(Mayville) L’homme du New Jersey accusé d’avoir poignardé à plusieurs reprises l’auteur Salman Rushdie n’est pas intéressé par une proposition d’accord avec les procureurs qui réduirait sa peine en prison d’État, mais l’exposerait à une prison fédérale pour une accusation distincte liée au terrorisme, a déclaré mardi son avocat.

Hadi Matar, 26 ans, était assis en silence au tribunal du comté de Chautauqua tandis que des avocats présentaient une proposition qui, selon eux, avait été élaborée entre les procureurs de l’État et fédéraux et acceptée par Salman Rushdie au cours des derniers mois.

L’accord obligerait Matar à plaider coupable dans le comté de Chautauqua pour tentative de meurtre en échange d’une peine de prison maximale de 20 ans, contre 25 ans auparavant. Il plaiderait alors également coupable d’une accusation fédérale non encore déposée pour tentative de fournir un soutien matériel à une organisation terroriste désignée, ce qui pourrait entraîner une peine de 20 ans supplémentaire, ont indiqué les avocats.

Matar, qui a plaidé non coupable, est détenu sans caution depuis son arrestation en 2022 après que les procureurs ont déclaré qu’il avait attaqué M. Rushdie alors que l’écrivain s’apprêtait à s’adresser à un public à l’établissement Chautauqua, dans l’ouest de New York. Salman Rushdie a perdu un œil. Le modérateur Henry Reese a également été blessé.

Le procureur du comté de Chautauqua, Jason Schmidt, a déclaré que l’auteur, qui a été poignardé plus d’une douzaine de fois et a détaillé l’attaque presque mortelle et la guérison douloureuse dans un mémoire intitulé Le couteau : Réflexions suite à une tentative d’assassinat, était favorable à la résolution mondiale proposée, car sinon, il pourrait y avoir deux procès distincts.

« Sa préférence était que cette affaire soit réglée », a déclaré le procureur. Sans l’approbation de M. Rushdie, Jason Schmidt a déclaré qu’il se serait opposé à une réduction de la peine maximale de prison dans l’État, compte tenu de la nature de l’attaque.

« Il est arrivé dans le comté de Chautauqua et a ensuite commis ce crime, qui n’est pas seulement un crime contre une personne, mais aussi un crime contre le concept de liberté d’expression », a-t-il déploré.

L’avocat de Matar, Nathaniel Barone, a déclaré que son client voulait tenter sa chance au procès.

« Il se demande :’’Qu’est-ce que j’ai à perdre ?’’ », a soutenu Me Barone après l’audience.

Le juge David Foley a demandé à Hadi Matar de discuter de l’offre avec son avocat et de donner sa réponse lors de sa prochaine comparution, le 2 juillet.

Accusation potentielle de terrorisme

Salman Rushdie, qui fêtera ses 77 ans mercredi, a passé des années dans la clandestinité après que l’ayatollah iranien Rouhollah Khomeini eut émis une fatwa en 1989 appelant à la mort de celui-ci pour blasphème présumé dans son roman Les Versets sataniques. Il a vécu dans l’isolement et avec de la sécurité 24 heures sur 24. Mais depuis des années, il se déplaçait avec peu de restrictions, jusqu’à l’attaque au couteau à l’Institution Chautauqua.

Après l’attaque sur scène, les enquêteurs ont déclaré qu’ils essayaient de déterminer si Matar, né près d’une décennie après la sortie du roman Les Versets sataniques, avait agi seul.

« L’approche est qu’il s’agissait d’une organisation terroriste soutenue par des pays du Moyen-Orient, et c’est ainsi qu’ils gèrent la situation », a déclaré Me Barone. « Le gouvernement fédéral considère qu’il y avait un soutien avant que cela ne se produise », a-t-il soulevé. « Je pense que pour qu’ils puissent inculper ou obtenir une condamnation pour tout type d’accusation liée au terrorisme, ils devront démontrer qu’il y avait au préalable un soutien dans le cadre d’un complot. »

Barbara Burns, porte-parole du bureau du procureur américain, a refusé de commenter l’accusation potentielle de terrorisme, expliquant que le bureau ne confirmait ni n’infirmait les enquêtes.

Matar est né aux États-Unis, mais possède la double nationalité au Liban, où ses parents sont nés. Sa mère a indiqué que son fils avait changé, devenant renfermé et maussade, après avoir rendu visite à son père au Liban en 2018. Jason Schmidt a soutenu que Matar avait obtenu un laissez-passer pour l’évènement au cours duquel l’auteur parlait et était arrivé du New Jersey un jour plus tôt avec une fausse carte d’identité.

Salman Rushdie, dont les œuvres comprennent également Les enfants de minuit et La cité de la victoire, a écrit dans ses mémoires qu’il avait vu un homme courir vers lui dans l’amphithéâtre, où il était sur le point de parler de l’importance de protéger les écrivains du danger.

L’auteur est sur la liste des témoins si le procès de Matar se déroule comme prévu en septembre dans le comté de Chautauqua.