Chaque semaine, nous explorons les solutions à notre disposition pour avoir une incidence sur la crise climatique et environnementale.

« 100 % végétalien », « à base de pommes », « bon pour la planète »… Au cours des dernières années, les solutions de rechange au cuir traditionnel fleurissent sur le marché. Remplissent-elles leurs promesses ?

« J’ai acheté un sac en cuir végane québécois, mais je le trouve vraiment de mauvaise qualité. Existe-t-il un produit durable qui puisse rivaliser avec du vrai cuir, et qui soit bon pour l’environnement ? », demande Evelyne.

De la vache au sac à main

Déjà, le cuir traditionnel est-il nocif pour l’environnement ?

Bien que la grande majorité des peaux utilisées pour le cuir soient issues de l’élevage bovin, on attribue généralement l’incidence environnementale d’une vache à son lait et à sa viande, pas à sa peau. Cette dernière est considérée comme un sous-produit de l’industrie agroalimentaire que l’on revalorise en le transformant en cuir, explique Louis Gagné, directeur d’Écofaune boréale, du Centre collégial de transfert technologique (CCTT) de Saint-Félicien.

« Il y a encore beaucoup de gaspillage dans l’industrie bovine », souligne-t-il. Il estime qu’au Québec, plus de 250 000 peaux partent chaque année en direction des dépotoirs, plutôt que d’être revalorisées.

Ce point de vue fait cependant débat, puisque des associations de défense des animaux, comme People for the Ethical Treatment of Animals (PETA), incluent l’impact de l’élevage dans les différents enjeux environnementaux liés au cuir.

Le cuir traditionnel pose également problème sur le plan de son processus de tannage. Celui au chrome, en particulier, utilise des métaux lourds qui sont très dommageables pour la santé et l’environnement. Des méthodes moins polluantes existent, comme le tannage végétal ; de plus, des certifications, comme celle du Leather Working Group, permettent de garantir que le cuir que l’on achète est éthique et conforme à de hauts standards environnementaux. Ces initiatives sont néanmoins marginales : à l’échelle mondiale, on estime que 80 à 90 % des cuirs sont encore tannés au chrome aujourd’hui.

Dans tous les cas, si la population mondiale parvient à réduire de façon draconienne sa consommation de viande rouge, il faudra trouver, à terme, des substituts au cuir, souligne le sixième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

Des options « vertes » ?

La grande majorité des substituts présents sur le marché sont fabriqués à partir de polychlorure de vinyle (PVC) ou de polyuréthane (PU). Bien que le second soit moins polluant que le premier, ces deux matériaux posent des enjeux environnementaux, tant en ce qui concerne les rejets toxiques pour l’environnement lors de leur fabrication que leur recyclage en fin de vie.

Quand on dit d’un sac qu’il est en cuir végane, c’est souvent de l’écoblanchiment pour éviter de dire plastique.

Corinne Bourget, enseignante au Centre des métiers du cuir de Montréal

Mme Bourget est enseignante en maroquinerie au Centre des métiers du cuir de Montréal, et a aussi lancé en 2018 l’Atelier Hotelmotel, où elle fabrique à la main des chaussures et des accessoires en cuir.

L’un dans l’autre, il reste que des chaussures synthétiques ont moins de répercussions que des chaussures en cuir, montre une analyse réalisée en 2018 par le cabinet de conseil en stratégie environnementale Quantis. Mais elles peinent à rivaliser sur le plan de la qualité.

« Avec le temps, ces faux cuirs vont s’écailler. C’est très difficilement réparable, ce qui limite beaucoup leur durée de vie », explique Corinne Bourget.

L’espoir d’un cuir 100 % végétal

Ananas, pommes, raisin, maïs, cactus, pelures d’orange, champignons : de nombreuses entreprises se sont également lancées au cours des dernières années dans des cuirs à base de végétaux.

Là encore, le diable est dans les détails. Bien souvent, ces cuirs sont en fait un mélange de polyuréthane et de fibres végétales – le pourcentage de matières plastiques excédant celui des matières végétales.

