(Téhéran) La police iranienne a dispersé samedi des étudiants qui ont scandé à Téhéran des slogans « destructeurs » et « radicaux » lors d’un rassemblement à la mémoire des victimes à bord du Boeing ukrainien abattu mercredi « par erreur » par l’Iran, selon l’agence de presse iranienne Fars.

Selon des journalistes de l’AFP sur place, plusieurs centaines d’étudiants se sont rassemblés en début de soirée en réponse à une invitation à honorer les victimes de cette catastrophe qui a fait 176 morts, majoritairement des Iraniens et des Canadiens, dont des binationaux.

Le rassemblement, à la prestigieuse université Amir Kabir de Téhéran, s’est transformé en manifestation de colère. La foule a lancé des slogans dénonçant « les menteurs » et réclamant des poursuites contre les responsables du drame et ceux qui, selon les manifestants, ont tenté de le couvrir.

Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a publié une vidéo des manifestations sur Twitter, affirmant au passage que « le peuple iranien en avait assez des mensonges, de la corruption, de l'incompétence et de la brutalité du régime ».

L’Iran a reconnu samedi avoir abattu « par erreur » à l’aide d’un missile le vol PS752 de la compagnie Ukraine International Airlines peu après son décollage de Téhéran alors qu’il avait jusque-là fermement démenti l’hypothèse d’un tir de missile évoquée dès mercredi par le Canada.  

Selon Fars, proche des ultraconservateurs, les étudiants en colère ont déchiré une des nombreuses affiches en l’honneur du général iranien Qassem Soleimani, tué le 3 janvier dans une attaque de drone américaine à Bagdad.

Pour la République islamique d’Iran, ce chef de la Force Qods, chargée des opérations extérieures des Gardiens de la Révolution (l’armée idéologique iranienne), fait figure de « martyr vivant » et de héros.

L’agence Fars a publié plusieurs photos du rassemblement et une autre montrant une bannière déchirée à l’effigie d’un Soleimani souriant.

La police « a dispersé » les étudiants lorsqu’ils sont sortis de l’université et ont commencé à « bloquer la rue et créer un embouteillage », a indiqué Fars.

Fait extrêmement rare, la télévision d’État a fait mention de cette manifestation à l’antenne, et relevé que les étudiants avaient scandé des « slogans antirégime ».

Une vidéo impossible à authentifier circulait samedi soir sur les réseaux sociaux de ce qui pourrait être la police tirant des gaz lacrymogènes sur les manifestants. La vidéo montre notamment un homme se relevant après avoir été apparemment touché par un projectile à la jambe.

Mise en garde de Trump

Donald Trump a averti samedi le régime iranien qu’il ne pouvait « pas y avoir un autre massacre de manifestants pacifiques », en référence au mouvement de contestation qui avait eu lieu dans le pays en novembre dernier.

« Il ne peut pas y avoir un autre massacre de manifestants pacifiques, ni une coupure d’internet. Le monde regarde », a écrit sur Twitter le président américain.

Les manifestations qui ont éclaté mi-novembre en Iran pour protester contre une forte augmentation du prix de l’essence ont fait plus de 300 morts, selon l’ONG Amnistie internationale.

L’accès à internet avait été coupé à plusieurs reprises, notamment après des appels à commémoration lancés sur les réseaux sociaux, un mois après les manifestations.

« Au brave peuple iranien, qui souffre depuis longtemps : je suis à vos côtés depuis le début de ma présidence, et mon administration continuera à être à vos côtés », a tweeté samedi Donald Trump, en anglais et en farsi. « Nous suivons de près vos manifestations, et votre courage nous inspire », a-t-il ajouté.

En 2009, des dizaines de milliers de personnes avaient manifesté pour protester contre la réélection contestée du président populiste et ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad.

Ces manifestations avaient été violemment réprimées par les forces de sécurité.