L’action d’Air Canada est injustement pénalisée, alors qu’elle renferme une grande valeur avec notamment la politique d’immigration au pays comme vent de dos, soutient un analyste du secteur du transport aérien qui travaille dans une grande banque canadienne.

Au moment où le titre oscille autour de 17 $ en Bourse, Kevin Chiang, de la CIBC, souligne dans un rapport publié cette semaine à quel point le sentiment sur les marchés financiers est devenu négatif à l’égard du transporteur aérien montréalais.

Bien qu’il reconnaisse les craintes entourant la « santé » du consommateur canadien et le fait que les négociations avec les pilotes pèsent sur le titre, Kevin Chiang relève plusieurs éléments pour tenter de démontrer à quel point l’action d’Air Canada est tombée de façon injustifiée en disgrâce au point de ne plus avoir la cote auprès des investisseurs.

Le cours boursier actuel d’Air Canada escompte un « atterrissage brutal », selon Kevin Chiang, ce qui est contraire à l’opinion générale, dit-il.

Il affirme que d’autres titres dans son univers de couverture obtiennent le bénéfice du doute et tablent sur un « atterrissage en douceur ».

Air Canada est, selon lui, en meilleure position pour limiter les impacts d’un ralentissement qu’elle ne l’était au début de la crise financière de 2008-2009.

Il avance notamment que le programme de fidélisation Aéroplan s’est développé, mais que l’évaluation du titre d’Air Canada n’en tient pas compte.

Aéroplan continue d’être un moteur de croissance à ses yeux. « Aéroplan est une source de revenus moins cyclique. Ce programme de fidélisation racheté en 2019 a atteint son objectif de 7 millions de membres plus tôt que prévu. L’adhésion au programme crée une clientèle plus fidèle. »

Les prévisions de croissance de la population canadienne, attribuables notamment à la forte immigration, constituent un vent de dos important pour le transport aérien, souligne-t-il.

Il note aussi que les bénéfices générés par Air Canada sont meilleurs et que le niveau d’endettement est de retour au niveau prépandémique, alors que la valeur de l’entreprise demeure dépréciée.

« Le marché n’accorde pas de crédit à Air Canada pour son redressement », dit-il.

Air Canada dispose, selon lui, d’un certain nombre de leviers pour gérer un ralentissement potentiel.

Même si Air Canada n’est pas à l’abri d’un contexte macroéconomique moins favorable, nous pensons que le marché ignore certaines initiatives que les dirigeants peuvent prendre pour gérer un éventuel ralentissement.

Kevin Chiang, analyste à la CIBC

Kevin Chiang apprécie les avantages dont bénéficie Air Canada en faisant partie du réseau Star Alliance de 26 transporteurs aériens. « Grâce à son réseau mondial, Air Canada a la possibilité d’optimiser ses itinéraires et de déplacer ses actifs là où la demande est la plus forte. »

L’analyste dit entendre les questionnements concernant les dépenses à court terme. « Bien que l’on appréhende qu’Air Canada investisse dans sa flotte à un moment où l’on s’inquiète pour la santé du consommateur canadien, il convient de noter que ces avions sont principalement destinés à être remplacés, de sorte que la croissance nette de la capacité n’est pas si importante. De plus, l’histoire a montré que les compagnies aériennes disposent d’une certaine flexibilité dans leurs dépenses d’investissement si elles ont besoin d’ajuster le tir. »

Au total, 15 des 17 analystes qui s’intéressant au titre d’Air Canada suggèrent actuellement l’achat de l’action. Le cours cible moyen de ces experts sur un horizon de 12 mois est 26,85 $, l’équivalent d’une appréciation d’environ 50 % par rapport au cours actuel.

Kevin Chiang n’est pas le plus optimiste sur Bay Street. Plusieurs de ses camarades ont des cibles à 32 $ et 33 $ alors que la sienne est à 28 $.

Avis divergents

L’analyste James McGarragle, de RBC, est l’un des deux analystes à ne pas recommander l’achat du titre. La prudence de ce spécialiste du transport est notamment liée à la hausse des coûts d’exploitation et au niveau d’endettement plus élevé des consommateurs canadiens.

« Je m’attends à ce que les taux d’intérêt plus élevés pèsent sur les dépenses discrétionnaires au pays, car le rapport entre les paiements de la dette des ménages et le revenu disponible atteint un niveau record », souligne-t-il dans une note publiée au printemps.

S’il croit que la situation affectera la demande pour les voyages en plus d’avoir un impact négatif sur le prix des billets d’avion, il prévoit cependant un répit lorsque les taux d’intérêt baisseront suffisamment.

L’action d’Air Canada a clôturé la séance de jeudi en hausse de 2 % à 17,89 $ à Toronto, pas très loin de son plancher des 52 dernières semaines de 16 $. Le titre valait plus de 50 $ en 2020 avant que la pandémie paralyse une partie de l’économie.