À quelques jours du 1er juillet, la Ville de Montréal s’attend à devoir délier les cordons de sa bourse pour héberger des ménages qui perdront leur logement sans avoir trouvé un nouveau toit.

L’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM), qui a le mandat d’épauler les locataires dans leur recherche d’appartement, accompagne en ce moment 250 ménages, comparativement à 120 l’an dernier à la même date, a révélé la mairesse Valérie Plante, mercredi, en point de presse.

« C’est une période stressante pour beaucoup de monde en raison de la crise du logement », a souligné Mme Plante.

Actuellement, 17 ménages ayant perdu leur appartement sont logés à l’hôtel en vertu du programme d’hébergement d’urgence de l’OMHM. Mais ce nombre risque d’exploser le 1er juillet, alors que plusieurs baux viennent à échéance.

Benoit Dorais, élu responsable du logement au comité exécutif, a rappelé que la Ville avait augmenté à 3,5 millions le financement pour l’hébergement d’urgence cette année. En 2023, les coûts se sont élevés à 2,95 millions.

« Si ça coûte plus cher, on va éponger la facture. On s’attend d’ailleurs à devoir décaisser davantage », a dit M. Dorais, qui est aussi maire de l’arrondissement du Sud-Ouest.

Des campements tolérés seulement pour les manifestants

Questionnée au sujet de la multiplication des campements installés par des sans-abri, dans un contexte où les refuges débordent, la mairesse Plante a répété que la Ville ne les tolérait pas et qu’ils seraient démantelés.

Pourquoi, alors, tolérer des campements de manifestants dans un endroit public, comme celui du square Victoria ? « Les gens qui militent pour une cause spécifique n’ont pas l’intention de rester là à long terme, a-t-elle répondu. Les manifestants ont généralement un logement où ils peuvent retourner manger, prendre une douche. Mais on ne peut pas laisser des gens vivre dans la rue sans eau courante et sans toilettes. »

Plus de logements sociaux

Mme Plante a réitéré ses demandes pour une hausse du financement gouvernemental en logement social, affirmant que la Ville de Montréal apportait sa contribution en achetant des terrains et des immeubles pouvant servir pour de tels projets.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Valérie Plante a réitéré ses demandes pour une hausse du financement gouvernemental en logement social.

Une coalition d’organismes communautaires, qui a tenu une conférence de presse mardi matin, est d’accord avec cette demande et va même plus loin : il faudrait doubler la part de logements sociaux dans le parc immobilier au cours des 15 prochaines années pour qu’elle atteigne 20 %. « C’est réaliste, il faudrait construire 10 000 logements sociaux par année », souligne Stéphanie Barahona, du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), qui plaide pour une « socialisation » du parc immobilier.

Citant des données du dernier recensement, Mme Barahona souligne que 128 000 ménages québécois locataires consacrent plus de la moitié de leur revenu à leur logement, ce qui les place en situation très précaire.

Les membres de cette coalition s’inquiètent par ailleurs du lien qui est fait entre l’immigration et la crise du logement, qui pourrait mener les décideurs à choisir de mauvaises solutions.

« C’est facile de blâmer l’immigration, mais la ville de Shawinigan est l’une des moins multiethniques au Canada et la crise du logement y fait quand même des ravages », note Mostafa Henaway, organisateur communautaire au Centre des travailleurs immigrants.

Le groupe craint aussi l’élection éventuelle des conservateurs à la tête du pays, soulignant que le discours de Pierre Poilievre en faveur d’une plus grande place pour l’entreprise privée en immobilier et moins d’intervention de l’État pourrait se solder par une catastrophe pour les plus démunis.

En attendant, des organismes d’aide aux sans-abri s’attendent à un afflux de clientèle après le 1er juillet. « Déjà, on voit environ 10 nouveaux visages chaque semaine », indique Maggie Chittspattio, intervenante communautaire chez Résilience Montréal. « Pour ces gens, nous sommes le dernier recours. »