En service depuis bientôt un an, le tronçon de la Rive-Sud du Réseau express métropolitain (REM) achève maintenant sa phase de rodage, dit CDPQ Infra. L’opérateur estime avoir fait d’importants progrès en matière de gestion et de communication depuis l’inauguration, un constat partagé par les experts, qui rappellent toutefois que plusieurs problèmes demeurent.

« On utilisait le mot rodage depuis un moment. Là, on arrive bientôt sur notre première année d’existence. Je pense qu’on peut arrêter de dire qu’on est en rodage avec un R majuscule », explique le directeur adjoint aux communications de CDPQ Infra, Francis Labbé, en entrevue avec La Presse.

Depuis le lancement du tronçon de la Rive-Sud du REM, le 31 juillet dernier, la Caisse de dépôt se dit « en phase de rodage », une expression qu’elle utilise d’ailleurs parfois pour justifier des ratés du train léger, comme des pannes à répétition ou encore des interruptions prolongées du service.

Mais près de 11 mois plus tard, cette période tire maintenant officiellement à sa fin. Et selon M. Labbé, quelques signes ne mentent pas.

Par exemple, s’il y a encore quelques mois, les remises en marche du train léger après une panne prenaient en moyenne une heure, « on est aujourd’hui rendus à environ 20 minutes », note le porte-parole Francis Labbé.

« C’est un changement majeur pour nous, et c’est ce qui explique que les pannes sont moins nombreuses et durent moins longtemps la plupart du temps », soutient-il.

En termes de communication, « on s’est aussi beaucoup améliorés », estime Francis Labbé. Outre le réseau social X, plusieurs autres canaux de communication ont été mis sur pied pour tenir les usagers au courant des incidents, dont un service de messages textes. Certains messages en station ont aussi été révisés.

« Rendu ailleurs »

Chez Trajectoire Québec, un organisme défendant les intérêts des usagers en transport collectif, la directrice générale, Sarah V. Doyon, estime aussi que le REM « est rendu ailleurs, et n’est plus en rodage ».

Après, ça ne veut pas dire que parce qu’on n’est plus en rodage, il n’y aura jamais de pannes, mais on s’attend à ce qu’il y en ait moins et, surtout, que la réponse soit mieux gérée. Je ne veux plus entendre qu’on est en apprentissage. À partir de maintenant, la machine est bien huilée, ce n’est plus une excuse.

Sarah V. Doyon, de Trajectoire Québec

À ses yeux, le défi le plus complexe surviendra « au moment où ils vont devoir migrer vers un seul centre de contrôle ». « Actuellement, il y en a un sur la Rive-Sud, il y en aura un pour les autres branches, mais ensuite, tout sera intégré en un seul. Je sais que ce bout-là inquiète la Caisse de dépôt, qui a peu de temps pour le faire avec un système qui roule tout le temps. Ça va être un moment crucial », persiste-t-elle.

« Pour le reste, on espère qu’ils ont tiré suffisamment d’apprentissages sur la Rive-Sud pour ne pas refaire les mêmes erreurs sur les autres tronçons. »

À l’Université de Montréal, l’expert en planification des transports Pierre Barrieau apporte un autre éclairage. « Un an, c’est bien, mais en me basant sur la gestion des interruptions, je ne pense pas qu’on soit pleinement sortis du rodage. Que ce soit pour les personnes à mobilité réduite ou des enjeux de climatisation, il reste des choses importantes à peaufiner », affirme-t-il.

Selon lui, le train léger d’Ottawa, qui a connu plusieurs ratés au départ, « vient de frapper sa maturité après plus de trois ans de service ». « Avec le REM, on est proche, mais je ne crierais pas victoire nécessairement encore. N’empêche, la situation s’améliore grandement chaque mois », assure M. Barrieau.

Ce qu’il faut aussi garder en tête, c’est que l’hiver reviendra. Et vu les enjeux qu’il y a eu la saison dernière, on peut penser qu’il y aura du rodage de deuxième hiver.

Pierre Barrieau, expert en planification des transports

« L’impact de l’ouverture des nouvelles branches du REM, quelque part en 2025, il faut aussi le prendre en compte. Forcément, ça aura des perturbations sur le tronçon de la Rive-Sud », avance également l’expert.

Exit les mises à jour

Presque chaque week-end depuis quelques mois, le Réseau express métropolitain (REM) doit fermer en début de journée pour effectuer des « mises à jour » de ses systèmes. Un processus nécessaire, qui devrait toutefois s’estomper d’ici la fin de l’été.

Une telle mise à jour peut toucher plusieurs composantes du train léger. « Ça peut être les écrans dans les voitures, les systèmes qui permettent la communication avec les passagers ou des corrections de bogues mineurs sur les logiciels pour les systèmes de roulement », illustre Francis Labbé.

En règle générale, le processus prend six heures. Et comme le REM est en service 20 heures sur 24, deux heures de service doivent donc forcément être retirées chaque fois. « Le défi, c’est qu’une fois que nos tests sont terminés la nuit, il faut qu’on remette la version antérieure sur les trains », dit M. Labbé.

« Cela dit, il va y en avoir nettement moins d’ici la fin de l’été, c’est l’engagement qu’on prend. Quelque part, le système va donc avoir gagné en maturité », conclut le porte-parole.