Les rendez-vous médicaux offerts au Guichet d’accès à la première ligne (GAP) demeurent moins nombreux qu’à l’habitude, deux semaines après la conclusion d’une entente entre Québec et les médecins de famille. Des cliniques veulent réduire leur participation au GAP et même mettre fin aux inscriptions collectives. Des patients redeviendront orphelins.

Ce qu’il faut savoir

Les rendez-vous offerts par les médecins de famille au Guichet d’accès à la première ligne (GAP) sont moins nombreux qu’à l’habitude, deux semaines après la conclusion d’une entente entre le gouvernement et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec.

Près de 12 500 plages de consultation médicale sont prévues au GAP pour la semaine du 30 juin, contre 18 000 à 23 000 en temps normal.

Des cliniques comptent réduire les inscriptions collectives et même les cesser.

En date du 28 juin, près de 12 500 plages de consultation médicale étaient prévues au GAP pour la semaine du 30 juin, selon le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Ce nombre s’élevait à environ 13 000 pour la semaine suivante et à 11 200 pour celle d’après. En temps normal, de 18 000 à 23 000 rendez-vous médicaux sont offerts au GAP en moyenne chaque semaine.

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) dit avoir prévenu le gouvernement des conséquences du non-renouvellement de la précédente entente, venue à échéance le 1er juin.

On a freiné l’élan et là, il faudra voir combien de temps ça va prendre pour que la roue se remette à tourner au même rythme.

Stéphane Gosselin, porte-parole de la FMOQ

Durant les négociations, des médecins ont délaissé le GAP pour travailler ailleurs – aux urgences, par exemple. Reste à voir, dit la FMOQ, s’ils vont revenir.

En Outaouais, « beaucoup » de cliniques vont diminuer leur nombre d’inscriptions collectives, selon le chef du département régional de médecine générale, le DMarcel Guilbault. « On a un groupe qui avait 20 000 inscriptions et qui descend à 16 000, précise-t-il. Un autre avec 14 000 qui descend à 9000. » Mais certains veulent augmenter la prise en charge. « Ça ne compensera pas évidemment les pertes qu’on va avoir », estime-t-il.

Dans la région de Montréal, la « majorité » des groupes de médecins ont l’intention de maintenir leur nombre d’inscriptions collectives, selon la cheffe du département régional de médecine générale de Montréal, la Dre Ariane Murray. « On a une certaine proportion de cliniques qui vont réduire un peu », dit-elle. Une seule laisse tomber le GAP. D’autres veulent augmenter leur participation, indique-t-elle.

Fini l’inscription collective

La superclinique Le Trait d’Union, à Delson, en Montérégie, a choisi de cesser l’inscription collective dès le 1er juin. Les 4500 patients pris en charge par le groupe de 20 médecins recevront une lettre les avisant qu’ils sont de nouveau inscrits au Guichet d’accès à un médecin de famille.

Le DJean-Philippe Chouinard, médecin responsable de cette superclinique (GMF-R dans le jargon), explique que son équipe a « perdu confiance » dans ce système. Et ce n’est pas une question d’argent, martèle-t-il.

On était vraiment plus en mode d’éteindre des feux, de répondre à des besoins ponctuels. On n’était pas capables d’avoir la satisfaction d’avoir remis le dossier médical des patients à jour.

Le DJean-Philippe Chouinard, responsable de la superclinique Le Trait d’Union

La prime par patient inscrit collectivement – passée de 120 à 100 $ en vertu de l’entente passerelle – n’a pas influencé leur choix, assure-t-il. « Quand on a décidé d’arrêter, c’était vraiment parce qu’on pensait que ce n’était pas la bonne façon de faire pour donner un service à la population. »

Son groupe a vu « un peu » de ses inscrits collectifs depuis deux ans, indique-t-il. Beaucoup de patients – orphelins ou suivis par d’autres groupes de médecins – étaient des cas « lourds » qui nécessitaient plusieurs visites. « Des fois, le patient était envoyé dans une autre clinique pour voir un autre médecin pour son suivi, ou nous, on ramassait des suivis GAP de patients qui avaient été suivis ailleurs, déplore-t-il. C’était vraiment désorganisé. »

Pour avoir « un peu plus de contrôle local », Le Trait d’Union a choisi de redonner vie à sa « clinique orpheline » lancée un an avant le GAP et délaissée au profit de ce dernier. Le service – financé par une mesure de soutien à la pratique dans l’entente GMF – sera destiné aux patients orphelins issus du GAP ou réorientés par les urgences ou les services préhospitaliers. Au total, 4200 rendez-vous seront offerts chaque année. « À peu près la moitié des rendez-vous vont être donnés par des infirmières », précise le DChouinard.

L’infirmière mettra à jour le bilan de santé du patient (prises de sang, par exemple) avant la consultation médicale qui aura lieu dans les semaines suivantes, précise le DChouinard.

De nouvelles règles qui changent la donne

À Saint-Jean-sur-Richelieu, le centre médical Médi-Soleil fera passer de 11 000 à 8000 son nombre de patients inscrits collectivement, en raison de la nouvelle entente, selon sa présidente, la Dre Joëlle Bertrand-Bovet.

Désormais, le nombre de plages offertes est modulé selon les périodes de pointe (saison de l’influenza, par exemple), et non de manière égale chaque trimestre.

Or, les médecins de la clinique qui travaillent à l’hôpital ont « des gardes plus nombreuses l’hiver », explique-t-elle. Impossible, dans ce contexte, de maintenir les 11 000 plages de consultation.

La Dre Bertrand-Bovet s’attend à devoir les réduire davantage encore en 2025. Le « climat malsain » instauré, dit-elle, par le gouvernement Legault a provoqué le départ de collègues. « Un médecin de deuxième ligne qui venait faire du GAP a quitté complètement, dit-elle. On a un départ d’un médecin en Ontario. » Un troisième passera au privé le 31 décembre.