(Washington) Le président américain Joe Biden a obstinément et parfois laborieusement défendu son acuité mentale et sa capacité à gouverner le pays pour un second mandat, lors d’une des interviews les plus importantes de sa carrière politique, vendredi sur ABC.

« Personne n’est plus qualifié que moi » pour « gagner » l’élection, a affirmé le dirigeant de 81 ans lors de cet entretien d’une vingtaine de minutes, niant la réalité des sondages qui le placent en nette difficulté face à Donald Trump.

Lors de son échange avec le journaliste George Stephanopoulos, crucial pour le maintien de sa candidature, le président a esquivé à plusieurs reprises la question de savoir si son état physique et mental s’était dégradé durant son mandat.

Il ne s’est pas non plus engagé à se soumettre à des évaluations médicales indépendantes, assurant qu’être président équivalait à passer « un test cognitif chaque jour ».

Or ce sont bien ses capacités cognitives qui font l’objet de très vives discussions, depuis son débat catastrophique face à Donald Trump, jeudi 27 juin.

« Déni »

« J’étais malade. Je ne me sentais vraiment pas bien », a affirmé le dirigeant démocrate, en évoquant un mauvais rhume pour justifier sa contre-performance face à son prédécesseur républicain.

À la question de savoir s’il avait revu sa piètre performance, Joe Biden a répondu par ces mots étranges : « Je ne crois pas. »

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L’ancien président Donald Trump, candidat républicain à la présidence, s’exprime lors du débat présidentiel organisé par CNN avec le président Joe Biden, le 27 juin 2024, à Atlanta.

La séquence a été partagée immédiatement par le camp républicain qui prétend depuis des années que le président octogénaire est sénile.

« Biden est dans le déni et en déclin », a lancé Karoline Leavitt, porte-parole de Donald Trump, sur X.  

S’il s’est exprimé de manière plus fluide que pendant son duel télévisé raté du 27 juin avec Donald Trump, Joe Biden a toutefois parlé d’une voix étouffée, et a eu des phrases parfois incomplètes ou un peu décousues.

Cela suffira-t-il pour rassurer les démocrates, de plus en plus nombreux à appeler à ce qu’il jette l’éponge ?

« Le président est fier de son bilan, à juste titre. Mais il apparaît dangereusement déconnecté des préoccupations des gens concernant ses capacités à aller de l’avant et sa position dans cette campagne », a jugé sur X le très influent David Axelrod, ancien stratège de Barack Obama.

« Seigneur tout-puissant »

Le candidat démocrate a donc encore fort à faire pour effacer l’impression désastreuse laissée par son débat face à Donald Trump, dont il n’a pas du tout réussi à gérer les conséquences immédiates : une vague d’appels à son retrait dans la presse et une flambée des inquiétudes sur sa santé mentale au sein de son parti.

Quatre parlementaires démocrates ont déjà demandé sans ambiguïté à Joe Biden de renoncer à se présenter. La gouverneure démocrate Maura Healey l’a appelé à évaluer sa candidature « avec soin ».

Le président a balayé ces appels d’un revers de main.

« Si le Seigneur tout-puissant descendait et disait “Joe, retire-toi de la course”, je me retirerais de la course, mais il ne va pas descendre », a-t-il affirmé à ABC.

Le démocrate est apparu beaucoup moins énergique que lors d’un discours de campagne qu’il avait prononcé, avec un téléprompteur, peu avant d’enregistrer l’entretien à Madison, dans le Wisconsin.

« Vous pensez que je suis trop vieux pour battre Donald Trump ? », a-t-il lancé lors de ce rassemblement, ce à quoi le public a répondu un retentissant « Non ! »

Nulle volonté de baisser les bras non plus de la part de l’équipe de campagne de Joe Biden.

Elle a publié vendredi un intense plan de bataille pour le mois de juillet prévoyant une avalanche de spots télévisés, des déplacements dans tous les États clés, et notamment dans le sud-ouest du pays pendant la convention républicaine (15-18 juillet).

Joe Biden doit aussi être l’hôte la semaine prochaine d’un sommet des dirigeants de l’OTAN, et donnera jeudi à cette occasion une conférence de presse, là encore un exercice très attendu.

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Le président Joe Biden au Wisconsin, le 5 juillet 2024.

En début de semaine, l’une des plus influentes voix démocrates, l’ancienne présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi avait jugé « essentiel » que Joe Biden fasse une et même deux entrevues de haut vol.