« Est-ce que je peux avoir une bouteille d’eau ? »

« Vélo… rie Plante ? »

Cette question et cette blague lancées candidement par des citoyens, le plombier de la Ville de Montréal Éric Dion les entend fréquemment depuis deux mois lors de ses déplacements. On lui envoie la main, on lui sourit. Impossible de le manquer avec le logo de la Ville de Montréal et l’inscription « Service de l’eau » sur la caisse avant.

Ce qui fait autant réagir les gens, c’est son nouveau moyen de transport au travail. Il s’agit d’un vélo cargo frontal à assistance électrique. « Il rend le monde de bonne humeur », dit-il.

M. Dion roule avec le mastodonte depuis environ deux mois.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le plus gros défi d’Éric Dion consiste à rouler sans voir la roue avant : « Au début, c’est déstabilisant, ça prend de la pratique », admet-il.

« Je suis encore en période de rodage. On ne voit pas la roue en avant. Au début, c’est déstabilisant, ça prend de la pratique », admet le plombier et cycliste aguerri. Il a donné rendez-vous à La Presse devant l’usine de production d’eau potable Atwater, rue Dupuis à Verdun, pour expliquer le fonctionnement de son véhicule.

Dans le coffre avant, il peut transporter une bonne centaine de kilos. Il y dépose ses outils de plomberie, de lourds compteurs d’eau, un gros seau en plastique, et évidemment son casque de vélo, son lunch, son sac à dos avec ses vêtements de rechange.

Le spécialiste de l’entretien des compteurs d’eau dans les industries, commerces et institutions (ICI) de la Ville de Montréal a eu l’idée du vélo cargo lors de ses voyages en Europe. Il a présenté son projet et des devis à ses gestionnaires, qui ont accepté d’en financer l’achat. Le vélo cargo coûte plus de 12 000 $. Ce n’est pas donné, admet-il, mais c’est moins cher que de se déplacer avec le camion de la Ville. Le plombier ne perd pas de temps à chercher du stationnement, et son transport actif est bon pour sa santé et celle de la planète.

« Par exemple, lors d’une récente journée de travail, j’ai parcouru 38 kilomètres en 2 heures 22 minutes. Juste pour cette journée, mon application d’enregistrement d’activités sportives m’indique que j’ai réalisé une économie de 8,33 kg de CO2 », montre-t-il sur l’écran de son portable.

Ailleurs dans les arrondissements de Montréal, des cols bleus adoptent tranquillement le vélo cargo. Surtout en horticulture, pour sillonner jardins communautaires et parcs. Dans Ville-Marie, un préposé à l’entretien et au nettoyage des rues se déplace à vélo cargo. Dans le Plateau-Mont-Royal, il y a deux vélos cargos pour les jardiniers. « Ils facilitent les déplacements dans les rues étroites. » L’arrondissement aimerait en acquérir d’autres, ajoute Geneviève Allard, chargée de communication.

Au Québec, dans le cadre du Plan pour une économie verte 2023, les individus et entreprises peuvent obtenir un certain financement à l’achat d’un vélo cargo grâce au programme Écocamionnage. Et grâce à un projet en collaboration avec la Caisse d’économie solidaire, des bourses allant jusqu’à 2500 $ sont offertes aux cyclistes chez le fabricant de vélos cargos Dumoulin Bicyclettes. À la mi-juin, 13 bourses avaient été remises. Il n’en reste que trois à attribuer, a expliqué Pierre-Marie Legrain, copropriétaire de l’entreprise montréalaise.

« J’espère qu’on aura une troisième saison de ce programme », dit-il.

L’engin sur roues n’a plus de secret pour l’expert en bicyclettes de tous genres. Il explique que les véhicules à assistance électrique sont assemblés selon les besoins de la clientèle. On a dépassé l’époque du vélo pour livrer la pizza, explique-t-il. Le prix peut varier de 2000 $ (sans le moteur) jusqu’à plus de 12 000 $. Il y a trois modèles : le vélo cargo allongé, le triporteur (modèle pratique pour les déplacements avec les enfants) et celui du plombier de Montréal, dit le « frontal ».

Pour chaque cycliste, il y a un vélo. On se dit qu’on change les habitudes de mobilité un vélo à la fois. Ce n’est pas le Tour de France chez nous, n’importe qui peut rouler avec l’assistance électrique. On a même des forfaits pour les mises au point annuelles. Le gros de notre marché est à Montréal, mais également à Laval, en Montérégie, à Sherbrooke, à Magog. À Drummondville et à Québec aussi.

Pierre-Marie Legrain, copropriétaire de Dumoulin Bicyclettes

Dans un rapport publié en mai dernier en collaboration avec la Chaire Mobilité de Polytechnique Montréal, l’organisme environnemental Équiterre concluait que les bicyclettes à assistance électrique, dont le vélo cargo, ont le potentiel de remplacer jusqu’à 25 % des déplacements qui se font actuellement en voiture dans la grande région de Montréal. Un remplacement de l’automobile par des déplacements combinant le vélo et les transports en commun pourrait générer une économie par ménage pouvant atteindre 7146 $, toujours selon Équiterre.

Consultez le site de Vélo Québec pour en savoir plus sur le vélo cargo Consultez le site du ministère des Transports et de la Mobilité durable pour le programme Écocamionnage Consultez un récent rapport d’Équiterre sur le vélo à assistance électrique Lisez le portrait d’Alphonso Perez, préposé au nettoyage en vélo cargo
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  • 1 kg
    Quantité de CO2 produite pour 4,6 km parcourus en voiture à essence ou au diesel
    Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)