(Sunrise) Au hockey, c’est bien connu, on ne touche pas à la coupe avant de l’avoir gagnée. Mais il appert aussi qu’il ne faut pas non plus la regarder.

Samedi soir à Sunrise, le plus célèbre de tous les trophées est apparu sur la glace, avant la première mise en jeu de cette finale. Bien installés sur la ligue bleue en attendant que le match commence, Aleksander Barkov et Gustav Forsling ont tenté de ne pas tourner la tête en direction du bol de lord Stanley.

« J’ai essayé de ne pas trop la regarder, a raconté Forsling dimanche midi au centre d’entraînement des Panthers. Je voulais seulement me concentrer sur le jeu… »

Son collègue Barkov, assis à sa droite, a discrètement opiné du bonnet. « Même chose ici », a-t-il lancé.

Les Panthers de la Floride en sont là. Dans un monde, celui du hockey de la LNH, où les superstitions et les petites habitudes sont nombreuses, vaut mieux ne pas trop bomber le torse et parler d’un trophée qui est encore bien loin, surtout avec une avance de 1-0 dans cette série finale.

PHOTO JIM RASSOL, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Eetu Luostarinen et Gustav Forsling

Si les Panthers en sont là, à ne pas vouloir trop parler ni trop pavaner, c’est sans doute parce qu’ils étaient à la même place il y a un an, en finale, et que les Golden Knights de Vegas avaient fini par se pousser avec le gros prix.

Alors ça donne ce qu’on a vu dimanche à Fort Lauderdale, ce qu’on verra jusqu’à la fin, sans doute : des joueurs très prudents, qui ne veulent pas trop faire de grandes déclarations, qui vont tout faire pour ne pas énerver les dieux du hockey, quitte à ignorer du regard ce trophée qui est pourtant magnifique, comme chacun le sait.

En fait, à écouter certains membres des Panthers parler à leur centre d’entraînement de Fort Lauderdale, on avait même l’impression qu’ils avaient perdu le premier match de la série.

« On sait qu’on doit être meilleurs que ça, a tenu à dire Barkov d’un air sévère. Il faut continuer à bâtir sur ce qu’on a pu faire jusqu’ici. Parce que les Oilers [d’Edmonton] ont une équipe incroyable. Ils ont tant de talent, ça va être difficile, c’est sûr. »

Alors maintenant, c’est une bonne journée pour se ressourcer et pour se sentir bien, mais lundi, c’est le retour au travail, et il va falloir se retrousser les manches.

Aleksander Barkov

Peut-être aussi que les Panthers ont l’impression d’avoir pu éviter le pire samedi soir en match d’ouverture. Les gros canons des Oilers ont été blanchis, tout comme l’avantage numérique et puis finalement, tout comme le reste de l’équipe en entier.

Par ici, il n’y a personne d’assez fou pour croire que ça va durer.

« On veut jouer à notre meilleur, on veut dicter le tempo, parce qu’un match comme celui de samedi soir, ça ne va pas arriver à chaque fois, a dit Barkov avec prudence. Ils vont avoir la rondelle souvent, on sait aussi qu’ils vont avoir leurs occasions, mais nous, on doit continuer à faire ce qu’on fait. Dans cette ligue, chaque équipe désire pouvoir dicter le rythme du jeu, et c’est la même chose avec nous. »

Avant de subir un zéro samedi soir, les Oilers avaient réussi à marquer 10 buts lors de leurs trois matchs précédents, les derniers de la finale de l’Association de l’Ouest face aux Stars de Dallas. Les Panthers se doutent bien que, tôt ou tard, Connor McDavid va finir par faire quelque chose.

« On sait qu’il va réussir des gros jeux et qu’il va arriver à fond de train, et c’est pourquoi on a un Bobby », a ajouté le défenseur Niko Mikkola, en hommage à son gardien Sergei Bobrovsky.

Ensuite, l’entraîneur Paul Maurice a pris la parole, d’un ton très prudent lui aussi, au point de nous mettre en garde en parlant de McDavid et de son pote Leon Draisaitl.

« On en vient à être trop habitués à ces deux-là, et à quel point ils sont bons… Je comprends pourquoi. On le voit chaque soir, ils sont si dynamiques, si spéciaux, et après un temps, on devient habitués, au point de se demander pourquoi ils ne font pas ça à chaque présence sur la glace. Ils le font presque… »

On présume que Paul Maurice n’a pas regardé la coupe Stanley lui non plus.