(Ottawa) Le bureau de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, reproche au chef conservateur Pierre Poilievre de répandre de « fausses affirmations » sur des démarches de la Ville en matière de décriminalisation de la possession simple de drogues.

D’une part, on rectifie le tir sur la « demande de la mairesse de Montréal » que le leader de l’opposition officielle mentionne en Chambre depuis plus d’une semaine. Face à la Colombie-Britannique qui a fait marche arrière sur un projet de décriminalisation, M. Poilievre implore presque à chaque occasion le premier ministre Justin Trudeau de ne pas « répéter l’expérience radicale » ailleurs, comme dans la métropole québécoise.

D’autre part, le bureau de la mairesse montréalaise en a contre le fait que M. Poilievre emploie les verbes « décriminaliser » et « légaliser » comme des synonymes, ainsi que leurs noms ou adjectifs associés.

« La crise nationale des surdoses ne se réglera pas avec les fausses affirmations du chef conservateur et on l’invite à se concentrer sur des solutions concrètes », soutient le cabinet de Mme Plante dans une déclaration écrite envoyée à La Presse Canadienne.

Pour qu’une approche semblable à celle qu’avait commencé à prendre la Colombie-Britannique puisse aller de l’avant, une exemption à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances doit être octroyée par le gouvernement fédéral. La province de l’Ouest avait obtenu ce sceau d’approbation de Santé Canada en 2022.

Or, Montréal n’a pas fait de demande formelle auprès d’Ottawa, et ce, « malgré une position unanime du conseil municipal de Montréal en faveur de ce principe » rappelée par l’attachée de presse de Mme Plante, Catherine Cadotte, dans un courriel envoyé jeudi à La Presse Canadienne.

L’approche entérinée vise à éviter un dossier criminel et l’emprisonnement à des personnes trouvées en présence de petites quantités de drogues pour leur usage personnel.

« Avant de changer les lois, c’est essentiel de fournir aux villes plus de ressources en logements, en santé mentale, en toxicomanie et en intervention sociale », a-t-elle déclaré.

Questionné au sujet de la « demande » de Mme Plante et appelé à réagir aux propos du cabinet de cette dernière, le bureau de M. Poilievre a déclaré vendredi que « la mairesse de Montréal a confirmé son désir de légaliser les drogues dures ».

Cela s’inscrit dans la même veine que le libellé d’une motion proposée par le chef conservateur qui a été débattue jeudi. Celle-ci appelle notamment au rejet, par M. Trudeau, du « vote de la Ville de Montréal demandant au gouvernement fédéral de rendre légales des drogues dures mortelles ».

Aucun appui à la légalisation de toutes les drogues n’est venu de la municipalité.

Dès 2021, les élus montréalais ont plutôt adopté une motion pour demander à Ottawa de permettre la décriminalisation de la possession simple. Mme Plante avait voté en faveur et elle a, depuis, réitéré plusieurs fois son appui à l’approche.

« Les personnes qui utilisent des drogues n’ont pas besoin d’une cellule et d’un dossier criminel, elles ont besoin de soins et d’un toit, et c’est là-dessus qu’il faut agir immédiatement », a ajouté Mme Cadotte.

Le bureau de M. Poilievre maintient la même interprétation du mot « légalisation » et son champ lexical connexe sans faire de distinction avec le terme « décriminalisation ».

Dans son courriel de réponse aux questions de La Presse Canadienne, la porte-parole Marion Ringuette a condamné « l’expérience de Justin Trudeau en matière de légalisation des drogues dures ».

Il ne fait aucun doute aux yeux des conservateurs que l’exemption accordée par le gouvernement Trudeau à la Colombie-Britannique « s’est traduite par la mort et la destruction, le chaos et le carnage dans les hôpitaux, les terrains de jeux, les parcs et les transports publics de la Colombie-Britannique », a-t-elle rappelé.

Or, il n’est pas clair ce qu’il adviendrait d’une demande formelle venant de Montréal – si elle se concrétisait un jour – puisque M. Trudeau a clairement dit vouloir travailler avec les ordres de gouvernement provinciaux à ce chapitre.

« Quand Vancouver nous a demandé une exemption, nous avons dit : “Non, nous voulons collaborer uniquement avec la province dans ce dossier”. […] La même chose (prévaudra) en ce qui concerne l’Ontario ou le Québec », a-t-il affirmé la semaine dernière lors d’une période des questions.

Quand Ottawa a accordé son exemption à la Colombie-Britannique, au printemps 2022, le gouvernement de François Legault a signalé que la décriminalisation n’était pas dans ses cartons.