Au lendemain du verdict de culpabilité, Donald Trump livre un discours décousu et truffé de mensonges.

(New York) Son lutrin se dressait dans le hall de la Trump Tower, à quelques mètres seulement de l’escalier roulant qui l’avait mené à sa conférence de presse du 16 juin 2015 où il avait annoncé sa candidature à l’élection présidentielle de 2016.

Mais vendredi matin, son discours n’était pas celui d’un candidat néophyte promettant d’assécher le marais de Washington, de bâtir un mur à la frontière sud ou de créer un nombre record d’emplois. C’était le discours décousu, rageur et mensonger d’un ancien président doublé d’un candidat présidentiel qui tentait de se relever d’un verdict qui fait désormais de lui un criminel condamné.

Discours susceptible de galvaniser ses partisans, mais aussi de refroidir certains électeurs indécis.

« Nous vivons dans un État fasciste », a dénoncé Donald Trump lors de sa diatribe de 33 minutes au cours de laquelle il a pourfendu le juge chargé de son procès à New York, Juan Merchan, le procureur de Manhattan Alvin Bragg et Joe Biden, entre autres.

« Tout vient de la Maison-Blanche », a-t-il déclaré en accusant faussement le président démocrate d’avoir orchestré son inculpation à New York, une affaire locale. « C’est le pire président de l’histoire de notre pays, le plus incompétent, le plus stupide que nous ayons jamais eu. »

Plus tard dans la journée, avant de faire une annonce liée au conflit entre Israël et le Hamas, Joe Biden a commenté pour la première fois le verdict du jury de Manhattan, qualifiant la réaction de son rival républicain de « dangereuse et irresponsable ».

PHOTO EVELYN HOCKSTEIN, REUTERS

Le président Joe Biden

« Le principe américain selon lequel personne n’est au-dessus de la loi a été réaffirmé », a déclaré le président en soutenant que Donald Trump avait eu toutes les chances de se défendre et qu’il pourra faire appel de la décision rendue par un jury composé de « 12 citoyens ».

« C’est ainsi que fonctionne le système américain. Et c’est imprudent, c’est dangereux et irresponsable de la part de quiconque de dire que c’est truqué, juste parce qu’il n’aime pas le verdict. »

Le juge Merchan et Michael Cohen encore pris pour cible

Donald Trump a confirmé qu’il portera en appel ce verdict « frauduleux » rendu à l’issue d’un procès « injuste » et « truqué » selon lui. Dans la foulée, il a de nouveau remis en cause l’impartialité du juge Juan Merchan, responsable du prononcé de sa peine, prévu le 11 juillet, soit quelques jours seulement avant le début de la convention républicaine à Milwaukee.

« Il ne nous a pas permis d’avoir des témoins, il ne nous a pas permis de parler, il ne nous a pas permis de faire quoi que ce soit. Le juge était un tyran », a-t-il déclaré en imputant notamment au juge des décisions concernant les témoins qui incombaient à ses propres avocats.

Le juge Juan Merchan ne devra pas seulement décider de la peine à infliger à Donald Trump, déclaré coupable de 34 chefs d’accusation de falsification de documents commerciaux au premier degré en lien avec le paiement de 130 000 $ à l’actrice de films pornographiques Stormy Daniels. Il devra aussi déterminer si Donald Trump a violé de nouveau le bâillon partiel qu’il lui a imposé et qui lui interdit notamment de s’attaquer aux témoins.

PHOTO ANDRES KUDACKI, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Michael Cohen

Lors de sa conférence de presse, l’hôte de la Trump Tower a traité Michael Cohen, témoin vedette de la poursuite, sans le nommer, de « crapule ».

« Tout le monde sait ça », a-t-il dit en ajoutant que son ancien avocat personnel « s’est retrouvé en difficulté à cause de transactions extérieures » dans l’industrie du taxi.

Il n’a pas relevé que Michael Cohen s’était parjuré dans le cadre de l’enquête du Congrès sur l’affaire russe afin de le protéger et qu’il avait plaidé coupable à une violation de la loi fédérale sur le financement électoral pour le paiement à Stormy Daniels qui lui a valu d’être condamné à l’issue de son procès à New York.

Persécution

En fait, il s’agissait plus d’un monologue que d’une conférence de presse. Après s’être adressé pendant 33 minutes aux journalistes, Donald Trump a pris congé d’eux sans répondre à une seule question.

Son discours donne à penser que le thème de sa persécution sera au cœur de sa campagne présidentielle. Il en sera de même pour l’immigration et l’économie, deux enjeux qu’il a abordés brièvement avant de bifurquer vers d’autres sujets, dont son inculpation à Washington en lien avec l’élection présidentielle de 2020 et l’attaque du 6 janvier 2021 contre le Capitole.

« S’ils peuvent me faire ça, ils peuvent le faire à tout le monde », a-t-il dit en parlant de son procès à New York.

PHOTO MIKE SEGAR, REUTERS

Le verdict a fait la une des journaux vendredi.

Un porte-parole de l’équipe de campagne de Joe Biden a vu dans le discours de Donald Trump la preuve qu’il est « embrouillé, désespéré et vaincu » à la suite du verdict de culpabilité que lui a infligé un jury de ses pairs.

« Trump est rongé par sa propre soif de vengeance et de châtiment, a ajouté Michael Tyler. Il pense que cette élection le concerne. Mais ce n’est pas le cas. Il s’agit des Américains : réduire leurs coûts, protéger leurs libertés, défendre leur démocratie. »

  • Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

    PHOTO ANGELA WEISS, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

  • Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

    PHOTO JEENAH MOON, THE NEW YORK TIMES

    Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

  • Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

    PHOTO JULIA NIKHINSON, ASSOCIATED PRESS

    Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

  • Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

    PHOTO ANDREW KELLY, REUTERS

    Deux groupes de manifestants aux opposés se faisaient entendre près de la Trump Tower, vendredi.

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N’empêche : les partisans de Donald Trump ont manifesté leur colère face au verdict de New York en versant une somme record de 34,8 millions de dollars à sa campagne présidentielle dans les heures qui ont suivi le verdict du jury de Manhattan, selon des données qui n’ont pas été vérifiées de façon indépendante.

De nombreux élus républicains ont exprimé de leur côté leur appui à l’ancien président en multipliant les critiques du procès et du verdict de New York sur les réseaux sociaux et dans les médias traditionnels.

« Je pense que la Cour suprême devrait intervenir », a déclaré le président de la Chambre des représentants Mike Johnson sur Fox News vendredi matin. « Je pense qu’elle remettra les pendules à l’heure, mais cela prendra du temps. »

En attendant, Matt Walsh, collaborateur au site conservateur Daily Wire, a conseillé à Donald Trump de « dresser et publier une liste de 10 criminels démocrates de haut rang qu’il fera arrêter lorsqu’il prendra ses fonctions » après son élection éventuelle.