Rencontrant les médias mardi pour la première fois depuis son retour aux commandes de Gildan, Glenn Chamandy a laissé entendre que le fabricant montréalais de vêtements payera l’impôt minimum mondial une fois que la législation à cet effet sera promulguée.

Le taux d’imposition minimum mondial sur les profits des grandes entreprises (revenus supérieurs à 1 milliard US) est de 15 %, tel que fixé par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Le taux d’imposition effectif moyen de Gildan s’est élevé à 4,4 % en 2022, à 2,8 % en 2021 et à 1,8 % en 2020.

Le gouvernement Trudeau a déposé ce printemps un avis au Parlement dans lequel est notamment énoncée la Loi de l’impôt minimum mondial, instaurant un impôt minimum mondial de 15 % sur le revenu des multinationales.

« Cette taxe est fonction de la législation du gouvernement canadien qui doit être promulguée d’ici la fin de l’année et en vertu de laquelle nous payerons l’impôt minimum mondial dans l’avenir », a dit Glenn Chamandy, mardi, après avoir été officiellement élu pour faire partie du conseil d’administration renouvelé de Gildan.

Au début de mai, la précédente administration de Gildan s’était engagée à payer l’impôt minimum mondial en annonçant un investissement à venir de 200 millions de la Caisse de dépôt et placement du Québec. La clôture de cette entente n’est toutefois prévue que pour mardi prochain, le 4 juin.

L’ex-direction de Gildan avait également convenu de maintenir une direction locale « solide » et le siège social mondial au Québec pour au moins sept ans afin que la clôture de la transaction avec la Caisse se concrétise en juin.

La Caisse avait indiqué à La Presse vendredi dernier après le changement à la direction chez Gildan qu’elle était toujours disposée à agir comme prêteur et à redevenir actionnaire de Gildan dans la mesure où les conditions sur la fiscalité équitable et la présence au Québec étaient respectées.

La décision de la Caisse de vouloir investir à nouveau dans Gildan arrivait deux ans après que le plus important investisseur institutionnel du Québec eut vendu toutes ses actions de Gildan parce que l’entreprise ne payait pas à ses yeux sa juste part d’impôt, après l’avoir publiquement avertie à quelques occasions.

Glenn Chamandy dit ne pas encore avoir eu la chance d’analyser l’offre de la Caisse. « Nous allons l’évaluer, mais nous souhaitons assurément que la Caisse soit un actionnaire à long terme de Gildan. »

Le cofondateur et PDG de Gildan ne croit par ailleurs pas que la Caisse a choisi un clan durant la bataille en signant une entente avec l’ancienne administration de Gildan.

« La Caisse souhaite qu’une institution comme Gildan reste à Montréal pour longtemps et qu’elle paye sa juste part d’impôt. Elle s’est donné pour politique de ne pas investir dans une entreprise ne payant pas l’impôt minimum mondial de 15 %. L’ancien conseil d’administration a tenté de vendre Gildan et il est très probable que s’il avait vendu l’entreprise, l’acquéreur aurait possiblement été une entité américaine et le siège social aurait alors été déplacé à l’extérieur du Québec », dit Glenn Chamandy.

Une bataille coûteuse

Glenn Chamandy estime le coût total de la lutte de pouvoir s’étant déroulée chez Gildan entre décembre et mai à plus de 65 millions US (près de 90 millions canadiens) en tenant compte de tous les frais judiciaires et administratifs (poursuites intentées par Gildan contre l’actionnaire dissident Browning West, processus de vente, indemnités de départ de dirigeants, etc.). Cette somme n’inclut cependant pas son indemnité de départ, que Glenn Chamandy dit n’avoir jamais touchée, ni les coûts de plusieurs millions déboursés par Browning West pour mener sa croisade.

« Il s’agit probablement de la plus grande course aux procurations de l’histoire », dit Glenn Chamandy. « Plus encore que celle chez Disney », ajoute-t-il.

Le géant Disney, dont la valeur boursière est 30 fois plus importante que celle de Gildan, a récemment mené une longue bataille contre des investisseurs militants mécontents de la stratégie de l’entreprise.

Glenn Chamandy est de retour à la tête de Gildan depuis le départ de l’ex-PDG Vince Tyra et la démission en bloc des membres du conseil d’administration jeudi dernier.

Ce coup de théâtre a marqué le tournant d’un feuilleton amorcé deux semaines avant Noël avec le congédiement soudain de Glenn Chamandy pour des raisons de stratégie et de succession.

Ce licenciement avait provoqué la révolte de plusieurs actionnaires institutionnels. La firme d’investissement américaine Browning West est parvenue à rallier suffisamment d’appuis pour permettre d’annuler la décision de congédier Glenn Chamandy.

Les actionnaires de Gildan avaient rendez-vous en assemblée annuelle mardi dans une salle de conférence au 36e étage d’une tour de bureaux adjacente au Centre Bell dans le centre-ville de Montréal.

Ce rassemblement servant à confirmer le retour de Glenn Chamandy au poste de PDG s’est déroulé dans une certaine intimité. L’entreprise n’a pas laissé les journalistes assister à l’assemblée, qui a duré une trentaine de minutes. Une centaine d’actionnaires se sont déplacés pour participer à l’évènement.

Avec une capitalisation boursière supérieure à 8 milliards de dollars, Gildan est l’une des 20 plus importantes entreprises publiques au Québec.