, mais jamais en personne », témoigne l’homme dont la famille réside dans le secteur depuis plusieurs décennies.

Le tourbillon semble avoir suivi le cours d’une petite rivière de la région avant de couper à travers champs, profitant du dénivelé quasi inexistant de ce coin de la Montérégie bordant la frontière avec l’Ontario.

« On s’est réfugiés au sous-sol »

C’est d’ailleurs beaucoup plus au sud, dans la rue Principale de la municipalité de Très-Saint-Rédempteur, que d’autres dégâts importants pouvaient être constatés, mardi.

À cet endroit, Daniel Gélinas et sa conjointe, Julia Asselstine, examinaient, incrédules, les alentours de leur demeure dont la toiture a été arrachée. L’homme s’estime chanceux d’avoir pris une pause alors qu’il télétravaillait à l’étage pour descendre se faire un café.

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La maison de Daniel Gélinas, au lendemain de la tornade

« C’est là que j’ai vu, par la fenêtre, des bouts de mon patio partir au vent, raconte-t-il. J’ai pris mon chien et on s’est réfugiés au sous-sol », raconte-t-il, au milieu des débris. « Après 30 secondes, j’ai regardé à l’extérieur et c’était déjà terminé. »

Ce qu’il reste de sa toiture : des bouts de tôle suspendue aux fils électriques, de l’autre côté de la rue. Des restes de sa terrasse parsèment son terrain, où des outils et du mobilier de jardin se mêlent aux branches d’arbre cassées.

À moins de 100 mètres à l’ouest, la maison de sa voisine est intacte, comme si rien ne s’était passé.

Jamais, de mémoire de résidants, une telle tornade n’avait touché Très-Saint-Rédempteur, relate sa mairesse, Julie Lemieux. « On a déjà eu des épisodes de rafales, d’arbres cassés et de toitures abîmées, mais à ce niveau-là, non », dit-elle.

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Julia Asselstine constate les dégâts sur sa propriété.

Six ou sept tornades par année

Se basant sur des vidéos reçues et des images diffusées en ligne, Environnement Canada a rapidement confirmé qu’une tornade avait bel et bien touché terre à Rigaud lundi. Une enquête terrain menée par des experts du Northern Tornado Project de l’Université Western, en Ontario, permettra ultimement d’en déterminer la force et la trajectoire exacte.

« En observant de quelle façon les structures ont été brisées et quelle était la résistance de ces structures, les enquêteurs peuvent déduire l’intensité de la tornade », explique la météorologue à Environnement Canada Michèle Fleury.

Chaque année, entre six et sept tornades sont observées au Québec de la mi-mai à la fin d’août, indique-t-elle. « C’est normal à ce moment-ci de l’année d’avoir des orages violents et qu’ils occasionnent des tornades. »

Maintenant, à savoir si de tels épisodes météorologiques sont appelés à se produire de plus en plus souvent, il faudra des décennies d’observation pour le confirmer, ajoute Michèle Fleury.

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Bertrand Milbradt est venu donner un coup de main à son ami André Carrière pour ramasser les débris jonchant les champs autour de la ferme Carra.

La mairesse de Très-Saint-Rédempteur, Julie Lemieux, affirme toutefois qu’elle observe de plus en plus de ces genres d’évènements météorologiques intenses.

« Plus les années passent, plus on a d’épisodes de rafales, d’orages intenses, de pluies diluviennes », explique-t-elle. Une part de plus en plus importante du budget municipal sert à réparer les dégâts causés aux routes.

Pas plus tard qu’en janvier dernier, Très-Saint-Rédempteur s’est d’ailleurs entendu avec les municipalités voisines de Pincourt et de Pointe-Fortune pour partager leurs ressources de sécurité civile en cas d’urgence.