(Brasilia) Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a ordonné jeudi le rétablissement d’une commission d’enquête sur les crimes politiques commis durant la dictature militaire (1964-1985).

La Commission spéciale sur les morts et disparus politiques, créée en 1995, avait été dissoute par son prédécesseur d’extrême droite Jair Bolsonaro à la fin de son mandat, en décembre 2022.

Le décret de Lula, publié jeudi au Journal officiel, annule la décision qui avait mis fin aux travaux de cette commission, et prévoit « la reprise de ses activités ».

Le ministre des droits de la personne, Silvio Almeida, a salué dans un communiqué un « pas important pour garantir la mémoire, la vérité et la justice ».

Le rétablissement de la commission spéciale permettra selon lui de « continuer le travail interrompu illégalement par l’administration précédente, de recherche et d’identification des morts et des disparus » durant la dictature.  

L’institut Vladimir Herzog, qui porte le nom d’un journaliste qui fut une des victimes les plus emblématiques de la dictature, a également « célébré » la décision de Lula.

« Cette commission […] est restée abandonnée durant une longue période et a subi ces dernières années des attaques et des démantèlements qui ont contribué à la souffrance des familles de disparus », a dit cet institut dans un communiqué.

Le régime militaire brésilien est responsable de la mort ou de la disparition d’au moins 434 personnes, selon la Commission nationale de la vérité, une autre instance créée pour enquêter sur les crimes de la dictature.

Contrairement à l’Argentine voisine, qui a jugé les agents de l’État accusés d’avoir commis des crimes pendant la dictature (1976-1983), au Brésil, le chapitre a été clos par une loi d’amnistie de 1979.  

Lula, qui avait déjà présidé le Brésil durant deux mandats, de 2003 à 2010, est de retour au pouvoir depuis janvier 2023. De nombreux groupes de défense des droits de la personne réclamaient depuis qu’il rétablisse la Commission spéciale sur les morts et disparus politiques.

PHOTO ERALDO PERES, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva s’exprime lors de la présentation du Plan de récolte au Palais présidentiel de Planalto, à Brasilia, au Brésil, le mercredi 3 juillet 2024.

Lula avait été critiqué fin mars par ces organisations pour avoir annulé les commémorations du 60anniversaire du coup d’État qui a instauré le régime militaire, alors que des hommages aux victimes étaient prévus.

Le 31 mars 1964, ce coup d’État avait déposé le président Joao Goulart.

Lula, ancien syndicaliste qui a mené une grève historique en pleine dictature, a suscité la controverse en déclarant que le coup d’État de 1964 faisait « déjà partie de l’histoire ».

« Je suis plus préoccupé par le coup d’État du 8 janvier 2023 que par celui de 1964 », avait-il affirmé.  

En début d’année dernière, des milliers de partisans de Jair Bolsonaro, leur champion défait à la présidentielle de 2022, avaient saccagé les lieux de pouvoir à Brasilia, appelant l’armée à déposer Lula, une semaine après son investiture.  

M. Bolsonaro n’a jamais caché son admiration pour le régime militaire qui a gouverné le Brésil pendant 21 ans de 1964 à 1985.  

Il a notamment déclaré en 2016 que « l’erreur de la dictature a été de torturer au lieu de tuer »