Un conseil d’administration indépendant, dans lequel aucun membre n’est payé et qui comprend un avocat et un comptable : tels sont quelques-uns des critères qui devraient guider le Collectif canadien de journalisme choisi par Google pour redistribuer 100 millions par année aux médias canadiens, selon une coalition de médias.

Celle-ci, qui affirme représenter 95 % des éditeurs de nouvelles canadiens, comprend notamment Hebdos Québec et ses 115 membres, ainsi que Médias d’info du Canada, qui regroupe 550 titres, dont La Presse. Ce groupe était un de ceux qui avaient manifesté leur intérêt auprès de Google pour la redistribution de 100 millions par année, dans le cadre de la Loi sur les nouvelles en ligne.

C’est finalement le Collectif canadien de journalisme (CCJ), essentiellement constitué d’administrateurs issus de petits médias indépendants et majoritairement associés à une entreprise offrant des outils de publication et de publicité, Indiegraf, qui a été choisi. L’organisme a été fondé le 20 mai dernier spécifiquement pour ce mandat.

« Là où le bât blesse, c’est que le conseil d’administration de ce collectif n’est pas prêt au moment où on se parle », estime Sylvain Poisson, directeur général d’Hebdos Québec.

Il faut, à notre sens, que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) applique les règles en lien avec la Loi sur les nouvelles en ligne et s’assure que ces 100 millions soient répartis de façon très équitable.

Sylvain Poisson, directeur général d’Hebdos Québec

Dans un communiqué publié jeudi, la coalition menée par Médias d’info du Canada fait 10 recommandations pour une gouvernance « solide et indépendante ». On estime entre autres que le conseil d’administration du CCJ devrait comprendre un avocat et un comptable agréé, « qui devraient être indépendants des entreprises de médias d’information ». Les membres du C. A. « ne doivent pas recevoir de fonds au titre de la Loi sur les nouvelles en ligne » et ne doivent pas recevoir d’honoraires du CCJ, conseille-t-on.

Panel indépendant

« On veut juste s’assurer que le CRTC puisse appliquer les règles : c’est tellement important parce que c’est l’année de référence, c’est la première année », explique M. Poisson.

Si on reçoit des sommes nettement inférieures à ce à quoi on s’attendait pour toutes sortes de raisons, parce que le CRTC n’a pas voulu se prononcer ou aller plus loin, on est pris avec ça pour les prochaines années.

Sylvain Poisson, directeur général d’Hebdos Québec

Pour définir l’admissibilité des quelque 1500 organisations qui se sont manifestées auprès de Google au printemps pour obtenir leur part des 100 millions, on suggère de nommer un panel indépendant de trois personnes, comprenant un avocat et un membre de l’écosystème journalistique.

Enfin, le versement des sommes, soit ce qu’on appelle « l’administration du service d’arrière-guichet », devrait être indépendant de tout membre du C. A., et ceux-ci ne devraient pas être liés entre eux. Le CCJ a récemment soulevé l’inquiétude sur les risques de conflit d’intérêts, 8 personnes sur 12 dans l’organisation étant associées à Indiegraf.

« Composer un conseil d’administration dont les deux tiers des membres sont des parties liées est un manque de bonne gouvernance et de discernement », estime Paul Deegan, PDG de Médias d’info du Canada.

Le Collectif canadien de journalisme a réagi aux accusations récentes en faisant valoir que son conseil d’administration était « temporaire » en attente d’une décision du CRTC. Celui-ci a annoncé ce jeudi la tenue d’une consultation publique sur ce dossier et recueillera les commentaires jusqu’au 29 juillet.

Dans une sous-section récemment publiée sur son site, le CCJ a annoncé un « appel public » pour l’embauche prochaine d’un directeur qui « devrait entrer en fonction à la fin de l’été ».

Le collectif « invitera à la fois les organisations traditionnelles de la presse écrite et audiovisuelle et les rédactions locales indépendantes à participer à l’ensemble de la structure de gouvernance, conformément à la loi », promet-on.