Paul Dostie est un greeter. « Le plus beau, le plus grand, le plus merveilleux », dit la mairesse Julie Morin. Un greeter, c’est un citoyen qui fait visiter sa ville gratuitement en racontant plein d’anecdotes, un concept né en 1992 à New York. M. Dostie, professeur de secondaire à la retraite, a enseigné à la moitié des 47 victimes du tristement célèbre déraillement de train. Il nous a fait visiter sa ville à pied dans l’esprit du Cittaslow.

L’arrivée du train

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Installée le long de la voie ferrée, La marche du vent traverse la zone détruite par l’accident ferroviaire.

Le train est arrivé à Lac-Mégantic en 1878, rappelle M. Dostie : « Mégantic, c’est, à ma connaissance, le seul village qui ne s’est pas construit autour de l’église, parce qu’ici, ça s’est construit autour de la voie ferrée, puis de la forêt. » À l’époque, Lac-Mégantic n’est pas un « petit village francophone québécois », dit-il. « Non, non, non. Vous aviez ici des Écossais, des Irlandais, des Britanniques, des Américains et des Canadiens français. On a toujours été plus nombreux, mais tout se faisait en anglais. C’était une ville cosmopolite. Les premiers sont arrivés en 1855, les Canadiens français vers 1870. Dès le début, c’était une ville de saloon, de bordel et de jeu. »

Des bûcherons

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La Chaudière

Les familles vivaient à Lac-Mégantic, mais les travailleurs étaient dans les camps de bûcherons du Maine, de la Beauce, de Scotstown et de Dorset. Puis, les fins de semaine, « ça s’en venait à Lac-Mégantic », raconte Paul Dostie. « En 1882, il y avait 200 habitants et 7 hôtels ! Un des premiers règlements a été d’interdire de se baigner sans costume de bain. Les gens sortaient des camps de bûcherons où il n’y avait pas d’eau courante et se lavaient dans le lac. »

Un mot abénaquis

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Vue de la marina du lac Mégantic

« Mégantic », c’est un mot abénaquis qui signifie lieu où se tiennent les poissons. Le lac Mégantic est très poissonneux, précise M. Dostie. « En 1855, il y avait de la pêche commerciale sur le lac. Il n’y avait aucune route, le train n’était même pas encore là. Puis, le poisson était vendu à Boston. Il y avait beaucoup de poissons : de la ouananiche, de la truite brune, de l’achigan à petite bouche, un peu de perchaude, beaucoup d’éperlans. Mais le poisson le plus intéressant, c’est la ouananiche, c’est le saumon d’eau douce. Ah ça, c’est combatif ! Prendre une truite grise, c’est comme si tu avais un morceau de bois. Ce n’est pas intéressant. La ouananiche sort de l’eau, puis elle se débat. »

Le vitrail monumental

PHOTO TIRÉE DU RÉPERTOIRE DU PATRIMOINE CULTUREL DU QUÉBEC

L’église Sainte-Agnès est ornée d’un vitrail de style néogothique réalisé en 1848, en Angleterre.

La verrière de l’église Sainte-Agnès fait plus de 8 m de haut et 5,5 m de large. C’est un vitrail de style néogothique « extraordinaire » réalisé en 1848 en Angleterre et installé à l’église Immaculée-Conception, à Londres, sous la responsabilité des jésuites. Comment s’est-il retrouvé à Lac-Mégantic ? En fait, c’est une œuvre de « seconde main ». Les jésuites, insatisfaits de ce vitrail, ont voulu le remplacer. Ils en ont commandé un autre, en 1912, aux ateliers Hardman, en Angleterre. « Ils le trouvaient terne, mais il fallait juste l’essuyer, c’était la suie du chauffage au charbon et des bougies », dit M. Dostie. La Providence faisant bien les choses, un ancien paroissien de Compton, près de Sherbrooke, parti travailler aux ateliers Hardman, a offert le vitrail de 1848, nettoyé, au curé de la paroisse de Sainte-Agnès, dont l’église est alors en construction.

La promenade Papineau

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La promenade Papineau a accueilli ses premiers commerces en 2014.

Inaugurée en 2014, la promenade Papineau a été construite pour relocaliser les commerces détruits par l’explosion du train pétrolier. « Ce sont les commerçants qui ont poussé la Ville à reconstruire un nouveau centre-ville parce que c’était leur gagne-pain, explique M. Dostie. Mais tous les anciens commerces ne sont pas là. Le bureau de poste, par exemple, est en haut de la ville, il n’est plus au centre-ville. Et là-bas, où le camion descend, de l’autre bord, tu vas avoir ta SAQ, tu vas avoir ton Metro, puis tu vas avoir ton Jean Coutu. Avant, il y avait toujours un va-et-vient parce que les gens allaient à la poste, allaient à la bibliothèque, allaient au magasin de meubles, allaient à la pharmacie. Tout était regroupé, ce qui fait que ça se faisait bien. »