Le rappeur étonne, pour le meilleur et pour le moins bon, avec son spectacle de flûte new age à la salle Wilfrid-Pelletier.

Soyons honnêtes, on n’avait pas été très impressionné par New Blue Sun, son album de flûte nouvel âge paru l’an dernier. Si la démarche était louable, on ne peut pas dire que le résultat était très convaincant, pour le dire poliment.

Autant dire qu’on n’avait pas de grandes attentes pour la version spectacle de ce disque introspectif, offerte dimanche soir à la salle Wilfrid-Pelletier par le rappeur André 3000. Notre seule certitude est que le Festival de jazz prenait un gros risque en le programmant à « heure de grande écoute » et dans une grosse salle de surcroît.

(Re)lisez notre article « Festival de jazz : le nouveau souffle de la flûte »

Est-ce qu’on a été surpris ? Difficile à dire. Le show d’André 3000 est un ovni musical qu’on ne sait trop comment évaluer.

Vêtu de son éternelle salopette à rayures, de son bonnet et de ses lunettes de designer funky, l’ancien membre du populaire groupe Outkast est arrivé sur scène avec ses flûtes de bambou et quatre musiciens, dont le percussionniste/producteur Carlos Nino, qui a joué un rôle non négligeable dans la nouvelle direction musicale d’André 3000.

Dès les premières mesures, on a compris que le concert serait moins mollo que l’album. Plus bruitiste que new age, le groupe s’est lancé dans une improvisation aux relents free jazz et psychédéliques que n’aurait pas reniée Pink Floyd à Pompéi. Le flûtiste s’est ensuite présenté, prenant bien soin de remercier le public pour son apport énergétique, indispensable dans cette expérience collective.

Donnons crédit à André 3000 et à son groupe de savoir créer des ambiances. Pendant une grosse partie du spectacle, on se serait cru au fin fond d’une jungle équatorienne, impression renforcée par des bruits d’oiseaux et les instruments à vent d’André, flûtes de cultures diverses sorties du bush ou de l’époque précolombienne.

L’atmosphère, parfois contemplative, parfois plus chaotique, était renforcée par un jeu d’éclairages actif, avec rayons mauves, lumières bleutées et flashes stroboscopiques occasionnels, qui nous projetaient tantôt au pied d’un volcan, tantôt dans un salon de massage.

Musicalement, c’était un peu moins concluant. André 3000 a certes le courage de s’écarter des sentiers battus et on ne peut qu’applaudir son audace, qui force le respect, sinon l’admiration. Mais l’ex-rappeur n’est ni Yusef Lateef, ni Max Cilla, ni Hariprasad Chaurasia et on est loin d’être certains que son talent de flûtiste soit à la hauteur de ses aspirations artistiques.

Pour le dire autrement, on a un peu l’impression que notre homme s’égare par moments, et que ses explorations musicales ne mènent pas à grand-chose. Malgré les percussions exotiques, les nappes de claviers, le vernis spirituel, il manque encore quelque chose, appelons ça une forme de transcendance.

On n’est apparemment pas les seuls à être restés perplexes devant ces explorations absolument non commerciales. Devant nous, quelques dizaines de personnes ont quitté la salle de façon successive pendant le concert, possiblement déconcertées, sinon déçues.

Le reste du public semble en revanche avoir parfaitement apprécié ce spectacle somme toute relativement court – et sans rappel – qui s’est terminé par un puissant magma sonore, semblable à celui qui avait ouvert la soirée. André 3000 a d’ailleurs bien fait rire l’auditoire, en parlant dans une langue mystique qui n’était finalement que du charabia.

Bref, du meilleur et du moins bon. Mais surtout, une étonnante proposition, qui pourrait faire des petits. Malgré ses défauts, et son intérêt somme toute relatif, le projet flûte d’André 3000 demeure un bel exemple de risque artistique et une potentielle source d’inspiration pour d’autres rappeurs vieillissants qui chercheraient une porte de sortie pour se renouveler.