Il faut remercier Nathalie Collard, chroniqueuse à La Presse, pour le bilan qu’elle a proposé des premières années du mandat de Marie Grégoire à la tête de Bibliothèque et Archives nationales du Québec1, BAnQ pour les intimes. Le texte nous a amenés à pousser la réflexion quant à l’intérêt qu’accordent nos décideurs politiques pour cette grande institution.

Saluons les efforts louables que fait Marie Grégoire pour rapprocher de l’humain cet objet familier qu’est le livre. L’humain doit entre autres se nourrir et se loger, bien sûr, mais son développement ne peut ignorer le besoin de s’informer, de connaître, de savoir. Et en cela, une institution comme BAnQ joue un rôle essentiel dans un Québec qui doit plonger ses racines toujours plus profondément dans le sol de sa culture et de son patrimoine.

Sans doute, Marie Grégoire l’a-t-elle bien compris. Sans être au fait du détail de sa démarche, on sent bien qu’elle s’est beaucoup investie pour poursuivre le développement de l’institution qu’elle dirige.

Se rapprocher de la clientèle, lui fournir un accès facile à la matière première que constitue le livre, et aussi les archives qu’il ne faut pas oublier, pour assouvir sa soif de culture, voilà le rôle fondamental de BAnQ.

Mais pour garantir la pérennité que méritent ces efforts, il faut des ressources humaines, matérielles et financières dont la masse critique progresse au rythme des coûts et des besoins des clientèles. Simple, mais pas facile à réaliser. Il importe de pouvoir constater une réelle progression de ces ressources au fil des ans sans quoi les efforts investis demeurent en bord de route.

Il n’est pas tout de vouloir, il faut pouvoir et agir. Où en est-on à BAnQ quant à cette progression essentielle de ressources récurrentes, c’est-à-dire celles qui s’ajoutent chaque année pour poursuivre son développement, pour pouvoir et agir ? Il eut été intéressant d’aborder cette question qui nous semble être centrale dans l’évolution de l’institution.

Aide ponctuelle ou ressources pérennes ?

On nous rassure en évoquant les « subventions » dont bénéficie BAnQ pour des projets comme la numérisation. Fort bien ! Mais entendons-nous bien, on parle alors d’une aide ponctuelle qui n’est pas assurée dans le temps. Et cela nous amène à notre point de l’intérêt que nos décideurs portent à cette institution. Cette aide, toute intéressante soit elle, n’est pas le signe d’une juste reconnaissance par les autorités du rôle irremplaçable que joue BAnQ dans la mise à disposition de la culture.

Ce faisant, le décideur ne s’engage pas à développer, à pérenniser, il ne répond qu’à une demande ponctuelle en sachant bien qu’il pourra toujours regarder ailleurs quand bon lui semblera.

Nous aurions voulu voir dans ce bilan le degré de progression qu’a connu BAnQ ces dernières années, sentir l’intérêt que lui portent nos décideurs politiques. Bref, où se situe cette institution parmi les priorités de notre gouvernement ?

Et qu’on le veuille ou non, ce qui nous permet de juger de ce fait, c’est toujours les ressources pérennes qu’on attribue à l’institution, l’attention que le décideur accorde aux dossiers qu’elle porte. Un exemple : comment se fait-il que, malgré les efforts répétés de la direction de BAnQ, on ne réussisse pas à convaincre les autorités de se préoccuper davantage du site de la Grande Bibliothèque en laissant libre cours à la volonté d’Hydro-Québec d’y construire un véritable bunker2 ?

Autre exemple : l’archiviste que je suis aurait apprécié savoir où en est l’avancement de la modernisation de la Loi sur les archives qui, rappelons-le, date de 1983, soit au temps du papier et du disque souple. BAnQ a-t-elle pu faire reconnaître cette priorité par le décideur politique pour enfin mettre en dessus de pile la révision tant attendue d’une loi qui ne répond plus au quotidien des administrations définitivement passées au numérique et à l’intelligence artificielle ? Il en va pourtant de l’avenir du patrimoine québécois.

En terminant, on le comprend, le développement de BAnQ est directement lié à l’attention que lui porte le gouvernement et nous souhaitons sincèrement que la direction de cette institution bénéficie d’une écoute attentive et intéressée des décideurs.

1. Lisez « Grande entrevue avec Marie Grégoire – Prendre soin des livres… et des humains »  2. Lisez « Poste électrique au centre-ville – Montréal lève un premier obstacle » Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue