Jean-Sébastien Giguère se souvient très bien du moment où il a mis la main sur le trophée Conn-Smythe quelques instants après la défaite de son club en finale.

« Avant les poignées de main, un gars de la Ligue nationale est venu me voir pour me dire de rester sur la glace, se souvient-il. Tous les gars de mon équipe sont rentrés au vestiaire pendant que moi, je devais attendre tout seul tout en voyant les Devils célébrer… À ce moment-là, c’est pas le trophée que tu veux. »

Le trophée « que tu veux », c’est bien sûr la grosse coupe argentée, que Giguère finira tout de même par gagner quatre ans plus tard avec ces mêmes Ducks d’Anaheim. Mais pas cette fois-là, car cette fois-là, au terme de la finale de 2003, l’ex-gardien s’est senti plutôt seul.

« En plus, on a perdu le dernier match sur la glace des Devils, ajoute-t-il. Alors quand je suis allé chercher le Conn-Smythe, les gens se sont mis à me huer… J’ai pris le trophée, je l’ai déposé sur une table dans le vestiaire, à côté des bâtons, et je l’ai laissé là. Je ne sais pas trop ce qui est arrivé avec par la suite. »

Les gars de l’équipe, je sais même pas s’ils l’ont vu [le trophée]… Ça a dû prendre environ 30 minutes avant qu’un coéquipier vienne me féliciter !

Jean-Sébastien Giguère

Avec autant de souvenirs en tête, Giguère est pleinement en mesure de comprendre ce que Connor McDavid pourrait vivre si jamais ses Oilers et lui ne parviennent pas à remonter cet écart de 2-3 dans la présente finale face aux Panthers de la Floride.

McDavid, grand favori

Avec ses 42 points depuis le début des séries, l’attaquant vedette des Oilers, gagne ou perd, est maintenant le grand favori pour obtenir le Conn-Smythe, remis au joueur le plus utile des séries. Mais Giguère présume que McDavid aimerait mieux repartir avec cet honneur dans une ambiance plus festive, par exemple pendant que ses coéquipiers s’amusent à soulever la Coupe Stanley à ses côtés.

PHOTO JIM RASSOL, USA TODAY SPORTS

Connor McDavid

« Il y a personne qui joue au hockey dans la rue plus jeune en s’imaginant gagner le Conn-Smythe… on s’imagine tous en train de gagner la Coupe Stanley ! Alors, gagner ce trophée-là après deux mois à disputer des matchs en séries, alors que tu t’es battu pour te rendre là, mais que tu as perdu en finale, c’est un drôle de feeling. Je n’allais pas entrer avec ce trophée-là dans le vestiaire en disant aux gars : “Regardez ce que je viens de gagner !” »

Le récit de Giguère demeure tout de même assez unique dans le grand livre de la LNH. Depuis la création de ce prix en 1965, seulement cinq membres d’une équipe perdante l’ont remporté, dont quatre gardiens, notamment le Québécois des Ducks. Sinon, un seul joueur d’un club perdant l’a obtenu, soit l’attaquant Reggie Leach des Flyers de Philadelphie, qui a été sacré le meilleur des séries de 1976 malgré une défaite de son club en finale et en seulement quatre matchs face au Canadien des grosses années.

C’est donc ce genre d’exploit peut-être pas si enviable qui guette McDavid si ses Oilers et lui ne sont pas capables de réussir le miracle de remporter cette finale après un retard de 0-3. Le sixième match sera présenté vendredi soir à Edmonton.

C’est quand même un bel honneur, et plus de 20 ans plus tard, je suis enfin en mesure de mieux l’apprécier.

Jean-Sébastien Giguère

« C’est un trophée important pour la Ligue nationale, d’ajouter Giguère.. Quand on le gagne, la Ligue nous envoie une réplique, et elle est bien en évidence ici chez moi, à côté de ma petite Coupe Stanley. Mais il n’y a pas une journée où je ne l’échangerais pas pour une autre Coupe Stanley à la place ! »

Il se trouve aussi que le gagnant du Conn-Smythe obtient plus tard le privilège de pouvoir passer une journée avec ce trophée. Ce que Jean-Sébastien Giguère a pu faire la journée de son mariage, à Halifax. « On est allés chercher le trophée à l’aéroport, se rappelle-t-il, et ensuite, les invités se faisaient prendre en photo avec. Les gens ont pas mal aimé ça ! »