Certaines entreprises se lancent cependant dans des cuirs garantis 100 % d’origine végétale, comme l’entreprise québécoise Flaura. Fannie Laroche, sa fondatrice, explique que le cuir végétal qu’elle fabrique est constitué à 40 % de poudre de pelures de pommes, qu’elle mélange à des produits plastifiants – eux aussi d’origine végétale – avant de l’appliquer en une fine couche sur un textile pour lui donner un « effet cuir ». Elle espère se lancer dès l’automne dans la commercialisation de son produit pour fabriquer chaussures, sacs ou encore revêtement intérieur de voiture.

« On aimerait se rapprocher le plus possible d’un cuir animal, sur le plan mécanique, esthétique et de la durabilité, et aussi en matière de prix, explique-t-elle. Le but est qu’on puisse le garder toute sa vie, mais qu’il soit biodégradable si on veut s’en défaire. »

Repenser sa consommation

Seriez-vous prêt, aujourd’hui, à porter la même paire de chaussures ou le même sac tous les jours, toute votre vie ?

« Il y a ce paradoxe, entre durabilité et mode éphémère. On veut que ça dure, mais on se fatigue vite de nos vêtements », soupire Louis Gagné.

Un avis partagé par Elliot Muller, chercheur au Centre international de référence sur l’analyse du cycle de vie et la transition durable (CIRAIG). Selon lui, le vrai enjeu du cuir – qu’il soit animal, végétal ou synthétique – n’est pas tant la méthode de production que l’usage qu’on en fait.

Même si la recherche montre qu’une chaussure synthétique a deux fois moins d’impact, si on la garde trois fois moins longtemps, son impact sera finalement plus élevé.

Elliot Muller, du CIRAIG

Selon lui, si l’on souhaite se procurer un vêtement ou un accessoire en cuir, le meilleur choix reste d’acheter – et de porter – de seconde main.

« Le but global en tant que société est de réduire la production. Quel que soit le type de sac ou de chaussure, l’important est de le garder le plus longtemps possible et d’éviter d’en accumuler dans sa garde-robe », affirme M. Muller.

En bref

Feu vert : lancement du projet Quai 34

ILLUSTRATION FOURNIE PAR L’ARRONDISSEMENT DE LACHINE

La transformation du quai de la 34e Avenue, à Lachine, devrait prendre au moins six mois.

Montréal annonce le coup d’envoi de la transformation du quai de la 34e Avenue, à Lachine. Les travaux, qui devraient durer six mois, permettront de déminéraliser l’espace près du phare pour en faire un lieu de détente au bord du fleuve, avec des îlots de verdure et des installations pour la pêche. Le projet, financé par la Ville à hauteur de 3,4 millions de dollars, a été imaginé et voté par les citoyens de Lachine lors du premier budget participatif de la Ville de Montréal en 2020-2021.

100 millions

PHOTO R.M. NUNES, GETTY IMAGES

La Banque de l’infrastructure du Canada financera des rénovations énergétiques dans des bâtiments vieillissants partout au pays.

La Banque de l’infrastructure du Canada a annoncé dans un communiqué avoir conclu un investissement de 100 millions de dollars avec GDI Services aux immeubles inc. Ce financement devrait permettre de réaliser des rénovations énergétiques dans des bâtiments vieillissants, pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre d’au moins 30 % par an – pour une moyenne de 37 % pour l’ensemble du portefeuille de projets.

Elle a dit :

PHOTO FERNANDO LESSA, FOURNIE PAR L’UNIVERSITÉ DE VICTORIA

Sébaste nageant dans une forêt de varech

Nous pensons qu’il y a là un énorme potentiel pour faire quelque chose de bien pour le climat, la biodiversité et les populations côtières qui dépendent de ces écosystèmes.

Julia Baum, biologiste à l’Université de Victoria, participe à un projet de restauration des forêts sous-marines de varech, mises en péril par le réchauffement des océans. Ce projet est financé à hauteur de 3,68 millions de dollars par Pêches et Océans Canada

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