Le théoricien du complot Alex Jones demande au tribunal l’autorisation de convertir sa réorganisation de faillite personnelle en liquidation, ce qui entraînerait la vente d’une grande partie de ses actifs pour l’aider à payer une partie des 1,5 milliard qu’il doit aux proches des victimes de la tuerie de l’école primaire Sandy Hook.

M. Jones et sa société de médias, Free Speech Systems, ont tous deux déposé leur bilan après que les familles des enfants de Sandy Hook ont remporté leurs procès contre lui. Celui-ci avait qualifié à plusieurs reprises la fusillade de 2012 – qui a tué 20 élèves de première année et six éducateurs à Newtown, au Connecticut – de canular sur ses programmes Infowars.

Mais M. Jones et les familles des enfants de Sandy Hook n’ont pas réussi à s’entendre sur la manière de résoudre la situation, ce qui a conduit M. Jones à déposer une requête mercredi devant le tribunal américain des faillites de Houston demandant à un juge de convertir son cas personnel, une réorganisation en vertu du Chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites, à celle prévue par le Chapitre 7, soit une liquidation.

« Le débiteur ne prévoit pas qu’une résolution puisse être trouvée avec les autres parties ayant un intérêt suffisant pour confirmer un plan de réorganisation en vertu du Chapitre 11 », indique la demande de M. Jones. « Étant donné qu’il n’y a aucune perspective raisonnable de réussite de la réorganisation, rester dans le Chapitre 11 entraînerait des dépenses administratives supplémentaires sans avantage concomitant pour la succession du débiteur. »

Les avocats de M. Jones en matière de faillite n’ont pas immédiatement répondu aux messages de vendredi sollicitant des commentaires.

Christopher Mattei, avocat des familles, a déclaré dans un communiqué qu’« Alex Jones a blessé tant de personnes ».

Les familles du Connecticut se sont battues pendant des années pour le tenir pour responsable, quel qu’en soit le prix et au péril de leur vie. Ce sont leurs efforts constants afin qu’il soit tenu responsable, et non pour simplement obtenir de l’argent, qui ont réussi à obtenir justice.

Christopher Mattei, avocat des familles

Les familles de Sandy Hook, quant à elles, demandent au même juge de transformer la procédure d’une réorganisation en une liquidation.

Le juge Christopher Lopez a prévu une audience le 14 juin à Houston pour décider de la manière de résoudre les affaires.

Les avocats de M. Jones ont déclaré que l’affaire semblait également se diriger vers une liquidation, ou qu’elle pourrait être rejetée.

Entre liquidation et restructuration

La liquidation pourrait signifier que M. Jones devrait vendre la plupart de ce qu’il possède, y compris son entreprise et ses actifs, mais pourrait conserver sa maison et ses autres effets personnels exemptés de liquidation en cas de faillite. Les bénéfices seraient reversés à ses créanciers, y compris les familles des enfants de Sandy Hook.

PHOTO MARCUS YAM, ARCHIVES NEW YORK TIMES

Alex Jones a déclaré à plusieurs reprises, dans son émission en ligne Infowars, que la tuerie de Sandy Hook – ayant fait 26 victimes, dont 20 enfants – était un canular.

Si la demande de Free Speech Systems n’est pas retenue, la société reviendrait à la même position dans laquelle elle se trouvait après que les 1,5 milliard ont été accordés dans le cadre des poursuites et elle renverrait les efforts pour recouvrer les dommages aux tribunaux des États du Texas et du Connecticut, où les verdicts ont été prononcés.

M. Jones a déjà décidé de vendre certains de ses biens personnels pour payer ses créanciers, notamment son ranch texan d’une valeur d’environ 2,8 millions.

Mais une liquidation des actifs de M. Jones et de sa société ne permettrait de récolter qu’une fraction de ce qu’il doit aux familles des enfants de Sandy Hook.

Selon les états financiers les plus récents déposés auprès du tribunal des faillites, M. Jones possède personnellement environ 9 millions d’actifs, dont sa maison de 2,6 millions dans la région d’Austin au Texas et d’autres biens immobiliers. Il a indiqué que ses frais de subsistance s’élevaient à environ 69 000 $ pour le seul mois d’avril, dont environ 16 500 $ pour les dépenses liées à sa maison, notamment l’entretien, le ménage et l’assurance.

La société mère d’Infowars, Free Speech Systems, qui emploie 44 personnes, disposait de près de 4 millions de liquidités fin avril. L’entreprise a gagné près de 3,2 millions en avril, notamment grâce à la vente de compléments alimentaires, de vêtements et d’autres articles dont M. Jones fait la promotion dans son émission, tout en indiquant avoir dépensé 1,9 million.

Le week-end dernier, M. Jones a averti dans son émission que son entreprise était confrontée à une fermeture imminente en raison de ce qu’il a qualifié de complot du gouvernement et des démocrates liés à ses affaires de faillite. Il a exhorté ses partisans à former une chaîne humaine autour de son studio d’Austin pour empêcher une prise de contrôle, et a déclaré qu’il dormait dans le studio pour se prémunir contre une fermeture – ce qui ne s’est pas produit.

Le juge Christopher Lopez a statué lundi que M. Jones pourrait continuer à travailler jusqu’au 14 juin, date à laquelle des décisions sur d’éventuelles liquidations sont attendues.

PHOTO ILANA PANICH-LINSMAN, ARCHIVES NEW YORK TIMES

Alex Jones dans son studio

M. Jones a déclaré dans son émission que même si Free Speech Systems et Infowars étaient vendus, il pourrait reprendre ses émissions d’une autre manière.

M. Jones avait proposé un plan de réorganisation en cas de faillite qui lui aurait permis de continuer à exploiter Free Speech Systems et Infowars tout en payant aux familles des enfants de Sandy Hook un minimum de 55 millions sur dix ans. Avant cette proposition, les familles avaient suggéré qu’il leur verse un minimum de 85 millions.

Les familles de nombreuses victimes de Sandy Hook, mais pas de toutes, ont poursuivi Jones et ont remporté les deux procès dans le Connecticut et au Texas.

Les proches ont déclaré qu’ils étaient traumatisés par les commentaires de M. Jones et les actions de ses partisans. Ils ont témoigné lors des procès avoir été harcelés et menacés par les partisans de M. Jones, dont certains ont confronté en personne les familles en deuil en affirmant que la fusillade n’avait jamais eu lieu et que leurs enfants n’avaient jamais existé.