Nous vous avons demandé ce que vous inspire la Saint-Jean, quels spectacles vous ont marqués et comment vous célébrez cette fête. Voici quelques-uns de vos souvenirs.

Gens du pays

PHOTO JEAN GOUPIL, ARCHIVES LA PRESSE

Les fêtes de la Saint-Jean sur le mont Royal, ici en 1976, ont particulièrement marqué les lecteurs qui les ont connues.

Sans hésitation, la Saint-Jean sur le mont Royal avec, entre autres, Lise Payette qui a proposé l’air de la chanson Gens du pays pour chanter bon anniversaire à ceux qu’on aime. Depuis ce soir-là, les Québécois chantent fidèlement « Mon cher […], c’est à ton tour de te laisser parler d’amour ». C’est touchant et on est loin du « Happy birthday to you ! »

Micheline Rivet, Laval

Le début d’une longue histoire !

PHOTO RENÉ PICARD, ARCHIVES LA PRESSE

Fête de la Saint-Jean-Baptiste sur le mont Royal, le 24 juin 1975, avec Ghislaine Paradis, Véronique Béliveau, Emmanuelle, Jean-Pierre Ferland, Lucille Dumont, Ginette Reno, Shirley Théroux, Renée Claude, France Castel, Christine Chartrand et Andrée Boucher. Lise Payette en était l’organisatrice.

Durant la nuit du 21 au 22 juin 1975, je déambulais avec deux amis sur le mont Royal à travers l’immense marée humaine. Un évènement unique à l’époque. C’est alors qu’un de mes amis a trébuché sur une demoiselle assise au sol. Pendant que nous offrons des excuses, une amie de cette fille me regarde et me dit : « Tu allais au cégep de Rosemont, toi ! » Depuis deux ans, effectivement, et je venais de terminer mes études. Parle, parle, jase, jase… Nous avons fini par passer la nuit ensemble. Nous quittant le matin pour rentrer chez nos parents, on se donne rendez-vous sur la montagne pour le soir. Ce qui est arrivé. Ce fut le début d’une histoire extraordinaire qui continue aujourd’hui, alors que nous fêtons notre 49e anniversaire de rencontre.

Pierre Levert, Montréal

Francophonies

Nous sommes en 1992, année du référendum sur l’accord de Charlottetown. Nous sommes à la Saint-Jean du côté d’Ottawa, car le festival franco-ontarien de l’époque fête la Saint-Jean, fête de tous les francophones du Canada. Nous sommes au parc Major avec vue sur le parlement. Il s’agit déjà d’un contexte très spécial. Sur la scène, Michel Rivard chante La complainte du phoque en Alaska. De grands drapeaux franco-canadiens (Ontario, Manitoba, Québec, acadiens, etc.) flottent au vent. Je regarde un ami français nouvellement arrivé au Québec, il pleure tellement l’émotion est vive. C’était magique.

Francis Nappert, Laval

Le cœur en fleur de lys

Mon plus beau souvenir de la fête nationale, c’est l’année où on a loué une chambre en dortoir dans une auberge de jeunesse du Vieux-Québec, et qu’on a dansé pendant des heures sous la pluie battante sur les Plaines sur les airs technos emballants et hilarants d’Omnikrom et de mille autres artistes qui nous rendent fiers d’être québécois. Nous étions détrempés, les pieds en compote, le cœur en fleur de lys.

Elizabeth Beland, Lachine

Quelque chose de grand

Le plus marquant, et de loin, c’est la célébration de la Saint-Jean à l’île Sainte-Hélène en 1990. L’accord du lac Meech était mort la veille, Jacques Parizeau avait traversé la Chambre pour féliciter Robert Bourassa en lui disant « Mon premier ministre »… Le 24 juin, Jean Duceppe avait fait un discours incroyable, et l’énergie et la fierté étaient palpables dans toute la foule sur l’île, le sentiment d’appartenance à quelque chose de grand est resté gravé en moi pour toujours…

Christian Paré, Saint-Alphonse-de-Granby

La communion

PHOTO JEAN GOUPIL, ARCHIVES LA PRESSE

Immense foule pour le spectacle de la Saint-Jean-Baptiste sur le mont Royal en 1976

1976, j’ai 18 ans, on habite la Rive-Sud de Québec. J’obtiens finalement l’autorisation d’aller à Montréal pour le show sur la montagne. Émancipation… toutes sortes de souvenirs, l’odeur du pot, les couples « cachés » dans un bosquet, mais surtout cette atmosphère de fête, de liberté. La communion de tout ce monde, nous connaissions toutes les chansons, vraiment de très beaux souvenirs.

Suzie LeBlanc, McMasterville

Québécoise pure soie

Accroché à la porte de l’autobus Côte-des-Neiges, mon cousin Long tentait de me pousser vers l’intérieur. Le chauffeur de bonne humeur devant tant d’adresse nous a lancé à la blague : « Cramponnez-vous, direct au mont Royal et bonne Saint-Jean ! » C’était le début de la soirée. Une mer de monde envahissait déjà les pentes. Des couvertures, des sacs de couchage comme des patchwork tapissaient les terrains. Dans les arbres, des énergumènes s’étaient installés sur des branches. Et moi, en compagnie de mon cousin et de ses amis, je regardais émerveillée ces milliers de personnes en parfaite symbiose qui chantaient à l’unisson les refrains. J’ignorais qui étaient ces musiciens, je ne connaissais pas leur musique, mais je dodelinais quand même de la tête, ma façon de me joindre à la fête, de partager la paix. Pour la première fois de ma vie, je goûtais à ce bonheur à la fois bruyant et paisible. Et j’ai su exactement à ce moment-là que je voulais vivre ici avec cette joie, cette insouciance qui envahissait chaque parcelle de mon corps. C’est à ce moment, devant cette vague d’amour, que j’ai voulu être québécoise et faire partie de ce peuple. Bâtir. Un peu plus d’un mois avant, nous étions sur un bateau à la dérive dans les eaux tumultueuses de l’océan, ne sachant si nous allions survivre à cette traversée… Le 16 mai 1975, je suis arrivée en tant que réfugiée apatride, puis de néo-Québécoise je suis devenue Québécoise pure soie. Bonne Saint-Jean !

Viet-Hue Duong, Montréal