Samedi soir, lors d’un spectacle imaginé par plusieurs de ses camarades, Oliver Jones soufflera ses 90 bougies, une marque qu’il n’atteindra officiellement que le 11 septembre, mais que le Festival international de jazz aurait été irrespectueux de ne pas tout de suite souligner. Ses amis la pianiste Lorraine Desmarais et le batteur Jim Doxas racontent l’œuvre d’un des géants du jazz montréalais à travers cinq albums essentiels.

Just In Time (1998)

Just In Time

Just In Time

Oliver Jones

Justin Time

Oliver Jones a de tout temps été comparé à son mentor, Oscar Peterson. « Mais Oliver Jones s’est fait son propre langage pianistique, observe Lorraine Desmarais. Tu le reconnais tout de suite dans ses tournures de phrase, dans son jeu qui est presque mozartien, dans sa manière d’effleurer les notes durant ses improvisations, de ne jamais être agressif. Ça coule de source, c’est fluide, c’est délicat. » Enregistré en trio au Montreal Bistro de Toronto les 20 et 21 novembre 1997, avec un des contrebassistes historiques d’Oscar Peterson, le Canadien Dave Young, cet album double contient une pièce commandée par Oliver à son amie Lorraine, Odalisque. « C’est un de ces albums qui te donnent l’impression d’être avec eux dans le club », ajoute le batteur Jim Doxas, qui a accompagné Mister Jones durant une douzaine d’années, jusqu’à sa retraite en 2016. « Après un an de tournée, il m’a dit : “C’est OK, tu peux m’appeler Oliver.” »

Extrait d’Odalisque
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Have Fingers, Will Travel (1997)

Have Fingers, Will Travel

Have Fingers, Will Travel

Oliver Jones

Justin Time

« Oliver est un pianiste fantastique, il joue à un haut niveau, mais de son propre aveu, il n’est pas Oscar Peterson, explique Jim Doxas. La comparaison n’est pas juste, parce qu’Oscar Peterson a été touché par les dieux. Mais ce qui distingue Oliver, ce qui est magique, c’est comment toutes les personnes dans une salle, à la fin d’un spectacle, vont avoir l’impression qu’il a joué juste pour elles. Je comprends les gammes et les accords, mais ça, c’est encore un mystère pour moi. » « Et cet album swingue d’une manière qui témoigne d’à quel point il était à l’aise. Je l’écoute et je vois son grand sourire, poursuit-il. On sent bien la matière qu’il tire de sa section rythmique. » Section rythmique au sein de laquelle figurait, à la contrebasse, l’Américain Ray Brown, célèbre pour son apport à l’œuvre d’Ella Fitzgerald et, encore une fois, d’Oscar Peterson.

Extrait de D.B.G. Blues
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From Lush to Lively (1995)

From Lush to Lively

From Lush to Lively

Oliver Jones

Justin Time

Lorsque Lorraine Desmarais a rencontré Oliver Jones, au début des années 1980, ils jouaient tous les deux du piano cocktail à différents étages de l’hôtel Four Seasons, au centre-ville de Montréal. « Pendant ma pause, j’allais écouter Oliver, et pendant sa pause, il venait m’écouter. C’est comme ça qu’on a noué une belle complicité. » Peu d’albums évoquent autant l’élégance du bar d’un hôtel de luxe que From Lush to Lively, enregistré avec un big band et un orchestre à cordes, sous la direction de l’important arrangeur canadien Rick Wilkins. « Le son est hyper chaleureux, souligne Jim Doxas. C’est comme de la soie. » Jones y met à sa main plusieurs compositions d’Oscar Peterson. « Quand il était enfant, rappelle Doxas, Oliver s’assoyait devant chez Oscar et l’écoutait jouer par la fenêtre, comme un petit frère fasciné par ce que fait son grand frère. »

Extrait de Why Think About Tomorrow
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Live in Baden Switzerland (2011)

Live in Baden Switzerland

Live in Baden Switzerland

Oliver Jones

Justin Time

Durant tout son passage au sein du groupe d’Oliver Jones, Jim Doxas n’a jamais reçu de listes de pièces au programme ce soir-là, en amont d’un spectacle. « “Comment je pourrais avoir un setlist, si je ne connais pas l’énergie de la foule ?” C’est ce qu’il nous disait et je dois avouer que c’était super stressant au début. Il pouvait parfois jouer les mêmes pièces de soir en soir, se souvient Doxas, mais dans des tonalités différentes. Ça dépendait toujours d’où ses mains atterrissaient sur le piano. Il essayait de trouver un équilibre entre ce qu’il voulait jouer et ce que la foule voulait entendre. » Cet album enregistré en Suisse en 1990, sur lequel brillent deux pointures du jazz américain (le contrebassiste Reggie Johnson et le batteur Ed Thigpen), compte aussi parmi les favoris de Lorraine Desmarais. « On sent qu’Oliver joue sans aucun filtre. »

Extrait de Hymn to Freedom
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Yuletide Swing (1994)

Yuletide Swing

Yuletide Swing

Oliver Jones

Justin Time

« Le mot qui décrit le mieux Oliver Jones, c’est “élégance”, et on entend toute son élégance là-dessus », se réjouit Lorraine Desmarais au sujet de cet album de classiques du temps des Fêtes, un des rares disques de Noël à contenir le juste dosage de sucre. Pour Jim Doxas, il fallait absolument saisir le prétexte du 90anniversaire de son élégant ancien patron. « On est chanceux qu’Oliver soit encore avec nous, alors on a pensé : pourquoi ne pas lui dire tout de suite qu’on l’aime », confie celui qui a eu l’idée de ce concert hommage avec Celine Peterson, fille d’Oscar et filleule d’Oliver. Quant au principal intéressé, qui devrait être présent samedi, il garde la forme, assure Doxas, malgré son âge proverbialement vénérable. « Je suis allé chez lui il y a quelques semaines et on a regardé une belle heure du US Open de golf ensemble. »

Extrait de Winter Wonderland
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Oliver Jones at 90 : A Celebration with Friends, samedi 6 juillet, 21 h, au Théâtre Jean-Duceppe

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