La saison morte porte généralement mal son nom à Tampa, où les dossiers à régler sont toujours extrêmement nombreux entre la fin d’une campagne et le début d’une autre. Les prochaines semaines ne feront pas exception, et la priorité absolue porte un nom : Steven Stamkos.

Devant les journalistes locaux, mercredi matin, le directeur général du Lightning, Julien BriseBois, n’a laissé place à aucune ambiguïté. Avant même que ne lui soit posée la moindre question, il a livré une allocution d’ouverture de presque quatre minutes, au cours de laquelle il a rendu hommage aux Panthers de la Floride, tombeurs de son club en cinq matchs, dressé un bref bilan de la saison 2023-2024 et, surtout, livré un plaidoyer pour que son capitaine « fasse partie de ce groupe » l’automne prochain et encore après.

Steven Stamkos, 34 ans, a disputé l’entièreté de sa carrière de 16 saisons dans l’uniforme du Lightning. Il vient d’amasser 40 buts et 81 points en 79 matchs. Même si sa production se concentre de plus en plus en avantage numérique, il demeure au cœur des succès offensifs de l’équipe qui l’a repêché en 2008, dont il est l’incontestable leader au demeurant.

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Le directeur général du Lightning de Tampa Bay, Julien BriseBois

Voilà toutefois que le contrat de huit ans qu’il avait signé pendant l’été 2016 arrivera à échéance d’ici quelques semaines. Le fait qu’il n’ait toujours pas conclu de nouvelle entente a alimenté les discussions au cours des derniers mois. On peut présumer que le bruit ne fera qu’augmenter d’ici au 1er juillet, à moins que l’Ontarien n’appose rapidement son nom au bas d’un contrat.

En cette journée de bilan, mercredi, Stamkos lui-même a réitéré son souhait de rester à Tampa. Son entraîneur et ses coéquipiers ont avoué n’avoir jamais envisagé une vie sans lui. À ce que l’on comprend, son DG non plus.

« On a tous vu Stammer élever son jeu, a lancé BriseBois. C’est incroyable de penser que quelqu’un qui mérite déjà sa plaque du Temple de la renommée, qui a accompli tellement de choses, vienne possiblement de jouer les deux meilleurs mois de hockey de sa carrière. »

Leadership

Parallèlement à ses exploits sur la glace – 30 points à ses 20 derniers matchs en saison –, Stamkos a aussi établi de nouveaux standards sur le plan du leadership, a poursuivi le gestionnaire.

L’été dernier, a-t-il rappelé, « pour différentes raisons, beaucoup de leaders ont quitté notre équipe ». Il ne les a pas nommés, alors faisons-le pour lui : Alex Killorn, Corey Perry, Pat Maroon et Zach Bogosian, tous des artisans de l’une ou l’autre des trois présences consécutives du Lightning en finale de la Coupe Stanley de 2020 à 2022.

Dans ce contexte, « personne » n’a autant « rempli ce vide » que Stamkos, a encore dit BriseBois.

Nous répétons souvent, au sein de l’organisation, que nous visons l’excellence avec humilité. [Stamkos] l’a toujours fait, mais jamais autant qu’au cours des derniers mois.

Julien BriseBois, directeur général du Lightning de Tampa Bay

BriseBois a indiqué avoir brièvement discuté avec Stamkos et son agent du calendrier des prochaines semaines, afin de déterminer à quel moment des discussions formelles pourraient s’amorcer. Malgré l’enthousiasme des deux parties, on comprendra que la direction compose avec des impératifs financiers qui ne concorderont peut-être pas avec les demandes du capitaine.

Aidé par un plafond salarial en hausse, le Lightning n’est pas pris à la gorge comme il l’était à pareille date l’an dernier. Mais ce n’est pas l’abondance non plus : le site spécialisé CapFriendly calcule qu’avec 16 joueurs sous contrat, le DG dispose de 12,6 millions pour compléter sa formation en vue de 2024-2025.

