(Paris) Les programmes des « deux extrêmes » mènent « à la guerre civile » : le président français Emmanuel Macron a frontalement attaqué ses rivaux lundi à six jours des législatives, ciblant notamment le chef de l’extrême droite, Jordan Bardella, qui s’est dit « prêt » à gouverner.

Dans une nouvelle prise de parole fleuve, auprès du podcast « Génération Do It Yourself », le président de la République n’a pas mâché ses mots en direction du Rassemblement national (RN, extrême droite), favori du scrutin, et du parti de gauche radicale La France insoumise (LFI).

« La réponse de l’extrême droite » en matière d’insécurité : « parce qu’elle renvoie les gens ou à une religion ou à une origine, c’est en ça qu’elle divise et qu’elle pousse à la guerre civile », a-t-il lancé. Et en face, LFI propose « une forme de communautarisme », « mais ça c’est aussi la guerre civile derrière ».

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« Nous sommes prêts » à gouverner, a répété Jordan Bardella, le jeune président du parti d’extrême droite français Rassemblement national (RN) lors d’une présentation de son programme, alors que les sondages le créditent de 35,5 à 36 % des voix.

« Un président de la République ne devrait pas dire cela », a répliqué Jordan Bardella, tandis que Jean-Luc Mélenchon, le leader de LFI, accusait Emmanuel Macron d’être « toujours là pour mettre le feu ».

Le jeune président du Rassemblement national (RN) a tenu lundi matin une longue conférence de presse pour tenter de rassurer sur son programme, après une semaine de flottement lors de laquelle son camp avait semblé reculer sur plusieurs de ses mesures-phares, dont l’abrogation de la très contestée réforme des retraites adoptée en 2023.  

« Nous sommes prêts » à gouverner, a-t-il répété, alors que les sondages créditent son parti de 35,5 à 36 % des voix.

Le RN est « le seul mouvement à pouvoir mettre en œuvre dès maintenant et raisonnablement les aspirations » des Français, a affirmé celui qui, à 28 ans, aspire à devenir premier ministre.

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Les leaders du Rassemblement national, Marine Le Pen et Jordan Bardella

« Le RN n’est pas prêt à gouverner », lui a répondu le premier ministre macroniste Gabriel Attal. C’est « un parti d’opposition et non pas un parti de gouvernement », a-t-il argué.

Dans son programme, Jordan Bardella propose notamment « un big bang de l’autorité » à l’école dès septembre, avec interdiction des téléphones portables dans les établissements et expérimentations du port de l’uniforme.

Sur l’étranger, il a répété qu’il maintiendrait le soutien de la France à Kyiv mais s’opposerait à l’envoi de missiles longue portée et de troupes françaises en Ukraine. Il a aussi écarté, dans l’immédiat, la reconnaissance d’un État palestinien, estimant que « ce serait reconnaître le terrorisme ».

Le camp du président Emmanuel Macron, critiqué de toutes parts pour avoir dissous l’Assemblée nationale, apparaît comme la plus affaiblie des trois forces en lice (19,5 à 20 %).

Gabriel Attal a néanmoins tenté de se poser comme le principal rempart face au parti d’extrême droite et fustigé, dans un entretien accordé au quotidien Le Figaro, la « tenaille » entre LFI et le RN qui « s’alimentent » entre eux, pointant le « risque d’une grande déchirure du pays, avec des tensions et des violences à la clé ».

« Projet d’inspiration marxiste »

À gauche, Jean-Luc Mélenchon a vu la pression se renforcer autour de lui par l’appel quasi simultané de ses trois alliés à gauche – PCF, Écologistes, Parti socialiste – à privilégier le « consensus » pour désigner le candidat au poste de premier ministre de leur coalition du Nouveau Front populaire en cas de victoire.

Le fondateur de La France insoumise « n’est pas le leader du Nouveau Front populaire (NFP) et il ne sera pas premier ministre », a déclaré la patronne des Écologistes Marine Tondelier à l’AFP.

« Le prochain premier ministre sera Insoumis », a rétorqué M. Mélenchon sur France 2, sans s’exclure de la liste des prétendants.

« La première urgence, c’est d’éviter le RN », pas de savoir qui ira à Matignon, a martelé pour sa part Laurent Berger, ancien responsable syndical opposé à la réforme des retraites de 2023.

Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a, lui, de nouveau fustigé le programme du NFP et ses hausses d’impôts, affirmant que « tout le monde (serait) spolié par ce projet […] d’inspiration marxiste ».

L’issue du scrutin, entre le spectre du premier gouvernement d’extrême droite de l’histoire du pays, et une Assemblée nationale dominée par trois pôles irréconciliables, inquiète en France comme à l’étranger, alors que la guerre continue en Ukraine et à Gaza, et à un mois des Jeux olympiques de Paris-2024.