À n’en pas douter, la baie adore ramener sa fraise dans les salades composées.

Pour Robert Penny, alias Bob le chef, lui adjoindre un avocat lui rendra justice. « Ça donne un beau mélange avec le côté gras de l’avocat, le sucre de la fraise venant aussi le couper un peu. Dans l’une de mes recettes, je les accompagne de homard, mais on pourrait tout aussi bien obtenir un heureux mélange avec une salade de fraises, avocats, bocconcinis, et un peu de bacon », recommande-t-il.

Quelle autre piste ? Le kale. En liant le tout avec un peu de feta. « Le kale est un peu neutre et a besoin parfois d’un petit réveil pour se mettre en valeur, et la fraise peut amener cette dimension, en jouant avec le sucré-salé », indique l’« anarchiste culinaire ».

De son côté, l’œnologue et créateur d’harmonies et sommelleries moléculaires François Chartier suggère de l’acoquiner avec le bok choy ou les endives, ce qui en atténue l’amertume. Il viserait ainsi un mélange yuzu, miel et fraise pour les enrober. « Ce serait encore mieux de légèrement réchauffer ce mélange, sans cuisson, pour obtenir une libération de saveurs », préconise-t-il. Dans le cas de l’endive, elle possède un ami commun avec la fraise : le fromage bleu, à tester dans la composition.

Aussi, la fraise aime bien se faire jeter des tomates. « En chutney ou en ketchup, on pense rarement à ajouter de la fraise. Pourtant, la tomate et la fraise sont faites pour aller ensemble », glisse-t-il.

Question de molécules

Si Bob le chef aime bien associer la fraise avec le crabe et le homard, ce n’est pas François Chartier qui s’en émouvra, puisqu’il cite les pétoncles ou du poisson blanc comme bons compagnons des baies rouges. Par exemple, en les faisant revenir rapidement dans une poêle avec du romarin avant de les déposer sur la chair du poisson ou sur le mollusque. Pour relever le tout, le gingembre est une option, au goût.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

François Chartier a de nombreuses idées pour se servir de la fraise de façon originale.

Si on souhaite quelque chose de plus corsé, on peut faire une réduction de sauce soya et de miel de sarrasin, et y ajouter à la fin une fraise écrasée. Ces trois ingrédients présentent tous des molécules similaires. Puis on se sert du tout pour laquer le poisson.

François Chartier

M. Chartier souligne également le statut de jumeaux moléculaires partagé entre la fraise et l’ananas, au point qu’ils sont naturellement interchangeables – ce qui ouvre des voies culinaires. Il a pu ainsi expérimenter avec succès un jambon à l’ananas et aux fraises, ou aux fraises seulement. Et dans une pizza hawaïenne ? « On l’a déjà fait ! lance-t-il, c’est très intéressant. Quand elle est cuite, la fraise développe des molécules de furanéol que l’on retrouve dans l’ananas. »

Celui qui contrôle l’épice…

À la suggestion « et un peu de poivre en grains ? », nos experts gastronomiques répondent : « Oui ! »

PHOTO SIMON GIROUX, ARCHIVES LA PRESSE

Bob le chef

Le poivre noir et les fraises, c’est toujours très intéressant. Notamment avec un mascarpone salé, un peu de poivre noir et une réduction de balsamique pour aller chercher un côté sweet and sour.

Bob le chef

François Chartier recommande quant à lui de se concocter des confitures de fraises agrémentées de poivre du Sichuan, à doser selon le goût du dégustateur pour le côté électrisant de l’épice chinoise. Même chose pour le clou de girofle. « Il suffit d’en ajouter en faisant chauffer les fraises. On pourrait servir cette confiture avec du fromage bleu », invoque-t-il.

Les recherches de M. Chartier mettent par ailleurs en évidence beaucoup d’ingrédients au profil aromatique proche de celui de la fraise : le curcuma, le curry, le gingembre ou le romarin, pour ne citer que ceux-là. Rien de sorcier : une simple salade de fraises, un trait de yuzu, du romarin, on touille et c’est tout ! « Ceux qui n’apprécient pas l’acidité du yuzu ou de la lime peuvent les remplacer par du thé au jasmin. »

Coupes du monde

PHOTO FOURNIE PAR ROBERT PENNY

Le gâteau aux fraises et au fromage de chèvre de Bob le chef

Et si nous parlions boissons ? Avec des fraises nature, Bob le chef apprécie particulièrement le champagne. « Je les dispose dans une flûte et je verse le champagne dessus, c’est toujours gagnant », dit-il. François Chartier opterait quant à lui pour un moscato d’Asti ou un muscat de Beaumes-de-Venise.

En cas d’association avec une autre vedette dans l’assiette, ce dernier précise cependant que c’est le compagnon de route qui guidera alors le choix. Avec du clou de girofle, des vins rouges barriqués auront du succès ; avec du poivre du Sichuan ou du yuzu, le riesling montera sur le ring ; avec du gingembre ou du curcuma, le gewurztraminer fera un malheur ; avec des tomates fraîches, le sauvignon sera une belle option.

Un petit dessert pour conclure ? Bob le chef a mis au point des petits cheesecakes aux fraises et au fromage de chèvre, très simples. Avec des biscuits doigts-de-dame, de la cassonade et quelques gouttes de vanille. Et un peu de sucre en poudre ? Oui !

Des fraises d’ici toute l’année

Si la saison des fraises est toujours très attendue, nul besoin d’attendre l’été pour déguster des fraises de chez nous, où poussent les initiatives de culture intérieure.

Une fraise locale et goûteuse à croquer même en hiver ? C’est un projet cultivé par Ferme d’Hiver, qui a conçu à Vaudreuil une ferme verticale, où les conditions climatiques sont contrôlées à 100 %, et qui compte remplacer 10 % des importations canadiennes de fraises.

On trouve aussi des productions en serre, comme aux fermes Gadbois, en Montérégie, qui cultivent désormais de l’Albion en hiver, aux Serres de Lavallière qui produisent des fraises en serre à Sorel-Tracy et même jusqu’au Nord-du-Québec, à Chapais, aux Serres bleues.