C’est ce qu’il a en tête lorsqu’il parle du « casse-tête » dont il doit encore mettre les pièces en place. « Rien n’est exclu », pas même la possibilité de se soulager d’un contrat onéreux pour se donner de la marge de manœuvre. Dans tous les cas, il doit encore amasser « le plus d’informations possible » avant de présenter une offre à Stamkos.

A-t-il confiance d’en arriver à temps à une entente ? « J’ai bon espoir », a-t-il répondu avec aplomb.

« Compétitifs »

Si le dossier Stamkos est si délicat, c’est notamment parce que le Lightning, malgré un noyau vieillissant, n’est pas arrivé au bout de son succès. En tout cas pas selon Julien BriseBois.

En 2023-2024, son club a amassé 98 points au classement, au 13rang de la LNH, un copier-coller de la saison précédente. Et ce, en dépit du fait que le gardien Andrei Vasilevskiy, opéré au dos, a raté les deux premiers mois du calendrier et que Mikhail Sergachev a été limité à 34 matchs. Le défenseur, meneur de son équipe au chapitre du temps de glace la saison précédente, a subi des fractures du tibia et du péroné qui ont nécessité une longue rééducation.

Dans les circonstances, le regard que le DG pose sur ses troupes n’est pas sombre, au contraire.

« À l’interne, nous croyons que nous allons rester compétitifs », assure-t-il. Tant que ce sera le cas, selon lui, il demeure possible que « les étoiles s’alignent » et que le groupe en place connaisse au moins un autre long parcours en séries éliminatoires.

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Mikhail Sergachev

Des brèches devront toutefois être colmatées, principalement sur le plan défensif. L’attaque et les unités spéciales ont été parmi les meilleures de la ligue. Or, en l’espace de deux ans, le nombre de buts accordés par match a considérablement augmenté, passant de 2,78 à 3,07 et à 3,26 de 2021-2022 à 2023-2024.

Spontanément, on regardera du côté des gardiens pour expliquer ce phénomène. Les adjoints Jonas Johansson et Matt Tomkins, surtout, n’ont pas été très convaincants, et Vasilevskiy, malgré une fiche positive de 30-20-2, a présenté les pires statistiques de sa carrière sur le plan individuel. Son patron a nuancé ce rendement en rappelant qu’il avait raté le camp d’entraînement et qu’au moment où il a renoué avec l’action, à la fin du mois de novembre, le niveau de jeu dans la ligue était déjà élevé.

Les lacunes étaient toutefois palpables devant les hommes masqués. À l’évidence, cette équipe n’est plus la puissance défensive qu’elle était lorsqu’elle a remporté la Coupe Stanley deux fois de suite, en 2020 et en 2021. Des joueurs comme Ryan McDonagh, Yanni Gourde, Ondrej Palat ou Alex Killorn n’ont pas été remplacés par des joueurs équivalents. Du moins, pas encore.

La présence de Sergachev à temps plein, la saison prochaine, aidera, a prédit Julien BriseBois. Mais d’une manière ou d’une autre, « il faudra faire du meilleur travail pour garder la rondelle hors de notre but, surtout à cinq contre cinq », a-t-il résumé.

L’optimisme demeure donc au rendez-vous, pour peu que les pièces du fameux casse-tête tombent en place, mais pas que.

Le Lightning a vu les Panthers jouer de manière « formidable », lors de la série entre les deux clubs, en démontrant notamment une capacité supérieure à « capitaliser » sur les occasions qui se présentaient à eux.

Pour gagner, une équipe a besoin « de bons joueurs et d’un peu de chance », a philosophé le DG.

Le talent et l’expérience ne manquent pas lorsqu’une formation compte sur Nikita Kucherov, Brayden Point, Steven Stamkos, Brandon Hagel, Victor Hedman, Mikhail Sergachev, Andrei Vasilevskiy… Il faudra toutefois que ceux-ci retrouvent un peu de la magie qui les animait il n’y a pas si longtemps.

Sans quoi, surtout si Stamkos devait partir, on assistera au lent déclin de ce qui a momentanément ressemblé à une dynastie.