(Québec) Le gouvernement fédéral offre 750 millions à Québec pour compenser les coûts encourus pour la gestion de l’afflux de demandeurs d’asile dans la province. François Legault, qui réclamait 1 milliard d’Ottawa pour les années 2021 à 2023, estime que leur nombre croissant, additionné à « l’explosion » de l’immigration temporaire, explique « 100 % » des problèmes en logement.

Ce qu’il faut savoir

Ottawa offre à Québec 750 millions du milliard réclamé pour payer les frais encourus pour la gestion des demandeurs d’asile entre 2021 et 2023.

Québec demande désormais au fédéral de réduire de 50 % le nombre de demandeurs d’asile d’ici un an.

Selon François Legault, « 100 % » des problèmes en logement s’expliquent par la hausse de l’immigration temporaire. Justin Trudeau affirme que c’est « plus complexe que ça ».

Le premier ministre fédéral, Justin Trudeau, a rencontré son homologue québécois, François Legault, lundi après-midi à Québec dans le cadre d’une rencontre bilatérale portant essentiellement sur la gestion des demandeurs d’asile et de l’immigration temporaire. M. Legault affirmait récemment que la présente situation était, à ses yeux, « intenable ».

En réponse aux demandes du gouvernement du Québec, Ottawa s’engage à traiter les demandes d’asile plus rapidement, à « travailler avec d’autres provinces pour favoriser le déplacement volontaire des demandeurs à l’extérieur du Québec » et à « améliorer » le système des visas, entre autres. Le fédéral s’engage par ailleurs à réduire le délai de traitement d’une délivrance d’un permis de travail pour un demandeur d’asile de 100 jours (le délai actuel) à 30 jours « pour les demandes soumises aux aéroports » et à l’intérieur du pays.

En matière de protection du français, Ottawa s’engage à « améliorer les exigences de connaissance du français » dans le Programme de mobilité internationale (PMI), comme le demandait Québec. Au 31 décembre 2023, selon les chiffres avancés par le gouvernement provincial, ce programme représentait 232 365 résidents non permanents sur un total de 560 174.

À l’avenir, « les travailleurs renouvelant leur permis de travail après trois ans sous le PMI devront prouver leurs compétences en français, à l’exception de certains volets ».

« Ceci démontrerait l’engagement à soutenir l’acquisition de la connaissance du français auprès des travailleurs étrangers. Les volets qui ne seraient pas couverts sont ceux établis en vertu d’ententes de commerce international pour venir en aide à la réunification familiale ou pour répondre à des crises humanitaires internationales », précise Ottawa.

Le gouvernement fédéral s’engage également à travailler « avec le Québec pour introduire des exigences de connaissance du français dans le cadre du processus de renouvellement du Certificat d’acceptation du Québec » pour les travailleurs étrangers temporaires.

Québec exige des cibles

En point de presse après sa rencontre avec Justin Trudeau, François Legault, a déploré qu’Ottawa ne chiffre pas la baisse du nombre d’immigrants temporaires qu’il envisage à court terme.

Le gouvernement québécois réclame pour sa part une réduction de 50 % du nombre de demandeurs d’asile s’établissant au Québec d’ici un an, ainsi qu’une diminution de 50 % de l’immigration temporaire contrôlée par Ottawa. Or, à ce jour, Québec et Ottawa ne s’entendent pas sur une méthodologie pour calculer combien d’immigrants temporaires se retrouvent au Québec en ayant fait l’objet d’un contrôle direct ou indirect de la province.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, LA PRESSE CANADIENNE

François Legault a rencontré son homologue fédéral lundi à Québec, pour parler d’immigration et de la gestion des demandeurs d’asile.

Avec environ 560 000 immigrants temporaires présents au Québec en date du 31 décembre dernier, François Legault estime que ces ressortissants requièrent 200 000 logements en tout pour vivre dans la province.

Depuis deux ans, [leur] augmentation fait qu’on a besoin de 120 000 logements de plus, juste depuis deux ans. [Mais] quand on regarde toutes les constructions, […] il y en a eu 90 000 depuis deux ans. On voit que 100 % du problème de logement vient de l’augmentation du nombre d’immigrants temporaires.

François Legault, premier ministre du Québec

Le premier ministre québécois a ensuite décliné les effets de l’immigration temporaire, selon les estimations de Québec, sur la pénurie d’enseignants qualifiés, d’infirmières, ainsi que sur le déclin du français.

« Quand on n’est plus capable de loger des familles, quand on n’est plus capable de scolariser des enfants, quand on n’est plus capable d’avoir accès à des services de santé, qu’on n’est plus capable de freiner le déclin du français, on est dans une situation d’urgence », a dit M. Legault.

Trudeau réplique

Dans un point de presse successif, le premier ministre canadien Justin Trudeau a répliqué que le Québec contrôlait déjà près de la moitié des immigrants temporaires présents sur son territoire. Il s’est engagé à travailler avec M. Legault et ses équipes pour cibler la baisse de l’immigration temporaire que la province souhaite et préciser ces chiffres d’ici la fin de l’été, probablement en septembre. À ce moment-là, le fédéral devra préciser sur quels critères les résidents non permanents présents en vertu du PMI pourront rester ou devront quitter le pays.

On voit qu’à travers le pays, il y a bien des défis au niveau des services sociaux, au niveau des services de santé [et] au niveau du logement qui ne peuvent pas être tout simplement blâmés sur les immigrants.

Justin Trudeau, premier ministre du Canada

« Les Québécois et les Canadiens savent très bien que ce n’est pas toujours la meilleure chose à faire que de cibler et de dire que tout est la faute des immigrants. C’est quelque chose sur quoi certains misent dans leur argumentaire, mais c’est toujours plus complexe que ça », a-t-il ajouté.

Le 15 mars dernier, Justin Trudeau a rejeté la demande formulée par François Legault pour que le Québec obtienne les pleins pouvoirs en immigration. Le premier ministre du Québec a plus tard brandi la menace d’organiser un référendum sectoriel sur l’immigration, une idée qu’il a rapidement mise de côté.

La Colombie-Britannique devrait avoir sa part, selon le premier ministre Eby

Le premier ministre de la Colombie-Britannique, David Eby, a déclaré que l’argent fédéral destiné à l’immigration était « déversé » sur l’Ontario et le Québec « au mépris » de l’Ouest canadien.

M. Eby dit que la nouvelle selon laquelle Ottawa a offert au Québec 750 millions pour l’aider à payer pour une augmentation du nombre de résidents temporaires dans la province est frustrante, et que la Colombie-Britannique devrait également obtenir une part.

Les chiffres du gouvernement de Colombie-Britannique montrent qu’il y avait 475 778 résidents non permanents dans la province au 1er janvier, soit une augmentation d’environ 84 % par rapport à 2022.

La Presse Canadienne