Karl Blackburn songeait « sérieusement » à lorgner la chefferie du Parti libéral du Québec (PLQ) même s’il n’a « jamais été aussi heureux » professionnellement qu’à la tête du Conseil du patronat du Québec (CPQ). La vie a choisi pour lui. Atteint d’un cancer de la prostate, c’est la maladie qu’il doit affronter.

« C’est clair que ma réflexion s’est arrêtée il y a 10 jours quand j’ai eu ce diagnostic », confie-t-il, dans une entrevue en visioconférence avec La Presse. « Je ne pourrais pas envisager autre chose par rapport à ce que je viens d’apprendre. C’est une décision qui est réfléchie, mais qui en même temps est forcée par le destin. »

Président et chef de la direction du CPQ – qui représente les employeurs de la province – depuis quatre ans, M. Blackburn a annoncé la nouvelle à ses troupes lundi après-midi.

Âgé de 56 ans, il tente de se faire rassurant. Les pronostics sont « encourageants » et le principal intéressé se dit « plein d’énergie » et « pas affecté ». La preuve : en famille, il vient de participer au Grand défi Pierre Lavoie.

« S’il y a une bonne nouvelle dans le processus, c’est que cela a été découvert relativement tôt et probablement que ce n’est pas ailleurs », dit M. Blackburn.

La maladie et les mois plus difficiles – où des traitements sont au menu – ne dégonflent pas l’optimisme du président du CPQ. D’un ton confiant, il croit que « ça va bien aller ». Mais sa gorge se noue quand il pense à sa famille « tissée serrée », à ses grands enfants.

« J’ai quatre garçons, alors c’est sûr qu’ils sont très préoccupés, lance M. Blackburn. Ils voient dans leur père une sorte de héros un peu affecté par la maladie, alors on essaie de rester fort avec eux. »

Le CPQ oui, la politique non

M. Blackburn croit pouvoir concilier son combat contre le cancer avec ses fonctions au CPQ. Sa condition actuelle ne lui permet toutefois pas d’envisager un retour en politique, un milieu qu’il qualifie de « dur et cruel » aujourd’hui.

À plusieurs reprises au cours de l’entrevue, M. Blackburn répète avoir réfléchi « sérieusement » à ce scénario. Pourtant, il y a environ deux ans, le président du CPQ n’était « pas là du tout ». Mais quand on est sollicité de toutes parts, il est difficile de rester insensible, confie-t-il.

« Je n’ai jamais pensé que je pourrais peut-être devenir un chef de parti ou un premier ministre du Québec, souligne le porte-parole du milieu patronal. Mais plus ça allait, plus il y avait des gens qui le pensaient. À un moment donné, tu te mets à y réfléchir. »

La course à la direction du PLQ débutera en janvier 2025 pour culminer cinq mois plus tard. À ce jour, l’ex-maire de Montréal Denis Coderre, le député libéral Frédéric Beauchemin et le président-directeur général sortant de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), Charles Milliard, figurent parmi les candidats pressentis. Le maire de Victoriaville, Antoine Tardif, est également sollicité.

Militant de longue date

Natif de Chicoutimi, M. Blackburn a toujours été proche du PLQ.

D’abord à titre de représentant régional des Jeunes libéraux de 1988 à 1990, ensuite comme député de Roberval (de 2003 à 2007). Pendant des années, il s’est beaucoup intéressé au développement économique et régional. M. Blackburn a poursuivi sa carrière en politique comme organisateur en chef du parti et directeur général.

En 2013, il a quitté ce milieu pour se joindre à Produits forestiers Résolu, où il était responsable des affaires publiques et des relations gouvernementales.

Malgré son intérêt renouvelé pour la joute politique, M. Blackburn affirme ne pas avoir « franchi la limite » de se mettre en « mode organisation ». Difficile de prendre une telle décision lorsque de potentiels enjeux de santé pointent à l’horizon.

« Je n’étais pas pour demander à des gens de s’impliquer », lance-t-il.

Pourquoi songer à effectuer un retour en politique ? Pour « changer le Québec », répond M. Blackburn. Même s’il répète ce mot à maintes reprises au cours de l’entrevue, le président du CPQ opte pour la prudence lorsqu’on lui demande sur quels enjeux un coup de barre s’impose.

« Je vais être très prudent dans ce genre de commentaire là pour ne pas que cela soit retenu contre moi un jour », répond-il.

Tout au plus, M. Blackburn explique qu’il aurait pu mettre au premier plan des aspects de la dernière plateforme économique de son organisation, qui s’appuyait notamment sur les thèmes de l’éducation, du décrochage scolaire, de la formation et de la démographie vieillissante du Québec.

Avec Marie-Eve Fournier, La Presse

Karl Blackburn en bref

  • Né le 27 décembre 1967
  • Titulaire d’un baccalauréat en administration de l’Université du Québec à Chicoutimi
  • Député (PLQ) de la circonscription de Roberval de 2003 à 2007
  • Président et chef de la direction du CPQ depuis le 29 juin 2020
En savoir plus
  • 1969
    Année de fondation du Conseil du patronat du Québec
    source : conseil du patronat du québec
    70 000
    Nombre d’employeurs, de toutes tailles, représentés par l’organisation
    source : conseil du patronat du québec