La 77e Assemblée mondiale de l’OMS prend fin et les États membres n’ont pas pu s’entendre sur un texte final de traité pandémique.

Depuis plus de deux ans, après l’impact dévastateur de la COVID-19 à l’échelle mondiale, notamment en ce qui a trait aux décès directs (6,9 millions) et à l’excès de mortalité pendant la pandémie (14,6 millions), la contraction économique mondiale, la perte de moyens de subsistance de différents groupes communautaires, les 194 États membres de l’Assemblée mondiale de la santé ont été à pied d’œuvre pour négocier un traité pandémique.

Pourquoi avons-nous besoin d’un traité pandémique ? Un traité pandémique permettrait de s’entendre sur une réponse collective à une menace pandémique en termes de surveillance, de préparation et de riposte pour éviter entre autres l’iniquité sur l’accès aux contre-mesures médicales (traitement, protection, vaccins, diagnostics).

En bref, nous aspirons à un accord ancré dans des principes de solidarité et d’équité. Pour rappel, le Canada a été un des plus grands accapareurs de vaccins (une moyenne de cinq par Canadien) et a partagé tardivement son surplus avec des dates de péremption imminentes.

Qu’est-ce qui achoppe dans les négociations ? Il y a trois grands points de tension.

1. La surveillance avec « Une approche en santé » (« One Health ») où le monitorage de nouveaux agents infectieux émergents se fait aux niveaux tant animal qu’humain et leurs écosystèmes. En ce moment, la transmission zoonotique du H5N1 chez les vaches aux États-Unis illustre parfaitement ce besoin de surveillance accrue pour éviter une pandémie de grippe aviaire. Vu la pression que nous exerçons sur les écosystèmes, les sauts d’espèce de virus d’animaux aux humains sont une menace constante.

2. Le partage des informations sur les pathogènes nouvellement identifiés (séquence génomique) par un pays et l’éventuel accès aux outils pour combattre l’infection. Les pays à bas et moyens revenus veulent s’assurer que s’ils partagent cette information, ils auront accès à une partie des outils. Actuellement, on ne s’entend pas sur une modalité de partage garanti qui se traduirait par un pourcentage prénégocié de la production de ces outils auprès des industries pharmaceutiques.

3. Le transfert de technologie et de savoir-faire sur la biofabrication des contre-mesures médicales requiert soit une levée de la propriété intellectuelle ou au minimum une flexibilité sur celle-ci en temps de pandémie. C’est l’idée de considérer ces outils comme des biens communs et de permettre leur production sans obstacle par tous. Car s’il n’y a pas un esprit de solidarité, il faudrait au moins permettre l’autonomie de fabrication.

Que faire pour faire avancer le processus ?

S’arrêter ou continuer. Si on continue, avec quels objectifs, avec quel chronogramme ? Est-ce que plus de temps va permettre d’aligner des visions diamétralement opposées entre les pays à bas et moyens revenus comparativement aux pays riches ? La question demeure entière, et vu les tensions géopolitiques de l’heure, il y a des raisons de s’inquiéter. Cela dit, nous ne pouvons pas attendre qu’un traité pandémique soit négocié pour nous préparer, sachant aussi qu’il faudrait que 60 États membres le ratifient pour qu’il soit en vigueur.

Entre-temps, les efforts de développement de pôles de recherche et développement en vaccins dans les pays à bas et moyens revenus doivent se poursuivre et être financés pour une autonomie éventuelle.

Et on croise les doigts pour que d’ici la fin de l’assemblée, les amendements sur le Règlement sanitaire international soient adoptés. Une adoption permettrait d’accélérer les étapes de déclaration, d’investigation et d’alerte d’une urgence de santé publique de portée internationale en évitant de créer des entraves inutiles au trafic et au commerce internationaux. C’est l’instrument juridique sanitaire international déjà existant, bonifions-le le plus possible en attendant que nous ayons la sagesse et la volonté politique de nous entendre pour une sécurité sanitaire pour tous. Car les pandémies sont un choix politique : nous ne pouvons pas prévenir l’émergence des éclosions et des épidémies locales, mais nous pouvons prévenir qu’elles deviennent des pandémies.

1. Consultez le Règlement sanitaire international Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue