(Ottawa) Le ministre fédéral des Institutions démocratiques, Dominic LeBlanc, confirme son intention de confier à une commission d’enquête permanente le soin d’examiner les allégations de collusion entre députés et agents d’ingérence étrangers.

Mais il n’accepte pas, du moins pour l’instant, la demande d’un sénateur de donner à la commissaire Marie-Josée Hogue le pouvoir de nommer publiquement les députés impliqués.

Le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement a indiqué la semaine dernière dans un rapport public que certains députés avaient sciemment aidé les efforts d’États étrangers visant à s’ingérer dans la politique canadienne.

Interrogé devant un comité par le sénateur Claude Carignan, M. LeBlanc a affirmé que le gouvernement donnerait à Mme Hogue le « mandat approprié » pour examiner la question.

Il a toutefois déclaré que l’idée selon laquelle la commission divulguerait publiquement des noms est « une question de droit », ajoutant qu’il ne voulait pas « faire valoir une opinion à une juge aussi importante » que Mme Hogue, qui siège à la Cour d’appel du Québec.

M. Carignan a soutenu qu’elle devrait avoir « le pouvoir de nommer des personnes si des violations ou des délits ont été commis » et le pouvoir d’envoyer l’affaire en cour afin que des enquêtes criminelles puissent avoir lieu.

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Le sénateur Claude Carignan

M. LeBlanc a répondu que « ce n’est pas une question à laquelle on peut répondre par oui ou par non ».

Le ministre a indiqué que Mme Hogue recevrait la documentation nécessaire pour explorer ces questions, mais aucune instruction explicite pour tirer des conclusions sur la culpabilité de chaque député.

La Chambre des communes a voté mardi en faveur d’une motion du Bloc québécois visant à ce que l’enquête fédérale examine les accusations non prouvées.

La cheffe du Parti vert, Elizabeth May, qui a une habilitation de sécurité de niveau très secret, a déclaré mardi être « extrêmement soulagée » après avoir lu une version non censurée du rapport.

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La cheffe du Parti vert, Elizabeth May

Selon elle, les députés qui y sont nommés n’avaient pas sciemment l’intention de trahir le Canada.

Elle a soutenu qu’un ancien député anonyme accusé dans le rapport d’avoir partagé de manière proactive des informations privilégiées avec un agent étranger devrait faire l’objet d’une enquête approfondie de la part des autorités.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, et le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, ont également signalé leur désir d’être informés du rapport complet de l’organisme de surveillance du renseignement.

M. Singh devait voir le rapport non censuré mercredi soir et il le commentera jeudi.

Il a assuré que si le document montrait qu’un député néo-démocrate avait sciemment participé à une ingérence, il serait expulsé du caucus. Il a suggéré aux autres chefs de parti d’adopter la même approche.

Lorsqu’on lui a demandé s’il utiliserait son privilège parlementaire pour divulguer l’intégralité des conclusions du rapport à la Chambre des communes, M. Singh a répondu mercredi qu’il ne ferait « rien qui puisse mettre en danger la sécurité nationale ».

De son côté, le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, n’a pas pris de mesure pour obtenir l’habilitation de sécurité nécessaire pour lire le rapport complet.

Alors qu’ils se réunissaient mercredi pour leur réunion hebdomadaire du caucus, les députés conservateurs ne se sont pas arrêtés pour répondre aux questions des journalistes à ce sujet.

Le député libéral David McGuinty, qui préside l’organe de surveillance des activités d’espionnage composé de parlementaires, a déclaré que la sécurité nationale et le renseignement ne devraient pas être une question partisane.

« Nous devrions avoir une conversation entre adultes sur la manière dont nous pouvons gérer cela dans nos propres partis. Les enjeux sont énormes. Notre démocratie est en jeu », a-t-il lancé.