Pour clore les Francos en beauté, on a misé sur le R&B… et sur Corneille. Ce dernier a été le maître de cérémonie (et le plat principal) d’une soirée réunissant une dizaine d’artistes, une étincelante chorale et un band renversant, qui ont ensemble fait honneur au R&B francophone et, surtout, fait beaucoup danser la place des Festivals, entre nostalgie et découverte.

Après une introduction vidéo qui a bien mis la table, présentant des pionniers du R&B du Québec, Corneille a été le premier à monter sur la scène Bell, devant un parterre plein. « Le R&B a influencé tellement de genres musicaux. Et il a son histoire ici aussi. Le R&B a aussi son avenir ici, en français », a-t-il dit en remerciant la foule de sa présence.

Pour ce spectacle à grand déploiement, on n’a pas opté pour une montée tout en crescendo. On a plutôt tout donné dès le début. Il y a eu des hauts et des bas, mais commencer avec Corneille allait de soi. Il a interprété cinq chansons, débutant avec Ensemble, permettant à la fabuleuse chorale Deevine de tout de suite animer de son talent le concert. Tout le monde a suivi, puis Notre année, Le bonheur et Avec classe.

La chanteuse algéro-canadienne Zaho a été la suivante sur la grande scène des Francos. « [Une Montréalaise] qui a donné envie à toute une génération de faire du R&B », a affirmé Corneille pour la présenter. Celle qui a fait le buzz en 2008, au Québec, mais également en France, avec la pièce C’est chelou, a amorcé son numéro avec une version bonifiée (par le groupe de nombreux musiciens et cette superbe chorale qui a rendu tout le spectacle bien plus captivant) de cette chanson que bien des festivaliers ont entonnée en chœur. Ont suivi la ballade Je te promets (avec des danseuses qu’on a souvent retrouvées pendant le spectacle), Tourner la page, puis Hold My Hand, morceau de Sean Paul sur lequel Zaho a chanté pour la version remixée, il y a de cela près de 15 ans.

YellowStraps, duo belge de néo-soul et de R&B, est venu apporter un peu plus de modernité dans le spectacle qui jusque-là avait plutôt misé sur la nostalgie.

Slowdown, sa chanson parue cette année, a tout de suite eu son effet sur la foule attentive à la voix séduisante du meneur. Blue puis Merci ont complété le segment de YellowStraps qui a un peu moins soulevé la foule.

Fierté montréalaise

On a continué avec la nouvelle génération R&B avec les prodigieux membres de Rau_Ze, duo québécois promis à quelque chose de grand. Malheureusement, Rau_Ze n’a pu présenter qu’une seule pièce, son succès L’habitude. On en aurait souhaité davantage, d’autant que d’autres se sont vu accorder des segments qu’on aurait aisément pu raccourcir…

Corneille, animateur de la soirée, est souvent intervenu pour raconter à la foule ce qui lui plaît dans son genre musical de prédilection.

PHOTO BENOIT ROUSSEAU, FOURNIE PAR LES FRANCOS

Corneille

Le R&B, c’est l’amour et la douceur, [qui devient] une puissance. Une puissance surtout dans les voix de ceux et celles qui le chantent.

Corneille

La présentation était tout appropriée pour l’ancien choriste de Céline Dion Barnev, dont le premier album solo est paru récemment. On a ainsi été à même de comprendre pourquoi il tenait tant à se lancer et à voler de ses propres ailes.

La soul habite manifestement le chanteur, qui a justement amorcé son numéro avec la chanson Soul pleureur. Quelque chose about you, ensuite, a montré ce que l’on peut faire lorsqu’on se permet de faire cohabiter l’anglais et le français dans le R&B. Barnev a conclu avec J’essaye d’oublier, que le public a entonnée avec lui de bon cœur.

PHOTO BENOIT ROUSSEAU, FOURNIE PAR LES FRANCOS

Barnev

Le Kanda Gang est alors montée sur scène. Encore peu connu, cet attachant groupe de chanteurs a présenté sa chanson Première classe et a probablement pu ainsi s’attacher de nouveaux admirateurs parmi les festivaliers. Ce spectacle était une histoire de famille, ça s’est senti : deux des membres de Kanda Gang étaient d’ailleurs l’un finaliste, l’autre demi-finaliste à La voix… dans l’équipe de Corneille.

Finir en beauté

Nouveau coup de cœur ensuite : la Montréalaise d’origine haïtienne Shah Frank a été sublime. Interprétant Étage SouterReine, elle a projeté sur la place des Festivals sa voix envoûtante, accompagnée par le généreux house band. Un pépin technique (une question de son sur la scène, peut-être), apparemment, ne lui a malheureusement pas permis d’être aussi impeccable sur sa seconde chanson, Shahkra.

Mais pourquoi se contenter d’une des sœurs Frank lorsqu’on peut avoir les deux dans le même spectacle ? Naïma Frank a succédé à sa sœur sur scène, présentant La reine et Danse avec moi, mettant à son tour le public dans sa poche grâce à sa voix et son énergie.

Les Louanges, juste après, a permis de prolonger l’un des meilleurs segments du spectacle. « Les artistes ont parfois une personnalité tellement forte qu’on n’arrive pas à les caser. Savez-vous qu’il est lui aussi un fier membre de la famille R&B ? » Les Louanges a commencé avec Pitou, l’une de ses chansons qui font comprendre qu’il a su amener quelque chose de nouveau à la musique contemporaine québécoise, un son qui ne ressemble qu’à lui. YellowStraps est ensuite remonté sur scène pour l’accompagner sur Qu’est-ce que tu m’fais.

Il a finalement interprété son succès Crash, permettant à Corneille de se joindre à lui sur ce duo qui figure sur le dernier album des Louanges.

Le Français Vacra a eu à son tour son moment pour briller, faisant découvrir sa voix unique (enjolivée – peut-être un peu trop – à l’autotune) au public montréalais. Il a débuté sur Plan séquence, chanson qui l’a fait connaître en 2021. Le chanteur a enchaîné avec Agent secret et a terminé avec Tiki Taka, autre gros succès (surtout auprès de la communauté française), sa voix androgyne divertissant une dernière fois la foule.

Retour à nos fiertés locales ensuite, avec Naomi. La chanteuse et danseuse n’a pas fait les choses à moitié, présentant un numéro énergique, avec ses chansons Zéro stress et Phénomène, elle aussi entourée des danseuses. Nouvelle star de ce R&B que l’on a célébré samedi soir, Naomi a été rayonnante.

Tous les artistes se sont réunis pour un moment que l’on aurait pu prévoir, mais qui n’a tout de même pas déçu. Ils ont chanté en chœur Parce qu’on vient de loin, un choix aussi évident qu’il a été sympathique à vivre (malgré, là encore, quelques problèmes de son). Cette douce et dansante soirée a été une belle fin pour ces Francos, qui se terminaient samedi.