Le nouveau budget fédéral soutient plusieurs secteurs et festivals du milieu culturel, mais de manière temporaire, déplorent l’Union des artistes (UDA), le Regroupement des évènements majeurs internationaux (REMI), Festivals et évènements majeurs Canada (FAME) ou encore le Conseil québécois du théâtre (CQT).

Quelques mesures avaient déjà été annoncées il y a quelques mois, comme les 100 millions sur deux ans octroyés à Téléfilm Canada à compter de 2024-2025. Un soutien important qui devrait permettre à l’industrie canadienne de financer de 40 à 60 productions annuellement.

« C’est sûr que cette aide accordée à Téléfilm Canada donne de l’oxygène à une industrie qui vit une période particulièrement difficile en raison de la présence très forte des géants de la diffusion en continu, nous dit la présidente de l’UDA, Tania Kontoyanni. Mais si ce n’est pas récurrent, ce sera une mauvaise nouvelle dans deux ans… »

Autre mesure annoncée d’avance, en marge de la cérémonie des prix Juno : l’injection de 32 millions sur deux ans, à compter de 2024-2025, au Fonds de la musique du Canada. Une mesure qui réjouit particulièrement les membres de l’Association professionnelle des diffuseurs de spectacles RIDEAU.

PHOTO PATRICK DOYLE, REUTERS

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, présentant son budget mardi à la Chambre des communes

Le gouvernement annonce par ailleurs une aide additionnelle de 31 millions sur deux ans (15,5 millions par année) pour « nourrir le dynamisme des festivals et des arts de la scène ».

Cette somme s’ajoute aux 32,5 millions d’aide fixe annuelle que se partagent plus de 600 festivals, mais aussi des diffuseurs et des programmateurs (pour un total de 48 millions annuellement). Le REMI demandait plutôt une somme annuelle de 61,5 millions.

Il s’agit d’une aide octroyée au Fonds du Canada pour la présentation des arts (FCPA), attendue par le milieu des festivals. On mentionne notamment la Tohu pour soutenir le Festival Montréal Complètement cirque (MCC), le Festival TransAmériques (FTA) de danse et de théâtre ou encore le Vancouver Fringe Festival (VFF).

Deux évènements importants reçoivent des aides additionnelles importantes. Le Festival international du film de Toronto (TIFF) obtiendra à lui seul 23 millions sur trois ans à compter de 2024-2025, tandis que le Shaw Festival Theatre de Niagara-on-the-Lake, en Ontario, recevra 15 millions en 2024-2025. Ce financement permettra notamment d’appuyer sa campagne All. Together. Now.

« Il va falloir se battre à nouveau »

Dans un communiqué publié mardi soir, le REMI et le FAME se sont dits « partiellement soulagés » de cette annonce, mais déplorent le fait que cette somme ne soit toujours pas intégrée à la base budgétaire du FCPA.

« En agissant de la sorte, le gouvernement fédéral condamne le milieu culturel à être en perpétuelle représentation pour renouveler des sommes, année après année », écrit Martin Roy, qui dirige les deux organismes et qui s’attendait à recevoir près de 14 millions de plus annuellement.

« Nous comprenons encore moins cette décision dans la mesure où la ministre du Patrimoine canadien [Pascale St-Onge] a reconnu dans une lettre que l’incertitude liée au renouvellement de fonds temporaires […] ajoute aux énormes pressions financières que subit le secteur en raison de la hausse des coûts liée à l’inflation et à la pénurie de la main-d’œuvre », ajoute Martin Roy.

Même son de cloche du côté de RIDEAU, qui accueille positivement les nouveaux fonds attribués au Fonds du Canada pour la présentation des arts, mais qui regrette de ne pas voir cette somme intégrée à la base budgétaire du gouvernement. « Encore une fois, on n’en a que pour deux ans, nous dit la directrice générale de RIDEAU, Julie-Anne Richard. Après, il va falloir se battre à nouveau… »

À noter, deux institutions majeures du pays reçoivent un coup de pouce d’Ottawa : CBC/Radio-Canada recevra une enveloppe de 42 millions en 2024-2025 pour financer ses émissions d’actualité et de divertissement, tandis que le Centre national des arts d’Ottawa (CNA) recevra 45 millions sur trois ans à compter de 2025-2026.

Mais l’éléphant dans la pièce – et le grand absent du budget – est le financement du Conseil des arts du Canada (CAC), qui soutient à peu près toutes les disciplines artistiques, des arts vivants aux arts visuels en passant par les projets audiovisuels. Le budget du CAC doit diminuer de près de 21 millions au cours des trois prochaines années, a fait savoir sa directrice générale dans une lettre envoyée à la communauté artistique au mois de février dernier.

« On est content pour le FTA et pour tous les festivals, nous dit la coprésidente du CQT, Michelle Parent, mais avec les coupes qui avaient déjà été annoncées au Conseil des arts du Canada, on n’a pas l’impression d’avoir été entendus. On est quand même dans une conjoncture où il y a un recul avec tous les Conseils des arts, même au Québec. »

PHOTO FOURNIE PAR L’UDA

La présidente de l’Union des artistes du Québec, Tania Kontoyanni

Ça va prendre des solutions pérennes. Pour le moment, on met des pansements sur des blessures qui commencent à être profondes. Donc, il faut continuer à discuter avec le gouvernement pour qu’il mette de l’argent neuf dans notre industrie parce qu’il fuit, cet argent…

Tania Kontoyanni, présidente de l’Union des artistes du Québec

Parmi les autres mesures trouvées dans le budget de la ministre des Finances, Chrystia Freeland, notons que les chaînes câblées comme la chaîne des affaires publiques (CPAC), le Réseau de télévision des peuples autochtones (APTN), Accessible Media Inc. (AMI), Ici Télévision et TV5 recevront 15 millions sur deux ans à compter de 2024-2025. Le journalisme local obtient une aide de 58,8 millions sur trois ans à compter de 2024-2025. Et l’industrie canadienne du livre, 10 millions sur trois ans.

Dernier élément : le gouvernement Trudeau veut s’assurer que les prix des billets de concerts et d’évènements sportifs soient équitables et accessibles.

Même si le ministre québécois responsable de la Protection des consommateurs, Simon Jolin-Barrette, a déjà mandaté la députée Kariane Bourassa pour trouver des solutions à la revente de billets à prix astronomiques, le fédéral annonce qu’il « collaborera avec les provinces pour qu’elles adoptent des exigences en matière de pratiques exemplaires pour la vente de billets ».

Le gouvernement fédéral réitère ainsi l’importance du Bureau de la concurrence et de sa Loi sur la concurrence afin d’assurer la transparence des transactions, la protection des consommateurs contre les frais imprévus ou excessifs, le remboursement des sommes engagées en cas d’annulation ou encore la mise à l’amende des revendeurs.

Précision : Dans une version précédente de ce texte, nous écrivions que le ministère de la Culture et des Communications du Québec avait mandaté la députée Kariane Bourassa pour trouver des solutions à la revente des billets. Or, c'est plutôt le ministre québécois responsable de la Protection des consommateurs, Simon Jolin-Barrette, qui a mandaté la députée Bourassa. Nos excuses.