Mary-Sophie Harvey ne nagera pas le 100 m papillon aux Jeux olympiques de Paris. Après quelques semaines de réflexion, l’athlète montréalaise a décidé de passer son tour à cette épreuve pour laquelle elle s’était qualifiée aux Essais de Toronto, le mois dernier.

« C’est sûr que c’est un choix déchirant », a acquiescé Harvey quatre jours après avoir fait connaître sa décision à Natation Canada, le 10 juin.

« J’ai travaillé de façon acharnée pour avoir ma place dans l’équipe. J’aurais aimé nager toutes les nages pour lesquelles je me suis classée et je pense que je le méritais. En même temps, c’est une décision qui avait du sens. »

En écartant le 100 m papillon, dont les préliminaires et les demi-finales sont programmés le premier jour de la compétition olympique, le 27 juillet, Harvey veut consacrer toute son attention au relais 4 X 100 m libre, présenté le même jour.

« Ça aurait fait quatre courses durant la première journée. Autant j’aimerais beaucoup faire le 100 m papillon, autant on a de bonnes chances de médaille au 4 X 100 m libre. »

C’était vraiment important pour moi d’être là pour l’équipe et d’être dans les meilleures conditions possibles pour performer en finale du relais.

Mary-Sophie Harvey

L’unique représentante québécoise de l’équipe féminine souhaite également préserver ses énergies pour le 200 m libre, dont les séries seront disputées le lendemain.

« Ça donnait quatre courses avant ma nage individuelle sur laquelle on se concentre plus que sur le 100 m papillon, pour l’instant. Avec possiblement plein d’émotions si on gagne une médaille, retourner dans l’eau le lendemain pour ma course, ça allait faire beaucoup. On s’est dit : on va se concentrer sur une. »

Plus de chances au 200 m libre

Le 100 m papillon est arrivé un peu comme une surprise dans le parcours olympique de la nageuse de 25 ans. L’annonce de son inscription a coïncidé avec le départ à Québec de sa partenaire d’entraînement, Katerine Savard. La spécialiste du 100 m papillon visait une quatrième sélection olympique inédite à cette épreuve. La médaillée de 2016 au relais a finalement terminé cinquième.

À la première journée des Essais, Harvey a assuré sa place en se classant deuxième derrière la championne olympique Maggie Mac Neil. « Initialement, il y avait deux objectifs : s’enlever du stress pour la semaine en se qualifiant tout de suite et avoir une chance de nager le relais quatre nages », a rappelé lundi son entraîneur à CAMO, Greg Arkhurst.

PHOTO FRANK GUNN, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Maggie Mac Neil et Mary-Sophie Harvey aux Essais olympiques de natation à Toronto

Le chrono de Harvey – un gros sommet personnel de 57,31 secondes – lui permettait d’envisager une participation à la demi-finale olympique. Faire partie des huit finalistes s’annonçait beaucoup plus complexe, encore plus au vu des résultats des Essais américains d’Indianapolis, où Gretchen Walsh a réalisé un record mondial de 55,18 secondes samedi. Deux autres Américaines sont passées sous la barre des 56 secondes.

« La vérité est qu’elle a vachement plus de chances d’être parmi les huit premières, voire mieux, au 200 m libre », a ajouté Arkhurst.

Au relais 4 X 100 m, l’entraîneur de CAMO considère les Canadiennes comme de « vraies underdogs » pour un podium. « On est peut-être l’équipe qui a plus de place pour s’améliorer par rapport à l’addition des temps. […] Médaille ou pas, ça reste une finale olympique, il y aura une grosse charge émotionnelle. Est-ce qu’on a besoin d’en rajouter ? En termes de gestion, c’est peut-être le meilleur choix. »

« En paix avec ma décision »

Même en laissant tomber une épreuve, la semaine parisienne de la native de Trois-Rivières sera remplie avec trois autres relais potentiels (4 X 100 quatre nages, 4 X 100 mixte et 4 X 200). Elle veut être à la hauteur, comme ce fut le cas aux Jeux panaméricains l’automne dernier.

« J’ai eu des discussions avec Natation Canada et ils aimeraient que je fasse également une bonne partie des relais en préliminaires pour aider les plus jeunes à se détendre et à s’enlever du stress », a noté Harvey, limitée aux séries du 4 X 200 m à Tokyo (4e). « C’est important d’avoir une vétérane. Ça me fait plaisir de jouer ce rôle et ça va aussi faire en sorte que j’aurai beaucoup d’épreuves ! »

Le retrait de Harvey permettra à l’Albertaine Rebecca Smith, troisième à Toronto avec le standard de qualification, de prendre le départ du 100 m papillon dans la Ville Lumière.

Comme pour le 400 m QNI, où elle avait déclaré forfait aux Essais, Mary-Sophie Harvey ne met pas le papillon de côté. Sa place est déjà réservée sur la distance aux Championnats du monde en petit bassin de Budapest en décembre.

« J’ai eu tout l’appui nécessaire de Greg et de Natation Canada. Je suis vraiment en paix avec ma décision. »

La nageuse, son entraîneur et quelques équipiers sont partis pour l’Europe lundi. Premier arrêt : Rome, où ils disputeront le Trophée des Sept Collines, de vendredi à dimanche. Au programme pour Harvey : 100 m, 200 m et 400 m libre ainsi que… le 100 m papillon. Penny Oleksiak se joindra à eux avec l’intention de décrocher son billet olympique individuel au 100 m libre. Jeremy Bagshaw, qualifié pour ses premiers JO à son cinquième essai à l’âge de 32 ans, sera également de la partie.

La petite troupe poursuivra ensuite sa préparation en Espagne avant le stage final de l’équipe canadienne à Caen, à partir du 13 juillet.

Lost in Translation

Greg Arkhurst a été surpris d’entendre le directeur haute performance John Atkinson lui annoncer le lieu de ce regroupement final. Avec son accent britannique, « Caen » s’est transformé en « Cannes »… « Cannes en juillet, tu es sûr, c’est chaud, quand même, ça sort, il y a des partys », l’a prévenu l’entraîneur avant de comprendre qu’Atkinson parlait plutôt de la ville de Normandie. Le Canada avait fait de Caen son camp de base avant les Jeux du Commonwealth de 2022.