Avec le déménagement des pauvres Coyotes à Salt Lake City, la Ligue nationale semble redécouvrir le charme des petites villes. Small is beautiful.

Pendant des décennies, les grandes ligues sportives ont installé leurs équipes dans les grands marchés, pour attirer spectateurs et commanditaires, sans oublier les téléspectateurs, qui assurent des contrats de télédiffusion lucratifs.

Mais depuis peu, les ligues ont découvert le charme des petits marchés. Des équipes se sont installées à Oklahoma City, Las Vegas et Winnipeg, en quête d’incitations financières, d’arénas et de stades neufs, et de partisans plus dévoués.

En avril, la LNH a approuvé la vente des Coyotes de l’Arizona – pour 1,2 milliard de dollars – au milliardaire techno Ryan Smith et à sa femme Ashley. L’équipe, qui sera rebaptisée, disputera la saison 2024-2025 au Delta Center de Salt Lake City, l’aréna du Jazz de l’Utah, de la NBA, qui appartient aussi aux Smith.

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Ashley et Ryan Smith sont les propriétaires de la nouvelle équipe de hockey de l’Utah.

À première vue, la LNH semble perdre au change. La région de Salt Lake City est deux fois moins étendue que celle de Phoenix ; en population, Salt Lake City est le 29marché, Phoenix le 11e. L’Utah n’a jamais accueilli d’équipe de la LNH. Or, la décision de la Ligue est surtout liée à la démographie de Salt Lake City. Tout comme Phoenix, Salt Lake City est en très forte croissance. Sauf qu’en Utah, le secteur techno est en plein essor et attire de jeunes travailleurs à l’aise financièrement.

« Les gens ne viennent pas en Utah pour prendre leur retraite, explique Ryan Smith. Devant deux États en forte croissance, on choisit toujours le plus jeune pour assurer la prospérité future. »

Faire plus d’argent avec moins de spectateurs

Depuis des années, les ligues ajustent la taille de leurs opérations pour tirer plus de profits de moins de partisans. Les Mets de New York, comme d’autres équipes de baseball, ont construit un stade plus petit avec des loges plus exclusives. Le Citi Field, inauguré en 2009, ne compte que 42 000 places, 13 000 de moins que l’ancien stade Shea. Un stade plus petit est plus facile à remplir – à la télévision, les sièges vides sautent aux yeux – et on peut miser sur des concessions plus haut de gamme et installer plus de rangées de fauteuils de luxe.

Normalement, déménager requiert des années de préparation. Mais selon le commissaire Gary Bettman, la LNH a dû agir vite, les Coyotes ayant besoin de propriétaires stables et d’un stade des ligues majeures. L’équipe était impopulaire et ses finances étaient si désastreuses qu’en 2009, la LNH a dû reprendre la concession en main. Arrivés de Winnipeg en 1996, les Coyotes ont été les membres itinérants de la ligue, jouant dans divers endroits, y compris, l’an dernier, dans un aréna universitaire de 5000 places.

Mais Salt Lake City semble s’enthousiasmer pour sa nouvelle équipe, qui a déjà encaissé des acomptes pour 30 000 billets (l’aréna compte 16 200 places en configuration hockey). Près de 65 % des amateurs inscrits n’avaient pas assisté à un match du Jazz depuis 2021, dit M. Smith. Alors que les Coyotes étaient éclipsés par les équipes de la NFL, de la NBA et de la MLB à Phoenix, la nouvelle équipe de hockey se fait déjà remarquer à Salt Lake City, où elle rivalisera avec le Jazz et deux équipes de soccer.

« Même si le marché est plus petit, il peut y avoir plus d’innovation, surtout que l’équipe est nouvelle, elle pourra surfer sur un certain engouement », analyse l’avocat Frank Hawkins, qui a longtemps représenté la NFL avant d’être consultant en médias. « En plus, ils quittent un marché à quatre équipes où la clientèle cible était des snowbirds dont la plupart ne venaient pas de régions où on aime le hockey. »

La NHL n’a pas exclu de retourner à Phoenix. Bettman s’est échiné des années durant à y maintenir une équipe ; la LNH estime que ce marché serait viable avec le bon propriétaire et le bon aréna.

Ce n’est qu’un au revoir ?

Alex Meruelo, propriétaire des Coyotes, conserve la propriété intellectuelle de l’équipe, y compris ses logos et ses archives. Il peut relancer les Coyotes et réintégrer la LNH s’il trouve un lieu adéquat et paie des droits d’expansion de 1 million de dollars – ce qu’il a reçu pour céder l’équipe à l’Utah.

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Alex Meruelo a cinq ans pour relancer les Coyotes et réintégrer la LNH s’il trouve un lieu adéquat et paie des droits d’expansion de 1 million de dollars.

La Ligue a aussi envisagé d’autres marchés, y compris, semble-t-il, Atlanta – qui a accueilli deux fois une équipe de la LNH – et Houston, qui avait une équipe dans l’ancienne World Hockey Association.

Pour l’instant, la Ligue se concentre sur l’Utah, où les Smith n’ont que quelques mois pour vendre des billets et préparer la première saison de leur équipe.

Peut-être que les partisans « verront ça comme une chance de se lancer avec [l’équipe] dès le début, avec leur famille, et de dire : “On embarque” », conclut M. Smith.

Cet article a été publié dans le New York Times.

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