(New York) Debout sur le pont d’un traversier, les cheveux au vent, le regard tourné vers le large, le monde nous appartient. Non, nous ne sommes pas dans le Sud, encore moins en Méditerranée. Mais beaucoup plus près, à New York, pour une virée inédite de ses nombreuses îles aux mille merveilles.

On craque pour cette ville qui ne dort effectivement jamais, avec ses innombrables gratte-ciel et son énergie à revendre. Mais il peut être bon, parfois, de s’en éloigner un brin, pour souffler un peu, et l’apprécier de loin. En ce sens, Governors Island, accessible par bateau seulement, est une véritable petite oasis. Coup de cœur pour une île au riche passé longtemps abandonnée… qui renaît.

On croit rêver. Fraîchement embarqué sur le traversier, on a un peu l’impression de fuir la ville, et c’est effectivement ce qu’on fait. Après avoir passé quelques longues journées dans la foule, au son de tous ces klaxons, qu’il est bon de prendre la direction de l’île la plus cool de New York, selon le Time Out (après Manhattan, évidemment !).

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Governors Island est accessible uniquement par bateau.

Pour cause : sur cet îlot sans auto d’à peine 172 acres, qu’on rejoint en une dizaine de minutes et dont on fait le tour en quelques heures, se trouvent quantité de bâtiments historiques uniques (pour la plupart abandonnés), des fortifications, même des canons. Un monde figé dans le temps, franchement surprenant. Ce n’est pas pour rien que Governors Island a longtemps eu la réputation d’être hantée…

  • Une oasis à 10 minutes de Manhattan

    PHOTO SILVIA GALIPEAU, LA PRESSE

    Une oasis à 10 minutes de Manhattan

  • Cette île au riche passé a longtemps été abandonnée.

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    Cette île au riche passé a longtemps été abandonnée.

  • Vue sur Manhattan

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    Vue sur Manhattan

  • Quelques comptoirs de cuisine de rue, ici et là

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    Quelques comptoirs de cuisine de rue, ici et là

  • Une glissade de près de 20 mètres

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    Une glissade de près de 20 mètres

  • The Yard, pour enfants uniquement, interdit aux parents

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    The Yard, pour enfants uniquement, interdit aux parents

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Puis, ici et là, des manifestations de renaissance, triées sur le volet. On les découvre pas à pas, dans un décor enchanteur couvert de collines, de plantes et d’oiseaux. Les cerisiers étaient même en fleurs lors de notre passage, à la fin du mois d’avril. Imaginez le bonheur (et l’odeur) ! Soulignons aussi quelques camions de cuisine de rue (mention spéciale aux savoureux tacos de Taco Vista, avec vue à couper le souffle sur le pont de Brooklyn), une ferme urbaine, de l’art public, et même un verger. En saison : des moutons. Ah oui, et une glissade de près de 20 mètres, au détour d’un chemin, même un espace de jeu libre (The Yard) pour les enfants, sorte de caverne d’Ali Baba extérieure, interdite aux parents.

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Sur cet îlot, on trouve de nombreux bâtiments historiques.

« C’est mon lieu préféré à New York ! J’y viens au moins 10 fois par année ! », nous confiera Jami Whitney, confortablement installée dans un hamac, planté dans un parc fleuri isolé, à faire la sieste et à jouir de sa sainte paix. Dur de la contredire.

Un peu d’histoire

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On a même pensé à accrocher quelques hamacs.

Mais où diable sommes-nous ?, vous demandez-vous. Secret relativement bien gardé, cette « île des gouverneurs » n’est ouverte au public et toute l’année que depuis 2021. Son nom remonte aussi à l’époque coloniale (littéralement : l’île pour les gouverneurs de Sa Majesté). La légende veut même que sous une maison (Governor’s House, la maison du gouverneur britannique, située à quelques pas du débarcadère du traversier) se trouve un tunnel la reliant directement au continent, en cas d’invasion ! Impossible de confirmer, malheureusement, elle est barricadée, comme tant d’autres ici…

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Plus de trois kilomètres de promenade

Il faut dire qu’après les Anglais, les Américains ont effectivement fini par s’emparer de ce petit bout d’île, qui ne faisait à l’époque que 70 acres. Ils y ont construit deux forts (Fort Jay et Castle Williams, toujours debout, le second ouvert au public en saison) qui ont aussi servi de prison pour les soldats confédérés pendant la guerre de Sécession. Pendant plus de 200 ans, l’île servira de camp de base pour l’armée américaine, puis sera confiée aux garde-côtes, sans oublier leurs familles. À noter que l’île sera aussi agrandie avec les années. Pour la petite histoire, sachez que c’est la terre excavée pour la construction du métro de l'avenue Lexington à Manhattan (leur « ligne verte » à eux !) qui a permis d’ajouter 100 acres à l’île.

