Tut, tut, tut. Nul besoin de faire ici une crise du bacon comme une agente immobilière de 23 ans du Missouri qui n’a pas obtenu une inscription à 18,9 millions dans Owning Manhattan sur Netflix (on s’en reparle, ouf).

Car ce n’est pas un divulgâcheur que de révéler qu’une meurtrière en série terrorise – et liquide – des médecins « incompétents » dans la troisième et ultime saison de Cerebrum, dont les cinq premiers épisodes apparaîtront jeudi sur l’Extra de Tou.TV. Les cinq derniers suivront le 11 juillet et ce thriller psychologique policier atterrira dans la grille de programmation régulière de Radio-Canada à l'hiver 2025.

Contrairement à son chapitre précédent, qui culminait avec la capture d’un tueur psychopathe en cavale, Cerebrum 3 renverse sa mécanique.

D’abord, le scénariste Richard Blaimert dévoile dès le premier épisode l’identité de la suspecte principale, qui s’attaquera à des médecins ayant été innocentés de graves erreurs médicales. Du genre : oublier un scalpel dans le ventre d’une patiente opérée pour une césarienne.

Il s’agit de l’avocate Jacqueline Laurent (Mélissa Désormeaux-Poulin), dite Jackie, une femme charmante, intelligente, rusée et complètement fêlée. De jour, Jackie domine l’univers médicolégal dans sa tour effilée du centre-ville de Montréal. Le soir, Jackie crache (littéralement) sur des tombes, enfile des perruques multicolores et change d’accent pour hameçonner ses proies. Voilà pour notre nouvelle dingue favorite.

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Olivier Gervais-Courchesne, François Papineau et Christine Beaulieu

Ensuite, les victimes de Jackie ne seront pas des jeunes femmes mutilées ou torturées, une forme de violence qui a été surexploitée dans toutes les téléséries du monde, mais des hommes. Du moins, c’est ce qui transpire des premières heures de Cerebrum 3 que j’ai vues et qui glissent doucement sur le territoire de Doute raisonnable.

Bien sûr, la paire d’enquêteurs vedettes des crimes majeurs Simone Vallier (Christine Beaulieu) et Danno Boulianne (Olivier Gervais-Courchesne) se décarcasseront pour épingler l’assassine qui joue avec des instruments autrement plus coupants qu’un trombone. Pour les épauler dans la traque de la maniaque, Simone et Danno comptent sur la précieuse aide du psychiatre Henri Lacombe (François Papineau), qui rentre d’un stage au FBI, rien de moins, et qui a paraphé un contrat de profileur pour la police de Montréal.

Cette troisième saison de Cerebrum démarre environ huit mois après la finale de la deuxième, où l’intervenant Pierre Bouchard (Hugues Frenette) confessait ses meurtres, dont celui de la copine de Simone, la belle Adèle Rioux (Chanel Mings).

Accro aux somnifères et encore endeuillée, Simone file un très mauvais coton, tout le contraire du DLacombe, qui habite avec sa nouvelle amoureuse Suzanne (Hélène Florent), une designer d’intérieur qui l’a convaincu d’abandonner la banlieue pour la ville. Leur relation est très polie et ils se parlent avec des courbettes quasiment comme dans Bridgerton. C’est louche. Et bizarre.

Les deux enfants adultes du DLacombe, Marine (Marianne Verville) et William (Henri Picard), demeurent dans le portrait, et l’un d’eux réserve au paternel une grosse surprise pigée directement dans la première saison de Cerebrum, qui remonte à 2019 (c’est vraiment loin). Indice : jumeaux incestueux.

En parallèle de l’investigation centrale, le DLacombe traite encore, à l’Institut national de santé mentale, des patients « réguliers », dont le jeune homme défiguré Xavier (Anthony Therrien), une jeune autiste et schizophrène de 23 ans (excellente Sara Montpetit) et une journaliste aux affaires criminelles (Isabelle Brouillette), qui souffre du syndrome de Capgras, un trouble psychiatrique lui faisant croire que ses proches ont été remplacés par des sosies.

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Sara Montpetit et Anthony Therrien

Le point central de Cerebrum 3 demeure sur l’avocate détraquée (et assez cliché), ce qui laisse une partition réduite à Louise (Marie-Chantal Perron), la bienveillante infirmière-chef du DLacombe.

Maintenant, de savoir tout de suite qui a tué – et qui le fera de nouveau – n’entache pas le plaisir de visionner Cerebrum en rafale. C’est aussi palpitant d’avoir une longueur d’avance sur les protagonistes et de voir comment l’avocate Jackie s’amuse avec les policiers, en se rapprochant dangereusement de l’enquête en cours.

Certaines ficelles de l’intrigue sont assez grosses et naviguent dans le territoire des eaux casse-gueule de Dexter. Aussi, le fait que Simone et le DLacombe se vouvoient toujours crée une sorte de froideur dans le récit, qui freine notre attachement envers eux, je trouve.

Cela dit, j’adore le personnage de la sergente-détective Simone Vallier, qui aime autant les tuques de laine qu’un interrogatoire corsé de 14 heures. Cette Simone s’apparente davantage aux personnages tourmentés et faillibles qui peuplent les polars scandinaves.

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Cerebrum 3

Le DLacombe est plus distant et droit, limite frette. Chose certaine, sa nouvelle copine Suzanne fait une obsession sur Simone et ne se gêne pas pour le questionner à répétition sur ce sujet, qui devient vite redondant.

Cerebrum demeure une série policière classique, efficace et prenante, en plus d’être une des rares productions québécoises à se dérouler en plein hiver.

Au deuxième épisode, quand un personnage tombe dans les vapes après avoir avalé 4 mg de clonazépam (un anxiolytique), je n’ai pu m’empêcher de penser à Céline Dion qui a donné plusieurs spectacles avec 90 mg de Valium dans le corps. Comment faisait-elle pour ne pas s’effondrer ou tituber sur scène, ciboulette ? J’en suis encore traumatisé, tel est mon destin, je crois bien.