(Nations unies) Après des mois de guerre à Gaza, l’armée israélienne va être ajoutée à la « liste de la honte » de l’ONU sur les droits des enfants lors de conflits, une décision saluée par les Palestiniens, mais fustigée par Israël, même si le Hamas doit également l’y rejoindre.

Sur demande du Conseil de sécurité, le secrétaire général de l’ONU publie chaque année un rapport qui répertorie les violations des droits des enfants dans une vingtaine de zones de conflits dans le monde et liste en annexe les responsables de ces violations, qui incluent enfants tués et mutilés, recrutements, enlèvements ou violences sexuelles.

La publication de cette « liste de la honte » est prévue le 18 juin, mais l’ambassadeur israélien Gilad Erdan a pris tout le monde de court vendredi en annonçant avoir été notifié, par le chef de cabinet d’Antonio Guterres, de l’ajout de l’armée israélienne.

« Je suis profondément choqué et écœuré par cette décision honteuse du secrétaire général », voit-on Gilad Erdan dire au téléphone dans une vidéo diffusée sur son compte X.

PHOTO DAVE SANDERS, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

L'ambassadeur israélien Gilad Erdan

« C’est une décision immorale qui aide le terrorisme et récompense le Hamas […] Honte à lui ! », ajoute l’ambassadeur qui s’en prend régulièrement ces derniers mois à Antonio Guterres et à l’ONU en général.

« Aujourd’hui, l’ONU s’est elle-même ajoutée sur la liste noire de l’Histoire en se joignant à ceux qui soutiennent les meurtriers du Hamas », a renchéri sur X le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.

Les forces armées israéliennes sont « l’armée la plus morale du monde et aucune décision délirante de l’ONU ne changera ça ».

L’ambassadeur palestinien à l’ONU Riyad Mansour a en revanche salué l’ajout d’Israël.

Cela « ne ramènera pas les dizaines de milliers de nos enfants tués par Israël en plusieurs décennies », mais « c’est un pas important dans la bonne direction pour mettre fin au deux poids, deux mesures, et à la culture d’impunité dont a bénéficié Israël pendant trop longtemps », a-t-il commenté sur X.

Le porte-parole d’Antonio Guterres a lui confirmé l’entretien téléphonique entre le chef de cabinet et l’ambassadeur israélien.

Il s’agissait d’un « appel de courtoisie », réservé aux pays « nouvellement listés » dans le rapport, a précisé Stéphane Dujarric, jugeant « choquant et inacceptable » l’enregistrement et la diffusion de la vidéo.

« Complètement justifié »

Interrogé sur la possible inclusion du Hamas, il a refusé de donner toute autre information sur le contenu du rapport avant sa publication le 18 juin.

Une source diplomatique a toutefois indiqué à l’AFP que le Hamas et le Djihad islamique, autre mouvement palestinien armé, allaient bien être ajoutés sur la liste.

L’an dernier, les forces armées russes et groupes armés « affiliés » opérant en Ukraine avaient fait leur apparition sur la « liste de la honte ».

Mais pas Israël, au grand dam des organisations de défense des droits humains qui réclament son inscription depuis des années.

L’ONU avait averti dans le rapport de 2022 qu’Israël serait placé sur la liste si aucune amélioration n’était constatée.

Mais le rapport de l’an dernier avait noté « une baisse significative du nombre d’enfants tués par les forces israéliennes, y compris dans des frappes aériennes », entre 2021 et 2022.

La guerre entre Israël et le Hamas, déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël – qui a entraîné la mort de 1194 personnes, en majorité des civils tués ce jour-là, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes –, a changé la situation.

L’inscription d’Israël cette année est « une décision complètement justifiée du secrétaire général, même si elle aurait dû être prise depuis longtemps », a déclaré à l’AFP Louis Charbonneau, de Human Rights Watch.

« C’est quelque chose que nous réclamons depuis longtemps, avec l’inscription du Hamas et d’autres groupes armés palestiniens ».

En réponse à l’attaque du 7 octobre, l’armée israélienne a lancé une offensive meurtrière dans la bande de Gaza où le Hamas a pris le pouvoir en 2007. Au moins 36 731 Palestiniens ont été tués, selon un dernier bilan vendredi du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza dirigé par le Hamas. Ce bilan ne précise plus le nombre d’enfants, mais le bureau de presse du gouvernement de Gaza avance le chiffre de plus de 15 000 mineurs tués.