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La fameuse Governor’s House

Tout cela pour dire que malgré ses airs de cité abandonnée, des milliers de gens ont effectivement vécu ici, dans Governors Island, comme en témoignent encore les allées majestueuses, les rangées de maisons somptueuses et les arbres centenaires, qu’on découvre à peine le pied posé sur terre. Or, quelque part dans les années 1990, et pour des raisons financières, tout ce beau monde a été relogé, et l’île, vidée.

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Un magnifique parc entouré de maisons abandonnées

Heureusement, et avec le nouveau millénaire, l’armée a finalement cédé Governors Island à New York et à ses New-Yorkais, pour une somme symbolique (un dollar !). Une condition : ne pas y faire de lotissement immobilier.

Beaucoup de projets

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L’île a aussi une vocation artistique.

C’est en 2005 que l’île a été ouverte au public pour la toute première fois, mais l’été seulement. Depuis, la Ville s’est engagée à la revitaliser pour en faire un parc naturel, un espace d’art public, ainsi qu’un laboratoire de développement durable. Rapidement, plus de trois kilomètres de sentiers ont été dessinés, une bucolique promenade le long de l’eau a été construite, et de vastes espaces publics ont été réalisés (terrains de soccer, espaces de pique-nique, structures de jeu, etc.).

Les deux premiers locataires de l’île ont été une école (Urban Assembly New York Harbour School) et un centre d’art, lesquels ont rapidement investi deux immeubles laissés à l’abandon. Les premiers se sont engagés à repeupler la baie de récifs d’huîtres (Billion Oyster Project), les seconds proposent des résidences d’artistes et plusieurs espaces d’exposition.

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Plusieurs parcs et terrains font le bonheur des enfants.

En matière de développements récents, mentionnons cette offre inédite en matière de glamping (signée : Collective Retreats), pour les chanceux qui auront les moyens de se payer ici une « tente » (à partir de 217 $ US pour deux, un chiffre appelé à facilement tripler selon les dates), avec vue imprenable sur la ville. On vous met d’ailleurs au défi de ne pas rapporter d’ici les plus beaux clichés du One World Trade Center, qu’on voit de partout, et qu’on a rarement vu aussi majestueux.

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Le spa Qc Ny offre une expérience avec vue.

Parlant de cliché, un nouveau spa (signé QC terme, directement venu d’Italie, dont c’est ici la première installation en Amérique), installé dans une énième demeure historique, propose en outre une très chic expérience : piscines chaudes extérieures (quoique aucun bain froid, hérésie !), douches thérapeutiques et saunas, coucher de soleil de feu sur le fameux skyline new-yorkais inclus.

Pas de doute, lentement mais sûrement, cette petite île est en train de renaître. C’est sans parler de cette dernière et non des moindres nouveautés : un projet de construction d’un laboratoire sur les changements climatiques, en collaboration avec la Stony Brook University, évalué à 700 millions US selon le New York Times. Objectif : amener ici des chercheurs, des scientifiques et des politiciens à réfléchir ensemble à des solutions constructives et durables. Des immeubles vacants seront réutilisés à ces fins, dit-on, et diverses constructions sont aussi dans les plans. Les travaux doivent commencer l’an prochain, pour une ouverture prévue en 2028.

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Cette petite île abandonnée risque de l’être de moins en moins avec les années…

Conseil d’amie : ne tardez pas à venir profiter de son charme encore discret et de ses grands espaces inexploités, notre petit doigt nous dit que cette petite île abandonnée risque de l’être de moins en moins avec les années…

Une partie des frais de ce voyage a été payée par l’Office de tourisme de New York, qui n’a exercé aucun droit de regard sur le contenu de ce reportage.

Consultez le site de Governors Island (en anglais)

S’y rendre

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Un traversier se rend toutes les 30 minutes à Governors Island.

  • Traversier toutes 30 minutes à partir du Battery Maritime Building, très beau bâtiment de style Beaux-Arts, à la pointe sud de Manhattan (passé le terminal pour Staten Island)
  • 5 $ US par adulte (gratuit pour les 65 ans et plus et les enfants de 12 ans et moins), gratuit tous les week-ends avant 11 h
  • Vélos, trottinettes et autres véhicules à roulettes bienvenus
  • En saison, traversier offert de Brooklyn également

Quoi manger

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Mention spéciale aux tacos de chez Taco Vista

Si l’on peut passer une journée ici sans dépenser un sou, en apportant un pique-nique, par exemple, et en y flânant longuement, il est aussi possible de s’y gâter grassement. Plusieurs camions de rue, même un chic beach club, proposent apéros, bouchées ou repas complets.

En fleurs ou pas

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Les cerisiers en fleurs à New York

Pas de doute, le printemps est une saison magnifique pour visiter New York, pour une touche de couleur et de parfum inégalée. Cerisiers, lilas, magnolias, vous voulez connaître l’état de la floraison ? Consultez le New York Blooms Report, drôlement bien pensé. Au moment d’écrire ces lignes, tout était en fleurs au Jardin botanique de Brooklyn, notamment, et ce, jusqu’à la mi-mai.

Consultez la page du New York Blooms Report (en anglais)