Le tranchant Bill Orcutt se produira en quartet, samedi à Victoriaville, pour un concert qui s’annonce décapant et hypnotisant

Jimi Hendrix mène à tout… même à la musique expérimentale.

Parlez-en au guitariste Bill Orcutt, qui se produit samedi avec son quartet au 40Festival de musique actuelle de Victoriaville.

Orcutt, 62 ans, a découvert Hendrix à l’adolescence, sur le petit tourne-disque que lui avaient acheté ses parents. Ce fut une révélation. Marqué à jamais, il s’est acheté une guitare électrique peu de temps après et a fondé ses premiers groupes rock.

PHOTO TIRÉE DE YOUTUBE, FOURNIE PAR BILL ORCUTT

Le Bill Orcutt Guitar Quartet. De gauche à droite : Shane Parish, Ava Mendoza, Wendy Eisenberg et Bill Orcutt

« Jimi Hendrix représente beaucoup pour moi. À mon sens, il n’y a personne d’autre », résume le musicien à la barbe blanche, joint chez lui à San Francisco.

Quarante-cinq ans plus tard, Bill Orcutt n’est pas devenu un guitar hero comme son idole. Mais il s’est certainement imposé comme l’un des guitaristes les plus intéressants de l’avant-garde made in USA.

Révélé au sein du groupe punk hardcore Harry Pussy dans les années 1990, Orcutt s’est progressivement transformé en une sorte de sorcier de la guitare improvisée, avec son mélange très personnel de rock, de folk et de blues tordu, parfois acoustique, parfois électrique.

Au-delà de la niche

Sa démarche radicale ne s’adresse pas d’emblée au grand public. Jusqu’ici, Orcutt s’est surtout fait un nom dans les réseaux parallèles. Mais à sa grande surprise, le projet de « Guitar Quartet », qu’il présentera samedi à Victoriaville, semble vouloir rayonner au-delà du public « de niche ». « Il y a plus de gens dans les salles, souligne-t-il. C’est le truc le plus populaire que j’ai jamais fait. Je n’aurais jamais cru ça quand j’ai enregistré l’album Music for Four Guitars, mais c’est comme ça que ça a tourné. »

Orcutt ne saurait mettre le doigt sur l’exacte raison de ce succès. Mais le fait que les pièces soient « très structurées », et qu’on y retrouve des « éléments de rock », permet au public d’avoir « un peu plus de prise » sur la musique, dit-il.

Le Guitar Quartet a en effet un côté rock, mais pas que. Les motifs de guitare en boucle se superposent ou s’entremêlent, formant un canevas musical hypnotisant proche de la musique répétitive. Les instruments ont un son tranchant comme des lames de rasoir. Le résultat est à la fois décapant et hypercontrôlé.

PHOTO LINDA CHI, FOURNIE PAR LE FIMAV

Bill Orcutt

Je vois cela comme un mélange entre l’album In C du compositeur Terry Riley et la chanson Sister Ray, du Velvet Underground !

Bill Orcutt

Bill Orcutt a souvent utilisé la guitare acoustique dans le passé, mais pour ce projet en particulier, il lui semblait impératif d’utiliser des guitares électriques parce qu’elles « ont un son plus insistant et ne peuvent pas être ignorées », dit-il. « C’était un choix conscient pour moi d’avoir ce côté plus aigu et plus pointu, dit-il. J’ai beaucoup pensé aux guitares aiguisées du Captain Beefheart, qui a assurément été une autre référence pour moi. Alors c’est la direction que j’ai prise. »

Sans la ni ré

Difficile, enfin, de ne pas questionner Bill Orcutt sur l’une de ses marques de commerce, à savoir l’absence de cordes de la et de ré sur son instrument. Cette originalité lui est venue de manière « accidentelle » dans les années 1980 et il n’en a jamais dévié depuis, explique-t-il. « C’est devenu une partie de qui je suis. »

Quelle incidence cela a-t-il sur sa musique ?

Cela change le son, comme si c’était une pédale à effet. Ça devient un truc plus percussif. Et ça rend plus difficile de jouer de la guitare rythmique !

Bill Orcutt

Le musicien signale cependant qu’il n’est pas le premier à jouer la sorte, citant entre autres le guitariste des B52’s, Ricky Wilson, qui avait l’habitude de retirer ses cordes de ré et de sol.

Intéressant : Orcutt a également imposé cette contrainte aux trois guitaristes qui l’accompagnent sur scène, question de rendre le tout plus cohérent. « Je voulais qu’ils jouent avec quatre cordes pour entrer dans mon univers. Et parce que visuellement, ça provoque chez les gens les mêmes questions que tu me poses aujourd’hui. C’est intrigant, bizarre, et j’aime ça », souligne-t-il.

Orcutt précise que le concert sera constitué à 50 % de musique écrite et à 50 % d’improvisation et que son Guitar Quartet sera complété par Wendy Eisenberg, Ava Mendoza et Shane Parish.

Avis aux amateurs de rock radical : ce 40festival propose aussi un concert du trio Bazip Zeehok, avec G. W. Sok, ancien chanteur du groupe punk expérimental néerlandais The Ex (le vendredi 17 mai, minuit, Centre des congrès) et la performance « arabopsychédélique » des Dwarves of East Agouza, composés du guitariste montréalais Sam Shalabi, de l’Égyptien Maurice Louca (claviers, rythmes) et de l’Américain Alan Bishop (basse, saxo) samedi à minuit au Centre des congrès.

Bill Orcutt Guitar Quartet, samedi 18 mai, 17 h, Centre des congrès de Victoriaville

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