Des combats acharnés ont opposé samedi l’armée israélienne à des combattants du Hamas dans le nord de la bande de Gaza, entraînant un nouveau déplacement de milliers de Palestiniens.

La guerre, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste en Israël le 7 octobre, ne connaît pas de répit à travers le territoire palestinien, et fait craindre un embrasement au Liban.  

Les troupes israéliennes avaient lancé le 7 mai une offensive terrestre dans la ville de Rafah (sud), alors présentée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas. Mais les combats ont regagné depuis en intensité dans plusieurs autres régions, notamment dans le nord.

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Un homme pousse son vélo devant les décombres d’abris détruits par un raid israélien à Rafah, le 29 juin.

Depuis jeudi, les forces israéliennes mènent une opération à Choujaïya, un quartier est de Gaza-ville où elles ont éliminé « des dizaines » de combattants en 48 heures, a indiqué l’armée, faisant état de « combats rapprochés avec des terroristes ».  

Deux soldats ont été tués et deux autres gravement blessés dans des combats dans le nord de Gaza, selon la même source.

Les branches armées du Hamas et de son allié le Djihad islamique ont indiqué de leur côté qu’elles étaient engagées dans des combats avec les forces israéliennes dans le secteur de Chouyjaïya.

La Défense civile palestinienne a signalé vendredi de « nombreux morts » et la fuite de « dizaines de milliers de civils », après un appel de l’armée à évacuer le quartier.

« Terrifiés »

« Dans les rues, les gens paniquaient, ils étaient terrifiés […] Tout le monde quittait Choujaïya », raconte Samah Hajaj, 42 ans. « On ne sait pas pourquoi ils (les soldats israéliens, NDLR) sont entrés à Choujaïya vu qu’ils y avaient déjà détruit les maisons ».

Dans la nuit de vendredi et samedi matin, des journalistes de l’AFP ont entendu des explosions, frappes aériennes et tirs provenant de ce secteur.

Toujours dans la ville de Gaza, la Défense civile a indiqué que quatre corps et six blessés avaient été dégagés des décombres d’un bâtiment touché par une frappe israélienne.

Dans le centre du territoire palestinien, des habitants déblayaient des gravats dans le camp de réfugiés de Maghazi après une frappe nocturne sur une maison qui a touché un centre médical.

« La pharmacie, le service d’ophtalmologie et le département des urgences ont été complètement détruits », a indiqué Tarek Qandeel, directeur du centre.

PHOTO EYAD BABA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Une femme transporte des objets récupérés à la suite d’un raid israélien à Rafah, le 29 juin.

Plus au sud, cinq corps ont été découverts après un bombardement sur des tentes de déplacés dans le secteur d’al-Mawasi, près de Rafah, d’après des médecins.

L’armée poursuit des opérations dans cette dernière ville, frontalière de l’Égypte, disant y avoir éliminé de « nombreux terroristes ».  

Des témoins ont fait état de morts et blessés parmi les déplacés du camp de Shakush, à l’ouest de Rafah.  

L’attaque du Hamas le 7 octobre en Israël a entraîné la mort de 1195 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

32 hôpitaux endommagés

Durant l’attaque, 251  personnes ont été enlevées, dont 116 sont toujours retenues à Gaza, parmi lesquelles 42 sont mortes, selon l’armée.

Israël a promis de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007 et qu’il considère comme une organisation terroriste, de même que les États-Unis ou l’Union européenne.

Son offensive sur la bande de Gaza a fait jusqu’à présent 37 834  morts, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas.

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Une Palestinienne se tient à côté de ses biens dans un camp de déplacés à Khan Younès, le 28 juin.

La guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le petit territoire palestinien assiégé de 2,4 millions d’habitants, dont plus de la moitié ont été déplacés : l’eau et la nourriture manquent et le système de santé est à genoux.

Un total de 32 hôpitaux sur les 36 que compte la bande de Gaza ont été endommagés depuis le 7 octobre, et parmi eux 20 sont désormais hors service, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Une chargée de mission de l’UNRWA, Louise Wateridge, a qualifié vendredi de « désastreuses » les conditions de vie dans le territoire palestinien, où l’aide humanitaire arrive au compte-gouttes.

