Les relations entre les manifestants propalestiniens et le voisinage au square Victoria à Montréal demeurent bonnes cinq jours après la mise en place du campement. Les commerçants et les employés du secteur rencontrés par La Presse disent s’accommoder de la présence de tentes et de barricades, mais plusieurs dénoncent le fait que la statue de la reine Victoria a été vandalisée.

« [La peinture], qu’ils mettent ça sur leurs tentes, sur leurs pancartes, je n’ai aucun problème, mais qu’ils ne touchent pas aux œuvres d’art », dénonce Dominique Perron, producteur des concerts Midi Montréal Centre-ville au square Victoria, rencontré sur place mercredi. Il dit néanmoins respecter la présence des manifestants.

Une centaine de personnes profitaient de l’heure du midi pour prendre un peu d’air dans l’herbe ou sur les bancs de parc au square Victoria. Une prestation musicale au piano et à la flûte ajoutait au calme ambiant. À l’autre extrémité du square, la présence de tentes ceinturées de toiles en plastique recouvertes de slogans propalestiniens contrastait avec cette affluence estivale habituelle.

Depuis le 22 juin, environ 150 manifestants, selon l’estimation de participants, vont et viennent dans le campement occupant la moitié sud de cette place du centre-ville de Montréal.

Benoît Allard, porte-parole du collectif Désinvestir pour la Palestine, qui participe à l’occupation, cite deux revendications : « Obtenir le désinvestissement immédiat [par la Caisse de dépôt et placement du Québec] des parts obtenues dans les entreprises complices de l’occupation en Palestine par l’État d’Israël et obtenir la fermeture du bureau du Québec à Tel-Aviv. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Les manifestants ont deux principales revendications : « Obtenir le désinvestissement immédiat [par la Caisse de dépôt et placement du Québec] des parts obtenues dans les entreprises complices de l’occupation en Palestine par l’État d’Israël et obtenir la fermeture du bureau du Québec à Tel-Aviv. »

La statue de la reine Victoria trônant au centre du squaré nommé en son honneur a été aspergée de peinture et recouverte de slogans propalestiniens. La même journée, une contre-manifestation a été tenue par des groupes exigeant la levée du campement. Les deux camps se sont longuement fait face, mais le tout s’est déroulé sans heurt.

Aucune arrestation n’a eu lieu en lien avec cet évènement, selon le SPVM.

La mairesse de Montréal, Valérie Plante, affirme que la Ville se montrera tolérante envers les manifestants, aussi longtemps qu’ils se feront entendre dans le respect.

Les gestes d’intimidation et de vandalisme sont inacceptables, tout comme les propos antisémites ou antimusulmans. Mais la guerre à Gaza, ça vient chercher les gens. C’est normal qu’ils cherchent à manifester leur colère ou leur sentiment d’impuissance. Ils ont besoin d’une soupape.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

Indifférence majoritaire

La grande majorité des personnes abordées par La Presse au square mercredi se sont montrées peu dérangées par le campement. Plusieurs soulignent leur accord avec la cause, mais doutent de l’utilité de ce genre de démarche.

« Ça se passe plutôt bien, ils sont tranquilles. […] Mais personnellement, je trouve que ça ne va rien changer », dit Carlos Mejia, rencontré devant l’immeuble où il travaille au square Victoria.

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La grande majorité des personnes abordées par La Presse au square mercredi se sont montrées peu dérangées par le campement.

Par ailleurs, les commerçants interrogés sont peu troublés par l’occupation. « Il y a beaucoup de policiers dans le secteur, mais comme commerçant, autour du restaurant, on n’a vraiment aucun impact », note Victor Colette, directeur du restaurant Stellina situé rue Saint-Jacques en biais du square.

Même son de cloche chez Gerry Desjardins, fleuriste tenant boutique depuis 37 ans en face de l’édicule de la station de métro. « [Les manifestants] sont pacifiques depuis qu’ils sont ici. » Selon lui, ses ventes n’ont pas baissé depuis le début de l’occupation adjacente à son commerce.

« La grande majorité des interactions qu’on a avec les gens autour sont extrêmement positives », confirme Benoît Allard. Même si certaines interactions avec les passants sont plus tendues, leur part reste « très minoritaire ».

« La statue de la reine Victoria, c’est un symbole colonial »

Toutefois, la sympathie à l’égard de l’occupation s’arrête souvent lorsqu’il est question du vandalisme de la statue.

« Si les Palestiniens veulent avoir l’appui des Montréalais, qu’ils arrêtent de vandaliser notre ville », s’offusque François Theoret, employé dans un bureau à proximité, en prenant une photo de la statue temporairement multicolore.

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La statue de la reine Victoria trônant au centre du parc du même nom a été aspergée de peinture et recouverte de slogans propalestiniens.

« Ça se nettoie, je ne pense pas que ça soit un problème à long terme. S’ils veulent se faire entendre, c’est normal », nuance Marc Delgado, qui travaille lui aussi à proximité.

« La statue de la reine Victoria, c’est un symbole colonial », lance Benoît Allard, questionné à ce sujet. « Qu’est-ce qui fait le plus de dommages à la ville entre un peu de peinture sur un symbole colonial ou le silence de nos institutions publiques […] sur le génocide en cours ? », ajoute-t-il.

Peter Villani, un des organisateurs de la manifestation pour la levée du campement tenue mardi, demande qu’il y ait des actions contre les manifestants. « Il faut que les autorités disent que c’est fini et que les gens doivent pouvoir profiter d’un espace public qui est censé être accessible à tous », dit-il.

Des manifestants ont tenté de renverser la statue lundi soir.

Avec la collaboration d’Isabelle Ducas, La Presse