(New York) Adresse médiocre, pertes de balles en pagaille, non-sélection aux Jeux olympiques, la nouvelle étoile du basketball Caitlin Clark peine pour ses débuts dans la WNBA, fragilisée aussi par une série de polémiques sur son statut.

Il y a à peine plus de deux mois, l’Américaine faisait chavirer le monde du basketball, tous sexes confondus, et bien au-delà, sous le maillot de l’Université d’Iowa, à coups de paniers à dix mètres et de passes fulgurantes.

Passée chez les professionnels avec le Fever de l’Indiana, elle tarde à trouver la mire et mène, très largement, la WNBA au nombre de balles perdues (5,5 par match).

« Elle n’a pas le corps pour encaisser la dimension physique de la ligue et elle n’est pas assez rapide pour s’en abstraire », a lancé, dans l’émission radio The Dan Patrick Show, l’entraîneur de l’Université du Connecticut, Geno Auriemma.

« La WNBA est une ligue exigeante », fait valoir à l’AFP la légende du basketball Nancy Lieberman. « Il y a énormément de talent. »

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Caitlin Clark

Le fait que la ligue ne compte que 12 équipes, contre 30 en NBA, élève le niveau général de la ligue, de l’avis général.

« Il n’y a pas beaucoup de places », a abondé Caitlin Clark. « Donc toute joueuse qui arrive sur le parquet est très très forte. Vous ne pouvez pas vous relâcher, ne serait-ce que le temps d’une possession, en attaque ou en défense. »

Dans la grisaille, pointent néanmoins quelques éclaircies, comme le match de dimanche face à Chicago, peut-être son plus abouti depuis le début de la saison.

La meneuse commence à apprivoiser le tempo de la WNBA, mieux calibrer ses passes et utiliser ses coéquipières pour trouver des espaces.

« Il faut apprendre une nouvelle danse. Et une fois que vous maîtrisez les pas, le rythme et que vous avez des qualités supérieures aux autres, tout va se mettre en place », a expliqué au quotidien USA Today, la meilleure marqueuse de l’histoire de la WNBA, Diana Taurasi.

Prendre du recul

Mais le niveau de jeu n’est pas le seul obstacle qui se dresse devant la numéro 22.

Avant même de fouler un parquet de la WNBA, Caitlin Clark avait déjà atteint un statut inédit dans l’histoire des sports collectifs féminins.

Locomotive d’audiences à l’université, au point de dépasser le basketball masculin, chaussure à son nom et contrat de 28 millions de dollars avec Nike, explosion des ventes de billets en WNBA, le phénomène Clark a propulsé tout un sport en terre inconnue.

Au point de susciter, selon l’ancien pivot de la NBA Shaquille O’Neal, la « jalousie » dans les rangs de la ligue professionnelle.

L’impression a été accentuée par la non-sélection de la joueuse en équipe olympique américaine.

Plusieurs fautes commises sur Caitlin Clark lors de ses premiers matchs ont fait polémique, en particulier un contact appuyé de l’arrière de Chicago Chennedy Carter, alors que la balle n’était pas en jeu.

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Caitlin Clark

« On ne l’a pas frappée comme dans un combat de rue. Ce n’est que du basketball », a plaidé ensuite Carter.

Dans la foulée, cette dernière a été attaquée sur les réseaux sociaux, traitée de « brute », et prise à partie, selon ses coéquipières, par un individu lors d’un déplacement. D’aucuns y ont vu l’expression d’un racisme latent.

« Caitlin Clark est une femme blanche hétérosexuelle dans une ligue noire et lesbienne, et elles lui en veulent et sont jalouses de l’attention qu’elle génère et de son contrat de chaussures », a lancé, sur Fox News, le polémiste ultraconservateur Clay Travis.

Clark a tenté d’éviter la controverse, mais sa neutralité a été dénoncée par des observateurs, notamment la joueuse du Sun du Connecticut, DiJonai Carrington.

« Comment quelqu’un peut ne pas être gêné par l’utilisation de son nom pour justifier le racisme, le sectarisme, la misogynie, la xénophobie et l’homophobie, c’est fou », a-t-elle commenté, sur X.

« Les gens ne devraient pas se servir de mon nom pour promouvoir leurs idées » racistes ou misogynes, a finalement réagi l’intéressée.

Le tourbillon médiatique qui étourdit actuellement la WNBA « n’est pas de la faute de Caitlin Clark », affirme Marie Ferdinand-Harris, ancienne joueuse majeure de la ligue.

« Je ne l’ai pas entendue dire que c’était elle qui avait fait de cette ligue ce qu’elle est », appuie-t-elle.

« Les gens se mettent enfin à parler de la WNBA. Ça a toujours été notre combat », souligne celle qui dirige aujourd’hui la fondation BeLikeCJ. « Prenons du recul. La WNBA compte enfin. »