Chères lectrices, chers lecteurs,

Après m’être attardé aux récents sondages de l’Office québécois de la langue française et aux arguments des partis souverainistes et de la CAQ, je vous propose une nouvelle façon d’aborder la francisation à l’ère de la modernité.

Ainsi, je vous rappelle que lors de l’arrivée des calculatrices portables à la fin des années  1970 et au début des années 1980, nous avons eu un débat pour savoir à quelle année scolaire il devenait plus avantageux de permettre aux élèves d’utiliser cet outil de calcul lors des examens de mathématiques et de sciences.

Les tenants de l’antiquité ont perdu le débat, car les élèves pouvaient maintenant passer plus de temps à comprendre les calculs plutôt que d’en perdre à les faire eux-mêmes.

Il y a eu un gain sur la complexité des concepts compris par les élèves, et donc on pouvait, par exemple, apprendre le calcul différentiel et intégral avant l’université.

L’apprentissage du français au Québec a selon moi atteint un plateau, voire a régressé, parce que nous ne pouvons plus mettre 50 % de notre temps sur les bancs d’école à apprendre cette langue que seuls quelques spécialistes maîtrisent parfaitement.

Les autres matières – notamment des nouvelles, comme l’informatique – nous obligent maintenant à réduire le temps consacré au français pour demeurer compétitifs sur la scène internationale.

Une pensée pour les postdoctorants roumains

Aussi, comme les outils de correction orthographique et grammaticale s’améliorent et sont même gratuits pour certains, je crois qu’il devient impératif de permettre aux élèves et aux immigrants d’en utiliser certains tout comme nous nous servons d’une calculatrice.

Il est bien plus important de savoir construire des phrases et accorder les verbes, les noms et les adjectifs que de savoir par cœur que « trompette » prend un « p » et finit avec « tte ». Les correcteurs vous corrigeront peut-être les trois premières fois que vous taperez ce mot, mais si vous l’écrivez souvent, vous finirez par l’écrire sans erreur.

Le but premier étant désormais de faciliter l’usage pour gagner des adeptes. Pas de décourager un postdoctorant en géophysique originaire de Roumanie. Si l’usage devient plus facile et que plus de gens s’intéressent à utiliser notre langue comme langue d’adoption, après quelques années, les statistiques seront sans doute beaucoup plus positives.

Et si nous ne gaspillions plus six ans de scolarité pour apprendre par cœur le verbe aimer à des temps qui ne sont pratiquement plus utilisés, nous aurions sans doute plus de temps pour faire découvrir des pans entiers de notre langue qui sont actuellement boudés par les non-francophones.

Plus de temps pour étudier les grands auteurs, les compositeurs de chansons de renom, le théâtre et le cinéma de langue française.

C’est en faisant découvrir des œuvres en français plutôt qu’en forçant l’apprentissage du vocabulaire et des verbes par cœur que nous aurons des chances de voir les gens « vivre » un peu plus en français. Une langue, ce n’est pas uniquement des mots, c’est une grande partie d’une culture d’un peuple. Si personne ne lit plus Le torrent ou ne regarde plus La grande séduction, notre langue deviendra morte non pas parce que personne ne l’apprend, mais parce que plus personne ne la vit.

Si nous voulons attirer des adeptes à vivre notre culture, il nous faut d’abord la changer pour la rendre plus accessible.

*Auteur de Sur les traces de Greta

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