« Les ramener à la maison »

À Tel-Aviv, des milliers de manifestants se sont rassemblés samedi comme chaque semaine pour réclamer le retour des otages et protester contre le premier ministre.

Parmi eux, l’ex-otage Noa Argamani, 26 ans, libérée le 8 juin avec trois autres captifs lors d’une opération de l’armée israélienne. « Bien que je sois rentrée chez moi, nous ne pouvons pas oublier les otages qui sont toujours en captivité aux mains du Hamas, et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les ramener à la maison », a-t-elle déclaré.

Sur le plan diplomatique, Oussama Hamdane, un haut responsable du Hamas basé à Beyrouth, a indiqué samedi que les négociations en vue d’un accord avec Israël sur un cessez-le-feu et la libération d’otages n’ont mené à aucune avancée.

Il a affirmé que son mouvement avait reçu le 24 juin la dernière proposition américaine pour un accord sur un cessez-le-feu, mais que celle-ci n’apportait « rien de nouveau ».

Un plan présenté fin mai par le président américain Joe Biden, proposé selon lui par Israël, est resté jusque-là lettre morte, les protagonistes campant sur des exigences intangibles.

Benyamin Nétanyahou veut poursuivre la guerre jusqu’à la défaite totale du Hamas et la libération de tous les otages, tandis que le mouvement palestinien exige un cessez-le-feu permanent et un retrait israélien total de Gaza.  

Les craintes de voir le conflit se propager au Liban se sont récemment amplifiées avec une surenchère verbale entre Israël et le Hezbollah, allié du Hamas.

Depuis le 7 octobre, les deux camps échangent quasi quotidiennement des tirs dans la zone frontalière, des violences meurtrières ayant poussé à la fuite des milliers d’habitants de part et d’autre de la frontière.  

L’ONU recommence à acheminer l’aide à partir de la jetée américaine

PHOTO AMIR COHEN, REUTERS

Un camion transportant de l’aide humanitaire embarque sur le port temporaire le 25 juin dernier.

Les travailleurs humanitaires ont commencé à acheminer des tonnes d’aide qui s’entassent sur un quai construit par les États-Unis au large de la côte de Gaza vers des entrepôts dans le territoire assiégé, ont annoncé samedi les Nations unies.

Il s’agit d’une étape importante alors que les États-Unis réfléchissent à la reprise ou non des opérations du quai après une énième pause en raison de la mer agitée.

Il n’était pas clair quand l’aide pourrait parvenir aux Palestiniens à Gaza, où les experts ont mis en garde contre le risque élevé de famine alors que la guerre entre Israël et les militants du Hamas en est à son neuvième mois.

C’est la première fois que des camions transportent de l’aide à partir du quai depuis que le Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM) a suspendu ses opérations en raison de problèmes de sécurité le 9 juin.

Des millions de kilos d’aide se sont accumulés. Au cours de la semaine dernière, plus de 10 millions de livres ont été livrées, selon l’armée américaine.

Une porte-parole du PAM, Abeer Etefa, a déclaré à l’Associated Press qu’il s’agissait d’une opération ponctuelle jusqu’à ce que la plage soit débarrassée de l’aide et que l’on s’efforçait d’éviter toute détérioration.

D’autres opérations de l’ONU sur la jetée dépendent des évaluations de sécurité de l’organisation, a ajouté Mme Etefa. L’ONU cherche à savoir si la jetée a été utilisée lors d’une opération militaire israélienne le mois dernier pour sauver trois otages.

Si les camions du PAM parviennent à acheminer l’aide vers les entrepôts à l’intérieur de Gaza, cela pourrait affecter la décision de l’armée américaine de réinstaller ou non la jetée, qui a été retirée en raison des conditions météorologiques vendredi. Les responsables américains ont affirmé qu’ils envisageaient de ne pas réinstaller la jetée en raison de la possibilité que l’aide ne soit pas récupérée.

Julia Frankel et Wafaa Shurafa, Associated Press