Le premier refuge pour personnes en situation d’itinérance d’Ahuntsic-Cartierville ouvrira ses portes à la mi-août, suscitant des craintes dans un CPE et une communauté religieuse situés tout près.

Le Centre Bois-de-Boulogne sera situé sur l’avenue du même nom, près de l’intersection avec la rue Dudemaine, « et pourra accueillir jusqu’à 50 personnes en situation d’itinérance », a indiqué la Ville de Montréal. L’hôtel de ville a approuvé l’achat d’un bâtiment jusqu’à récemment occupé par une maison de soins palliatifs.

Robert Beaudry, l’élu responsable de l’itinérance au comité exécutif, a indiqué que cette ouverture témoignait du fait que le problème ne touche plus seulement le centre-ville et les secteurs adjacents.

« L’itinérance n’est pas en décroissance, on le voit », a-t-il dit en entrevue téléphonique. « Les groupes ont besoin d’infrastructures pour offrir des services à cette population afin d’éviter qu’elle s’enracine dans la rue. » C’est la Société de développement social (SDS) qui opérera le centre, ouvert 24 heures sur 24, avec du financement du réseau de la santé.

Des intervenant(e)s de proximité en cohabitation sociale seront déployés sur le terrain pour assurer une cohabitation harmonieuse dans le voisinage », assure Montréal.

Robert Beaudry. élu responsable de l’itinérance au comité exécutif de la Ville de Montréal

Vives inquiétudes

Mais l’ouverture prochaine du site suscite de l’inquiétude dans le quartier. Le CPE Château de Grand-Mère accueille des enfants à une centaine de mètres du futur refuge.

« Ça suscite de nombreuses inquiétudes et des préoccupations importantes pour les enfants qui vont y être exposés. C’est vraiment une grande proximité », a dit Michel Desrosiers, directeur général de l’établissement. « On reconnaît le problème important de l’itinérance, mais que les décideurs ne tiennent pas compte de la localisation au moment de l’implantation de ces ressources-là, ça m’apparaît un manquement important. »

Il craint que les enfants ne soient témoins de « toutes sortes de situations à haute intensité qui portent atteinte à la sécurité affective ».

Ses voisines sont les Oblates franciscaines de Saint-Joseph. « Je suis en colère », a déclaré d’emblée sœur Pierrette Bertrand, dirigeante de la congrégation vouée aux soins aux femmes indigentes.

« Dans notre quartier, il n’y a pas d’itinérants. C’est un quartier de pauvreté, parce que c’est une forte majorité d’immigrants qui arrivent et souvent des sans-papiers. Est-ce qu’on va ajouter à ça des itinérants qui viennent d’ailleurs ? », a-t-elle lancé.

« Pas du tout démocratique »

M. Desrosiers et sœur Pierrette Bertrand en ont aussi contre l’absence de consultation du voisinage de la part de la Ville de Montréal. Ils ont reçu un avis leur annonçant une « séance d’information en prévision de l’ouverture », qui se déroulera uniquement en mode virtuel.

« Ce n’est pas du tout démocratique, c’est le moins que je puisse dire. [La Ville dit] : “C’est ça qui va se passer et c’est ça que vous allez vivre” », a déploré la religieuse.

Robert Beaudry a fait valoir que la Ville de Montréal ne faisait jamais de consultation pour des projets comme celui-là.

« C’est un peu comme le logement social. Quand on fait un logement de projet social, on ne fait pas une consultation publique », a dit l’élu. « Par contre, c’est important d’entendre et d’écouter la population. C’est une séance d’information, mais ça va être un échange aussi avec la population. Il va y avoir aussi une visite des lieux, une porte ouverte avant l’ouverture. »